Tunisie: COP 28 - Le bilan contrasté de la COP 27

Lors de la conférence sur le changement climatique de Charm el-Cheikh (COP27).
1 Novembre 2023

Après une COP 27 assez mitigée, la grand-messe du climat revient sur le continent africain à l'heure où la question de l'eau en Afrique du Nord domine l'actualité. Même si les attentes sont énormes, l'impact de cette diplomatie du climat ces dernières années soulève aujourd'hui plusieurs interrogations...

Que retenir de la Conférence de Charm-El-Cheikh ? La COP 27 a débouché sur un plan de mise en oeuvre d'un fonds spécifique pour les pertes et préjudices et d'un comité de transition pour le rendre opérationnel. La création de ce fonds répond à une demande forte, depuis plus de 30 ans, des pays en développement, les plus vulnérables en première ligne, face aux impacts du changement climatique, ayant contribué le moins et étant moins bien équipés pour y faire face.

Même si ce plan de mise en oeuvre demande aux institutions financières internationales de voir comment contribuer au financement des pertes et préjudices et reconnaît les derniers travaux scientifiques du Giec, il reste néanmoins peu ambitieux en termes d'atténuation, d'adaptation et de financement au sens large, ne faisant que reprendre certains acquis du Pacte de Glasgow sur le climat (maintien de l'objectif de +1,5°C, réduction progressive de la production d'électricité à base de charbon, élimination progressive des subventions «inefficaces » aux combustibles fossiles...).

COP de transition

Ce plan de mise en oeuvre ne reprend pas l'objectif fixé à Glasgow pour les pays développés (doubler d'ici 2025 leur soutien financier collectif aux pays en développement pour les actions d'adaptation, par rapport à 2019). Il ne fait pas mention non plus d'un pic d'émissions en 2025 malgré une demande forte en ce sens par l'UE.

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Quant au programme de travail visant à renforcer de façon urgente l'ambition en matière d'atténuation, lancé à Glasgow, la nouvelle décision en la matière est faible, s'en tenant essentiellement aux modalités procédurales.

La COP 27 a vu l'avancement des travaux techniques préparatoires dans le cadre du bilan mondial (Global Stocktake), dont le volet politique aura lieu cette année conformément à l'article 14 de l'Accord de Paris.

La COP 27 était une COP à forts enjeux où l'accent a été mis sur la mise en oeuvre du régime de Paris, dans un contexte mondial difficile. Elle est intervenue après quasiment deux ans de perturbations et restrictions des activités économiques et de la mobilité des personnes suite à la pandémie du Covid-19. La relance économique post-Covid, intervenue d'abord en 2021, s'est poursuivie en 2022, entraînant la reprise des émissions de GES et un nouveau record en 2021.

Par ailleurs, la Conférence est intervenue à un moment difficile. Depuis la COP 26, la situation mondiale a radicalement changé, le contexte géopolitique, énergétique et économique ayant été bouleversé de façon inattendue à la suite de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. La guerre menée en Ukraine a causé des tensions géopolitiques, une crise énergétique mondiale et de fortes hausses des prix de l'énergie, des matières premières et des produits alimentaires. Sur le plan politique, la Conférence de Charm El-Cheikh est intervenue avec, en toile de fond, le fait qu'après 13 ans les pays industrialisés ne soient pas parvenus à atteindre l'objectif des 100 Md$ de financement climat par an à son échéance en 2020, selon le bilan définitif de l'Ocde publié le 29 juillet 2022. En outre, l'Ocde a annoncé, le 29 août 2022, que les subventions publiques aux énergies fossiles ont quasiment doublé en 2021 et devraient continuer de croître en 2022. Même si la COP 27 n'était pas une COP charnière, mais plutôt une COP de transition, elle n'en était pas moins une COP à forts enjeux.

Eviter les pires scénarios

Vagues de chaleur, inondations, stress hydrique, les observations du Giec sur le climat sont de plus en plus alarmistes. Dans leur dernier rapport, ils indiquent qu'environ 3,3 à 3,6 milliards de personnes vivent dans des contextes très vulnérables au changement climatique. Selon les chercheurs du Giec, des efforts urgents d'adaptation et d'atténuation doivent être entrepris pour éviter les pires scénarios.

Des jalons importants posés

Cela faisait trente ans que les pays souffrant des conséquences du changement climatique réclamaient une aide des pays développés, premiers responsables de ce phénomène, pour faire face aux « pertes et dommages ». Jusqu'alors, ces derniers s'opposaient à tout mécanisme financier et au principe de réparation et de compensation pour leurs émissions passées. Mais les catastrophes climatiques récentes et les revendications du continent africain ont placé ce sujet au coeur des discussions.

Le financement des pertes et dommages est devenu au fil des jours le principal enjeu du sommet, porté par le groupe G77 + Chine, une coalition des pays en développement.

Parmi les pays développés, l'Union européenne a été la première à ouvrir la porte à la création d'un fonds, mais à condition d'élargir le cercle des financeurs, notamment aux pays fortement émetteurs et relativement riches, dont la Chine, d'en faire profiter uniquement les pays les plus vulnérables, et de renforcer l'effort global en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Cette proposition, interprétée comme une tentative d'écarter la Chine du reste de la coalition, n'a pas recueilli le soutien des pays en développement, et les différentes positions semblaient irréconciliables.

Au-delà de la création du fonds, plusieurs initiatives ont été annoncées pour répondre aux pertes et dommages, dont le montant global se limite à 350 millions de dollars.

Le rétablissement de la confiance entre les pays du Nord et du Sud, sur fond du non-respect de la promesse de l'aide de 100 milliards de dollars par an promise pour 2020 par les pays développés, était l'un des principaux enjeux du sommet. Cette promesse de 100 milliards doit être remplie en 2023 ou 2024, et la prochaine cible devra être bien supérieure pour satisfaire les besoins des pays en développement pour lutter efficacement contre le dérèglement climatique, qui se compteraient en milliers plutôt qu'en centaines de milliards de dollars. Les discussions sur le montant du financement, mais aussi sur sa forme (emprunts, dons) et la mobilisation des acteurs privés se poursuivront mais des premiers jalons ont été posés.

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