Le président de PlanetFinance, Jacques Attali, a estimé lundi, 30 mars 2009 à Tunis, lors d'une conférence prononcée en présence du président du Groupe de la Banque africaine de développement (BAD), Donald Kaberuka, que la microfinance peut contribuer fortement à atténuer les conséquences de la crise financière internationale en Afrique.
S'exprimant dans le cadre du cycle des «éminents conférenciers» de la Banque africaine de développement sur le thème «Crise financière et microfinance», M. Attali a indiqué que l'Afrique représente seulement 10% de la microfinance mondiale.
«La micro-finance peut être une solution à la crise financière parce qu'elle repose sur une éthique qui fait cruellement à la finance classique. La micro-finance repose également sur le prêt de proximité ; c'est une banque d'intérêt général qui n'est pas obnubilé par le profit», a poursuivi l'économiste français, auteur d'une cinquantaine d'ouvrages.
Il a également souligné l'impact direct de la microfinance sur la réduction de la pauvreté, la présentant comme «l'instrument le plus efficace de l'aide publique au développement».
Conseiller de l'ancien président français François Mitterrand, essayiste et chroniqueur à l'hebdomadaire Le Point, M. Attali a crée en 1998 PlanetFinance, une structure de soutien au microcrédit présent dans plusieurs pays africains.
Devant près d'un demi-millier de personnes, il a redit à Tunis sa conviction dans le rôle clé de la microfinance dans le développement de l'Afrique.
«La crise financière globale n'a pas forcément eu un énorme impact sur le secteur de la microfinance en Afrique, mais nous constatons certains changements récents qui se sont incontestablement liés à l'instabilité économique mondiale», a poursuivi l'économiste français, citant les cas du Maroc et du Sénégal.
Pour lui, la crise financière a déjà des conséquences, notamment en Afrique de l'Ouest, sur les transferts des migrants, un des leviers de la microfinance dans cette sous-région.
«Ainsi la crise financière globale se répercute au niveau des emprunteurs : au Sénégal, par exemple, 80% du budget viennent des ménages de l'étranger. Ces transferts jouent un rôle crucial pour la réduction de la pauvreté, le soutien de la consommation des ménages et l'activité des certains secteurs», a argumenté le président de Planet-Finance.
Selon des études récentes, les transferts officiels des migrants africains passeront de près de 550 milliards de FCFA, en 2008, à environ 400 milliards de FCFA en 2009, soit une baisse de 150 milliards.
M. Attali a par ailleurs souhaité la professionnalisation des institutions africaines de microfinance qui doivent, d'après lui, renforcer leur gouvernance.
Le diagnostic de M. Attali sur les raisons de la crise financière internationale est partagé par le président de la BAD Donald Kaberuka, modérateur de la conférence qui a donné lieu à un échange nourri avec l'auditoire.
«Cette crise intervient au moment même à l'Afrique commence à tirer les bénéfices de sa croissance. Il faut faire en sorte que les efforts fournis depuis tant d'années ne soient pas compromis», a dit M. Kaberuka qui a en outre précisé qu'il se rendra au Sommet du G-20 prévu du 2 au 3 avril 2009 à Londres.
«Nous irons réclamer des mesures vigoureuses pour l'Afrique lors de cette réunion», a assuré le président de la BAD qui a, peu auparavant, chaleureusement remercié le président de PlanetFinance pour sa brillante conférence.
Le Groupe de la BAD a mis en place une Facilité de liquidité d'urgence de près 1,5 milliard de dollars et une Initiative de financement du commerce d'environ 1 milliard pour aider ses pays membres régionaux à faire face à la crise financière.
Lors d'une intervention le 19 mars 2009 à Genève, le président de la BAD a réaffirmé la nécessité absolue d'intégrer l'Afrique dans la réponse globale à la crise.