L’Afrique est aujourd’hui perçue comme le continent de tous les possibles mais aussi de tous les défis loin de la famine et des guerres qui ont hanté l’imaginaire commun de sa population.Cette conviction est mise en exergue dans le cadre de la Conférence MEDays 2015 ouverte, ce mercredi 11 Novembre à Tanger, au Maroc.
Le continent est maintenant en cour de réalisation de son potentiel. Cette conviction est du président de l’Institut International Amadeus, initiateur des MEDays ou Forum du Sud, ouverts depuis ce mercredi 11 novembre à Tanger, au Maroc. S’appuyant sur les dernières projections économiques faites par les institutions de Breton Woods, M. Brahim Fassi-Fihri se réjouit du fait que « le continent devrait, dans les années à venir, saluer l’émergence de nouveaux lions africains dans les reines d’un monde qui n’attend pas les retardataires ».
A son avis, malgré la persistance des crises politiques et sécuritaires, l’Afrique a démontré sa capacité à surmonter les défis d’envergure qui sont, entre autres, l’amélioration de la gouvernance avec les réformes entreprises par plusieurs pays africains ayant permis d’insuffler une dynamique de croissance considérable.
Une dynamique qui, pour le maintenir, nécessite une réadaptation face au nouvel ordre mondial rythmé par des chocs de toute sorte. Dans ce contexte, la co-émergence est placée et perçue comme la clé de réussite d’une telle vision. D’où la pertinence, selon les responsables d’Amadeus, du thème des MEDays 2015.
Le président de cet institut International inscrit la co-émergence, par opposition à l’émergence exclusive, dans une dynamique innovatrice et nouvelle. « Au lieu de s’inscrire dans une conception exclusive et égocentrique, la co-émergence se positionne comme une approche inclusive et intégrative du développement économique ».
Il estime qu’après l’échec et les chocs politiques qui ont occupé l’actualité de ces dernières années notamment la crise du système financier, les printemps arabes, la crise des migrants ou encore le changement climatique, trouver des solutions concrètes est essentielle. « Aujourd’hui plus que jamais, le monde a besoin de critiques, d’idées mais surtout d’actions ».
Selon lui, en plein cœur de l’«Hiver arabe », le Proche Orient et le Moyen Orient n’en finissent pas de compter leurs morts. La résurgence fulgurante de DAESH, la guerre civile au Yémen, la tragédie syrienne et ses ramifications avec les flux migratoires, le repositionnement de l’Iran sur la scène internationale, le retour en force de la Russie dans l’échiquier international, la défragmentation libyenne ainsi que l’éternelle et question centrale crise palestinienne qui sont les différents chocs du moment.
Abaisser les barrières entre Africains
Sur cette même lancée, le président de la République de Rwanda, lauréat du Grand Prix MEDays 2015, pense que dans ce contexte il est nécessaire de faire plus même, notamment avec une coopération plus effective mettant fin à des ségrégations qui se poursuivent notamment au détriment des couches les plus vulnérables. « Il faut donc se rassembler pour y faire face ».
Paul Kagamé d’ajouter : « La qualité du système ou la sagesse n’est le monopole d’aucun pays. Le prix de l’échec ne peut être porté que par les gens du sud comme ce fut le cas jusqu’à aujourd’hui ».
A son avis, les régions du monde sont aujourd’hui étroitement liées les uns aux autres avec l’effondrement des structures de rétention qui ont permis au nord de s’isoler du sud en raison des bouleversements économiques et technologiques qui ont émergé.
Pour lui, les crises récentes concernant la santé publique, l’émigration et l’émergence d’extrémisme n’ont pas eu une réponse mondiale coordonnée. « Ce qui a provoqué une incertitude voir beaucoup de pessimisme quant à l’avenir. Mais on peut choisir d’agir ensemble pour construire un ordre mondial nouveau qui est solide ».
Le président rwandais défend la position que « l’histoire nous a conditionné à nous tourner les uns vers les autres sur la base des hiérarchies implicites. Cet héritage devrait plutôt nous mener à réfléchir à nos intérêts légitimes ».
