Le Président de la République du Sénégal invite les pays du Groupe Afrique Caraïbes Pacifique (ACP) de concert avec ceux de l'Union Européenne (UE) à gérer ensemble la lancinante problématique de la migration. C'était à l'ouverture officielle de la 41ème session du Conférence conjointe des ministres ACP-UE, le jeudi 28 avril au Centre International de Conférence Abdou Diouf de Diamniadio (CICAD). Une invite qui sonne comme un appel du pied en vue de la nouvelle démarche dans le cadre de la coopération ACP-UE après la fin de l'Accord de Cotonou en 2020.
La problématique de la migration qui suscite débat et passion et alimente certains courants de repli sur soi occupe une place de choix dans l'interpellation que le Président de la République du Sénégal à adresser aux autorités du partenariat Union européenne et ACP.
Venu présider l'ouverture officielle des travaux de la 41ème session du conseil des ministres ACP – UE, le jeudi 28 avril à Dakar, M. Macky Sall approuve la démarche consistant à lutter fermement contre l'émigration clandestine et ses réseaux criminels.
Devant cet état de fait, il plaide pour une démarche beaucoup plus solidaire dans la gestion de cette question. « Œuvrons ensemble pour stabiliser la situation des pays de transit en crise, qui offrent un espace de prédilection à ces réseaux. Travaillons de concert pour promouvoir des activités génératrices de revenus dans les zones d'émission ».
De la même manière, a-t-il précisé, il invite L'Europe comme le groupe ACP à ne pas chercher à résoudre le problème complexe de la migration par la seule mécanique de la réadmission.
Le chef de l'État sénégalais, par ailleurs, président en exercice de la CEDEAO, considère qu'il faut aussi penser à tout ce qui lie l'UE aux ACP notamment leur histoire commune, les sacrifices consentis ensemble, à leur proximité géographique et au facteur humain qui unit les peuples par le métissage biologique et culturel.
Le président Sall qui ne s'est pas arrêté en si bon chemin invite les deux partie à penser aux possibilités de « régularisation et à la facilitation de l'octroi de visas pour répondre au besoin de mobilité de nos étudiants, enseignants et chercheurs, opérateurs économiques, hommes et femmes de culture ».
Pour lui, « sans ce brassage socio-économique et culturel, c'est l'identité même de notre lien qui en perdrait son âme ». Avant de rappeler que la question migratoire est une donnée fondamentale du 21e siècle. « Dans un monde de liberté, d'ouverture et d'échanges, l'homme est appelé à se mouvoir à l'image des idées, des biens et services dont il est le producteur ».
L'invite du chef de l'État sénégalais ne semble pas tomber dans l'oreille d'un sourd. Le président du Conseil de l'Union Européenne, dans son intervention juge la question migratoire très importante pour l'avenir du partenariat ACP – UE. Avant de juger de la nécessité d'adopter des solutions communes dans ce sens.
Pour lui, les relations entre les deux régions doivent être plus égalitaires et non donateur – bénéficiaire. Une manière de montrer l'importance des défis qui s'imposent au delà de la question de migration. C'est ainsi que le président du Conseil de l'UE rappelle que « l'accord expire en 2020 et il nous faut un dialogue franc et ouvert ». A son avis, « cet accord de Cotonou nous oblige à travailler ensemble mais maintenant il s'agit d'innover. 4O ans après il est temps de faire preuve d'audace ». Avant de préciser qu'il ne s'agira pas de remettre en cause cette coopération mais le réadapter au nouveau contexte mondial.
Ce qui fait dire au président du Conseil des ministres des pays ACP, qu'il semble urgent de sortir des sentiers battus pour un avenir radieux. Une manière, pour M. Gilbert Ondongo, par ailleurs ministre en charge du Plan au Congo Brazzaville, de « réorienter notre partenariat pour relever les défis à venir ».
Face aux nombreux et pressants besoins de développement qui restent encore insatisfaits et aux nouveaux défis sécuritaires qui se font jour, le Président du Sénégal pense qu'«il n'y a pas de développement sans paix, et pas de paix durable sans développement. S'y ajoute, ne l'oublions pas, la question vitale de l'urgence environnementale ». Pour Macky Sall, la signature le 22 avril dernier à New York de l'Accord de Paris sur le climat rappelle de l'opportunité de la prise en compte des ces questions.
Face à cette situation, M. Sall pense qu'il appartient aux paya ACP et à l'UE de prendre en charge tous ces paradigmes avec un même ordre de priorité qui commande une relecture de leur partenariat dans la dynamique géopolitique du 21ème siècle.
Pour lui, c'est l'esprit même de la Déclaration du 7ème Sommet des Chefs d'État et de Gouvernement du Groupe des Etats ACP, de décembre 2012 à Malabo, appelant à une transformation stratégique profonde de cette Organisation.
Plus de solidarité dans le commerce, la sécurité…
Malgré l'importance des acquis engrangés par l'ACP et l'UE, M. Sall pense que les deux parties ont des questions à résoudre pour garder ce qui fait la force, la spécificité et la vitalité de leur partenariat.
C'est ainsi que sur le plan commercial,le chef de l'État Sénégalais considère que « l'érosion des préférences et l'accentuation de la libéralisation des échanges tendent à remettre en cause l'une des bases de notre partenariat fondé sur l'asymétrie des niveaux de développement ».
Sur le plan financier, a-t-il poursuivi, « la baisse généralisée de l'aide publique au développement, la stagnation des investissements directs étrangers et le fardeau de la dette pèsent sur la mise en œuvre de nos politiques de développement ».
Abordant l'aspect sécuritaire, Macky Sall souligne que « la nouvelle dimension du terrorisme mondial nous interpelle solidairement. Plus que jamais, nous sommes liés les uns aux autres. Plus que jamais, il n'y a pas de pays sanctuaire. Et plus que jamais, ce qui frappe l'un de nos membres, qu'il soit du nord ou du sud, nous concerne tous ».
A ce sujet, il salue la vision partagée entre le Groupe des États ACP et l'Union européenne en matière de politique sécuritaire. « Du Sahel au cœur de l'Europe, la menace terroriste est la même. Nous devons donc agir ensemble pour y répondre, en associant nos moyens, notre intelligence et notre expertise ».
Enfin, parmi les défis auxquels l'ACP-UE doit faire face, le président du Sénégal pense qu'il y a la problématique clef des Accords de Partenariat Économique signés entre l'Union européenne et les différentes régions ACP. « Nous avons mis du temps et consacré des efforts considérables pour négocier et adopter ces cadres stratégiques de notre coopération future. Il faut saluer l'esprit de compromis qui a guidé le processus. Mais tout n'est pas fini. Il nous faut maintenant aller de l'avant dans la mise en œuvre diligente des engagements convenus ».
A ce sujet, M. Sall invite tous les pays de la CEDEAO qui n'ont pas encore signé les APE avec l'Union européenne à le faire de façon diligente, pour permettre leur entrée en vigueur.
Pour lui, « Nous avons mis du temps et consacré des efforts considérables pour négocier et adopter ces cadres stratégiques de notre coopération future. Il faut saluer l'esprit de compromis qui a guidé le processus ».