Grâce aux actions combinées de la Banque africaine de développement, des Fonds d'investissement climatiques - dont la Banque est l'une des agences d'exécution - et d'autres partenaires au développement, le Mozambique, classé au troisième rang des pays africains les plus exposés aux aléas climatiques, s'est résolument engagé sur la voie d'un avenir résilient au changement climatique.
Une urgence particulièrement vitale pour le pays : le Mozambique est en effet le seul pays en Afrique à afficher un risque élevé pour chacun des principaux impacts négatifs du réchauffement de la planète : sécheresses, inondations et cyclones côtiers. Des aléas qui coûtaient en moyenne 1,1 % du PIB du pays et qui avaient des répercussions non seulement au plan économique mais également humain : tous les ans, entre 2000 et 2013, trois agriculteurs mozambicains sur quatre perdaient leurs récoltes ou leur bétail.
Au-delà des chiffres, la souffrance humaine
Au cours de l'année 2000, le Mozambique a subi les pires inondations qu'il ait eus à connaître depuis 150 ans, causant des pertes en vies humaines - près de 800 morts -, le déplacement de 540 000 personnes et la perte de 20 % du PIB. Onze ans plus tard, en 2011, Ana Chichava, vice-ministre mozambicaine de la coordination des Affaires environnementales, tirait la sonnette d'alarme : « Nos projections pour l'avenir confirment que si rien n'est fait, un million de personnes environ seront déplacées des zones côtières au cours des trente prochaines années. Au-delà de ces chiffres, la souffrance humaine s'exprimera à une échelle inimaginable. »
En appui aux Fonds d'investissement climatiques, qui offrent des procédures de financement accéléré dans de telles situations d'urgence, la Banque africaine de développement investit, en 2012, 35,2 millions de dollars en soutien aux populations confrontées aux inondations, octroyés sous forme d'un prêt de 23,4 millions de dollars via le Fonds africain de développement (FAD), et de 11,8 millions de dollars versés dans le cadre de son Programme pilote pour la résilience au changement climatique (PPCR par acronyme en anglais). Objectif : soutenir la production agricole dans le sud du pays et améliorer la vie de quelque 8 200 familles d'agriculteurs (soient 40 000 bénéficiaires au total), tout en les aidant à faire face aux phénomènes liés aux dérèglements climatiques.
Filomena Alfredo Xandlala est horticultrice dans le district de Chongoene, au sud du Mozambique, à quelques kilomètres de la côte océane. Sa communauté a terriblement souffert des inondations record enregistrées en 2000, avec une cinquantaine de morts et plus de 10 000 déplacés. Cette année-là, des centaines de familles ont été privées d'aide alimentaire, en raison du difficile accès des secours aux zones fortement touchées par les inondations. Filomena, elle, a perdu l'intégralité de sa récolte de riz et, ne voyant aucun moyen de rebondir, a décidé de renoncer définitivement à l'agriculture. S'ensuivit une période difficile, où elle vécut au jour le jour et grâce au soutien d'un programme d'aide d'urgence mis en place par le gouvernement.
Une dizaine d'années plus tard, cette mère de 18 enfants ‒ et maintes fois grand-mère ‒ apprend par les membres de sa communauté la mise en œuvre du projet PPCR, et qu'il est possible de reprendre une activité dans l'agriculture. Un nouveau virage qui s'effectuera à une condition : être formée aux pratiques agricoles durables.
Filomena Xandlala a repris goût à l'agriculture après une formation
Une agriculture intelligente face au climat
C'est en effet l'un des axes du programme lancé en 2012, dans le cadre du Projet pilote de résilience face au changement climatique Baixo Limpopo, qui met en place des formations sur l'agriculture intelligente permettant aux paysans d'acquérir des méthodes d'adaptation à la nouvelle donne climatique. Le projet prévoit aussi l'introduction de nouvelles semences résistantes au climat, le renforcement des routes rurales, la réfection des infrastructures d'irrigation et de drainage (elles aussi résilientes au climat), ainsi que des structures de traitement et de stockage de légumes.
Alors, en 2013, Filomena et 479 autres agriculteurs de Chongoene s'inscrivent à l'un des parcours de formation, qui leur enseigne comment gérer leurs cultures en toute saison, irriguer en cas d'inondation, maintenir le niveau d'eau, lutter contre les mauvaises herbes et recourir aux engrais... Au bout de six mois, la fière grand-mère a acquis de nouvelles compétences. Et maintenant qu'elle est revenue à l'agriculture, elle est convaincue que son nouveau savoir va lui permettre d'améliorer ses rendements.
« Ce projet nous a beaucoup appris sur l'agriculture et nous sommes impatients d'avoir de meilleures récoltes. Je suis optimiste pour l'avenir », lance-t-elle, le sourire désormais accroché aux lèvres.
Et son optimisme semble faire écho aux résultats du projet sur le terrain : la réfection des infrastructures d'irrigation et de drainage sur un périmètre de 2 000 hectares, l'aménagement de 1 050 hectares de terres, ont permis au Mozambique de produire 754 287 tonnes de légumes en 2016, dont près de la moitié en provenance des régions sud du pays. Une performance notable et un modèle de réussite que la Banque africaine de développement a souhaité poursuivre et étendre à d'autres régions. En août 2018, l'institution panafricaine a ainsi appuyé le gouvernement mozambicain dans la mobilisation de 44 millions de dollars américains en faveur du secteur horticole.
Ce financement est destiné à booster la production et promouvoir le stockage et la transformation de légumes dans le système d'irrigation du Bas-Limpopo. Le gouvernement entend ainsi assurer le fonctionnement du système d'irrigation, la gestion des infrastructures hydrauliques, des terres et des ressources en eau pour la production de légumes tout au long de l'année.
Dans le cadre de ce projet, une unité de transformation de légumes d'une capacité de 20 à 25 tonnes par jour, aujourd'hui en cours de construction, devrait entrer en service en juin 2019. L'usine achètera des légumes aux producteurs, qui seront lavés, sélectionnés, calibrés, emballés et stockés. L'unité est bâtie à Xai Xai, sur une superficie de 2 114 mètres carrés, 400 mètres carrés étant destinés aux bureaux et aux entrepôts. Ce sont 8 000 producteurs qui bénéficieront ainsi de nouveaux débouchés pour la vente de leurs produits.
Finalement, une mobilisation exceptionnelle des partenaires au développement du Mozambique, parmi lesquels la Banque africaine de développement, a progressivement permis d'atténuer les dommages causés régulièrement dans le pays par les effets du changement climatique.
Une canalisation dans le district de Chongoene pour éviter les inondations dans les plantations