A quelques mois des élections ( présidentielle, législatives et communales) au Bénin, l'on assiste déjà à un branle-bas socio-politique. Tous les partis politiques affûtent leurs armes.
Ce qui est, somme toute, normal. Car, quand on va à des élections, cela requiert un minimum de préparation, du moins, pour ceux-là qui ne veulent pas faire de la figuration ou amuser la galerie. Mais les choses ne semblent pas aller comme il se doit pour Les Démocrates de l'ancien chef d'Etat, Boni Yayi, qui vient de subir un double revers.
En effet, non seulement le parti a été exclu de la course à la présidentielle, mais aussi il ne pourra pas participer aux élections communales et municipales prévues pour se tenir le 11 janvier prochain. Pour ce qui est des communales, la Commission électorale nationale autonome (CENA) a jugé « irrecevables » les listes de candidatures de Les Démocrates au motif que le dossier est incomplet.
Sur 437 pièces qui composent le dossier, l'instance électorale dit en avoir dénombré, 353, notant un manque de 120 documents. Quant à la présidentielle du 12 avril 2026, la CENA invoque quasiment les mêmes raisons. Selon elle, la candidature du duo du parti de Boni Yayi n'a pas réussi à réunir tous les parrainages nécessaires.
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Patrice Talon, stratégiquement et méthodiquement, a réussi à verrouiller l'espace politique
Sur 28 parrainages, il n'en a présenté que 27. A noter toutefois que le Mouvement des élites engagées pour l'émancipation du Bénin (Moele- Bénin), formation de la mouvance présidentielle, a subi le même sort. Sa liste a été également invalidée. Sous réserve donc d'un éventuel recours auprès de la Cour constitutionnelle, seuls deux dossiers ont été, pour l'instant, jugés recevables par la CENA.
Il s'agit du candidat du parti au pouvoir et de celui du parti des Forces cauris pour un Bénin Emergent (FCBE) présentés par certains comme relevant de l'opposition modérée, pour ne pas dire qu'il s'agit de candidats motards. C'est donc clair. Patrice Talon est en train de faire place nette aux fins d'ouvrir un boulevard à son successeur désigné qu'est l'actuel ministre de l'Economie et des finances, Romuald Wadagni.
Car, en l'absence du parti Les Démocrates, on ne voit pas quel parti, dans le landerneau politique béninois, est capable de tailler des croupières au parti au pouvoir. En fait, on voyait venir les choses depuis que le locataire du Palais de la Marina avait décidé d'opérer des réformes électorales qui, on s'en souvient, avaient d'ailleurs suscité une véritable controverse ; tant ces réformes ont serré la vis, excluant de fait plusieurs partis du jeu politique.
A preuve, le Code électoral, modifié en mars 2024, après un premier texte adopté en 2019, a introduit des restrictions drastiques aussi bien pour les candidats à la présidentielle que pour l'accès à l'hémicycle. Et ce n'est pas tout. Un député ou un maire ne pourra parrainer qu'un candidat issu du parti sur la liste duquel il a été élu. Ce qui n'était pas le cas avec l'ancien Code électoral.
Le président entrant, quand il ne passe pas le temps à jeter la pierre au sortant, choisit de le mettre au cachot
Autant dire que Patrice Talon, stratégiquement et méthodiquement, a réussi à verrouiller l'espace politique au Bénin, jadis présenté comme une vitrine de la démocratie en Afrique de l'Ouest. S'il a donc décidé de ne pas briguer un troisième mandat en faisant valoir ses droits à la retraite, Patrice Talon n'entend pas se laisser succéder par un candidat de l'opposition.
Il veut assurer ses arrières et espérer se mettre à l'abri de tout tracas judiciaire, en travaillant à la victoire de son dauphin qui se rêve déjà d'un destin national. En clair, Patrice Talon veut partir sans partir. Même si, c'est dans l'ombre, il veut toujours continuer à jouer un rôle. Il n'a peut-être pas tort, surtout quand on sait qu'à son arrivée au pouvoir, il a fait voir des vertes et des pas mûres à son prédécesseur Boni Yayi, dont le dauphin Lionel Zinsou, avait mordu la poussière à la présidentielle de 2016.
Il sait donc ce qui l'attend si le parti Les Démocrates revient aux affaires. La vengeance étant un plat qui se mange froid, Patrice Talon ne devrait pas couler une retraite paisible au Bénin ; tant l'adversaire n'hésitera pas à lui rendre la monnaie de la pièce. Ainsi va toujours la politique en Afrique où, en cas d'alternance, le président entrant, quand il ne passe pas le temps à jeter la pierre au sortant, choisit de le mettre au cachot.