A l’en croire, « si le sud avait un seul message à faire passer au nord c’est que nous devons travailler ensemble et non le contraire. Trouvons des solutions grâce au dialogue et au consensus. Pour que cela puisse voire le jour, il faut une compréhension sud-sud ».
Par ailleurs, il appelle à la gestion des affaires du monde avec beaucoup plus d’ouverture et d’échanges du moment que le continent détient tous les ingrédients pour réussir. « En Afrique, quand des barrières sont érigées pour stopper des migrants ce n’est pas une réponse. Il faudrait plutôt abaisser ces obstacles entre nous ».
Le secteur privé marocain appelé à investir davantage en Afrique
Fouettant la réflexion sur la nécessité de développer la co-émergence entre pays africains, d’une part, et entre le continent et le reste du monde, d’un autre côté, le Maroc ambitionne de jouer un rôle de leader dans cette dynamique.
M. Brahim Fassi-Fihri d’Amadeus considère que le Maroc, fort de son leadership et de la vision de son excellence le Roi Mohamed VI, a été précurseur dans la co-émergence et a compris très tôt la pertinence de cette approche en tant que modèle d’actions qui met en exergue partenariat stratégique, et liens historiques pour un impact maximal.
Il précise ainsi que la co-émergence, loin de dissoudre les identités des nations s’inscrit dans un cadre de respect mutuel des spécificités et des réalités nationales. « Le Maroc, fort de sa riche histoire avec son continent, réinvente et adapte constamment ses relations avec ses voisins tout en assurant son développement en favorisant l’essor de ses indicateurs sociaux, de ses infrastructures, de son développement économique ».
A l’en croire, le partenariat posé par le Maroc à ses pays frères africains est multidimensionnel, où l’humain est au centre de toutes les initiatives. « Le Royaume apporte à ses partenaires une réelle valeur ajoutée dans son expertise en termes de développement humain. Quelle meilleure définition de co-développement ! »
Sur cette même lancée, le pays de Mohamed VI propose à ses partenaires de reproduire les schémas et les expériences mis en œuvre dans le Royaume ces 15 dernières années en matière de développement humain intégré.
Le président d’Amadeus de rappeler que le partenariat avec l’Afrique a été aussi renforcé par des actions concrètes, de solidarité telles que l’annulation de la dette des Pays les Moins Avancés du continent, l’accueil des étudiants et cadre africains dans les universités et les formations au Maroc, la régularisation des sub-sahariens en situation irrégulière au Maroc, le financement de projet à caractère économique…
Avant d’assurer qu’il n’existe pas de rapport de force et la coopération sud-sud prônée par son pays s’inscrit dans un schéma gagnant-gagnant, crédible de co-émergence.
C’est ainsi qu’il explique que la multiplication des visites royales en Afrique a permis d’institutionnaliser les déplacements récurrents de sa Majesté Mohamed VI sur le continent qui permet de suivre l’impulsion, le développement et le suivi des projets lancés et des accords signés.
« Aujourd’hui, il est indéniable que la marque Maroc sur les populations africaines est de plus en plus en sollicitée par les responsables politiques, les opérateurs économiques du continent ». Cependant, souligne-t-il, « la marge de compréhension du Maroc pour occuper une place de référence sur le continent reste importante. Certaines barrières devront encore être levées pour libérer pleinement le potentiel du partenariat économique Maroc-Afrique ».
Devant cet état de fait, l’institut Amadeus juge que le secteur privé marocain, largement encouragé par les pouvoirs publics et qui participe depuis la tournée royale africaine de 2014 au déplacement royal sur le continent doit s’impliquer davantage dans l’investissement en Afrique pour pérenniser la présence du Maroc et la rendre indépendante des aléas politiques.
Cet institut international estime que l’enjeu principal pour le secteur privé c’est de continuer à démontrer que la stratégie du royaume est construite sur l’investissement donc le co-développement et la co-émergence, plutôt que sur le simple commerce de biens et services. « Il est donc essentiel pour l’entreprise marocaine présente en Afrique d’accompagner la vision royale tout en évitant de poursuivre des actions au coup par coup ne répondant à aucune coordination », souligne M. Brahim Fassi-Fihri.