Loin du vrombissement des moteurs des grandes agglomérations de Tanzanie, une école d'apprentissage accueille de nombreux jeunes pensionnaires, aux pieds des palmiers de l'archipel de Zanzibar. Ces jeunes bénéficient d'une formation financée par la Banque africaine de développement.
Hadia Baruti Wimbi a quitté ses parents alors qu'elle n'avait que de six ans. « Une dame âgée de ma famille est venue trouver mes parents pour leur demander si elle pouvait m'emmener. Elle a promis à mes parents qu'elle m'inscrirait à l'école. Quand j'ai été sous sa tutelle, elle a inscrit ses enfants, mais pas moi », raconte-t-elle.
Triste de voir ses amis sur les bancs de l'école, Hadia fait confiance à son oncle. « J'avais 13 ans, il est venu me chercher et m'a confié ensuite à une enseignante », poursuit la jeune étudiante, aujourd'hui âgée de 17 ans et inscrite au Centre d'apprentissage alternatif Raha Léo de Zanzibar.
« Hadia avait 15 ans quand elle est venue habiter chez moi, se souvient Fatima Rashid Ali, enseignante à l'école secondaire de Vikokotoni. J'ai passé un an à la convaincre d'aller à l'école. Elle ne voulait pas y aller, elle se sentait trop âgée. Je lui ai dit qu'une école traditionnelle ne lui conviendrait pas. Je connaissais un centre proposant une forme alternative d'apprentissage. »
Comme d'autres filles, Hadia a pris le chemin du Centre Raha Léo pour rattraper son retard et se donner une chance de réussite dans la vie. « Si je n'étais pas venue dans ce centre, je serais restée domestique. Maintenant, je peux lire et écrire. Je suis sûre qu'à la fin de mes études, je pourrai lancer ma propre entreprise. Je suis très heureuse d'être formée ici », se réjouit-elle.
La Tanzanie compte une dizaine de centre d'apprentissage et de formation destinés aux jeunes. La Banque africaine de développement a accordé au pays un financement de 32,7 millions de dollars pour la construction de deux centres de développement d'aptitude ainsi que des centres de formation professionnelle dotés des équipements nécessaires. La Banque a participé également à l'amélioration des manuels pour les professeurs. D'une dizaine de pensionnaires à l'origine, les centres ont grandi et accueillent maintenant plus de 2 000 élèves.
« Au centre Raha Leo d'apprentissage alternatif, par exemple, nous avons ouvert en 2006, avec seulement 32 élèves. Nos élèves avaient tous abandonné l'école. Presque 95% sont séparés de leur famille. Aujourd'hui, on essaie de les rapprocher, de leur montrer notre affection et de leur apprendre des choses », explique Kazija Salmin Ufuzo professeur de swahili et mathématiques au Centre.
Selon ce professeur, le but est d'apprendre aux élèves à lire, à écrire et maîtriser les bases en calcul. Mais il a été constaté ensuite que les élèves avaient besoin d'autres compétences. « Nous avons lancé d'autres programmes comme l'entretien du ménage, la maintenance informatique, l'agriculture, la menuiserie, le montage électrique, la cuisine et la couture », relève-t-il.
« Dans les différents centres, on peut dire que 85% des jeunes formés ont créé une entreprise. Avec un diplôme, ils arrivent à s'en sortir. Le programme a fourni 6 333 micro-crédits à des étudiants pour créer des entreprises, dont 70% ont été initiées par des femmes. Ces micro-crédits sont à taux zéro », se félicite Madina Mjaka Mwinyi, assistante principale au ministère de l'Éducation et des formations professionnelles de Zanzibar.
Subira Haji Khamisi est couturière, diplômée du centre d'apprentissage de Mkokotoni. Elle s'est installée à son compte depuis 2013. « Dès que nous avons obtenu notre diplôme, nous avons formé un groupe de six personnes. Avec le crédit obtenu dans le cadre du projet, nous avons acheté des machines à coudre et ouvert nos salons. Ce centre m'a beaucoup aidé », avoue Subira.