Afrique de l'Ouest: Dominguos Pereira, Président du Parti africain de l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC) – « Nous ne pouvons pas être d´accord avec une dynamique qui cautionne un coup d´État, ou qui reconnait un gouvernement imposé par la force »

M. Dominguos Pereira, Président du Parti africain de l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC)
18 Août 2020
interview

Le dénouement du contentieux post-électoral en Guinée-Bissau n'agrée pas tous les protagonistes. C'est à l'image de M. Dominguos Pereira, Président du Parti africain de l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC) quin'accepte toujours pas la victoire du président « élu », M. Embalo Sissoco. Dans sa dernière missive dénonçant un « hold up électoral » ou « coup d'Etat », le leader du PAIGC exhibe les « positions ambigus de  la CEDEAO » dans cette affaire. Dans cette interview exclusive qu'il a accordée à allafrica.com, M. Pereira dit ne pas être d'accord avec la position d´une partie de la communauté internationale vis-à-vis la dynamique politique en Guinée-Bissau, « qui cautionne un coup d´État, qui reconnait un gouvernement imposé par la force ».

Dans la dernière note du Parti africain de l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC) que vous avez signé, vous relevez des incohérences dans les positions de la CEDEAO sur la crise en Guinée-Bissau. Est-ce que vous pouvez énumérer de manière précise les points sur lesquels vous n'êtes pas d'accord ?

La crise post-électorale en Guinée-Bissau a été marquée par des positionnements ambigus et souvent incohérents de la CEDEAO. Je vous donne quelques exemples :

Premièrement, juste après la proclamation des résultats provisoires des élections présidentielles, certains Chefs d'État de pays membres de la CEDEAO, notamment ceux du Sénégal, du Niger et du Nigéria, ont reçu le candidat Umaro Sissoko Embaló comme Chef d'État élu, alors que les résultats annoncés n'étaient que provisoires. En même temps, ces Chefs d'Etats se sont lancés dans une campagne  pour discréditer la Cour Suprême du pays, sachant qu'il y avait un recours interposé par ma candidature, conformément à la loi Bissau Guinéenne.

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Comme vous le savez, l'effet principal du recours était la suspension des résultats proclamés par la Commission Nationale Électorale (CNE). Néanmoins, les Chefs d'État susvisés ont crée ce qui s'apparentait à un comité d'appui à Umaro Sissoko Embaló et ont soutenu une véritable campagne médiatique et politique au sein de la CEDEAO et au de-là de la CEDEAO, en faveur de leur candidat. Pendant toute cette période, Umaro Sissoko Embaló n'a pas cessé d'insulter et de menacer les juges de la Cour Suprême et ses adversaires politiques, avec l'appui des forces de défense et de sécurité;

Deuxièmement, le 27 Février 2020, alors que le contentieux électoral était toujours en cours, le candidat Umaro Sissoko Embaló s'est autoproclamé Président de la République, avec l´appui de l´armée. Le peuple de la Guinée-Bissau attendait un positionnement ferme de la CEDEAO contre ce coup de force. Ce qu´on a vu, et qui en a choqué plus d´un, c´était l'indifférence totale de la CEDEAO qui a oublié son principe de tolérance zéro aux coups d'États;

Troisièmement, en Mars 2020, à la suite de ce coup de force d´Embaló, la CEDEAO a décidé d´envoyer une mission à Bissau pour évaluer la crise post-électorale en vue d'une solution. Le gouvernement imposé par Embaló, à la suite de son coup, a réagi férocement. Dans un communiqué, il a indiqué que la mission n´était pas la bienvenue. La Commission de la CEDEAO a cédé à la menace et annulé la mission, qui n´a jamais eu lieu.

D´ailleurs, la lettre d´annonce de cette mission aux autorités de la Guinée-Bissau, signé par le Représentant de la Commission de la CEDEAO à Bissau, avait été adressé au Premier Ministre du gouvernement légitime Aristides Gomes. Face à la réaction virulente du gouvernement illégal, qui contestait le fait que cette lettre ne lui avait pas été dirigée, la Commission de la CEDEAO a fait marche arrière, et son Représentant en Guinée-Bissau a dû quitter le pays. La CEDEAO a ainsi fini par reconnaître Embaló et son gouvernement.

Plus grave encore, la CEDEAO s´est investi pour transmettre le faux message que sa mission de médiation de la crise en Guinée-Bissau a été conclu avec succès et que la CNE avait fait le recomptage des voix à quatre reprises, donnant toujours la victoire à Umaro Sissoko Embaló. Ceci est totalement faux, puisque la CNE a tout simplement refusé de faire ce que la Cour Suprême lui demandait, à savoir le recomptage des voix ab initio. Désormais nous connaissons la raison de ce refus: la CNE était incapable de produire un procès- verbal national parce qu'elle ne disposait que des procès-verbaux de deux régions sur les dix qui composent notre pays.

Quatrièmement, au milieu de la crise sanitaire provoquée par la pandémie de la COVID, la Commission de la CEDEAO a décidé de reconnaître Mr. Embaló comme Président de la République à travers un Communiqué publié le 22 Avril 2020, alors que le contentieux électoral suivait toujours son cours à la Cour Suprême de Justice.  Dans le point 7 de ce même Communiqué, la Commission de la CEDEAO demandait à Mr. Embaló de nommer un nouveau Premier Ministre et un nouveau gouvernement jusqu'au 22 Mai 2020, tout en respectant les résultats des élections législatives de Mars 2019.

Ce point 7 était d´une incohérence grossière, puisque la CEDEAO a tout simplement ignoré l'existence d'un gouvernement issu des élections législatives de Mars 2019, remportées par le PAIGC, et d'une majoritaire parlementaire qui avait déjà fait passer son programme au Parlement. Plus grave encore, après ce Communiqué, la Commission de la CEDEAO s'est éclipsée de la scène politique en Guinée-Bissau et n'a fait aucun suivi de sa mise en œuvre.

Sans surprise, Mr Umaro Sissoko Embaló a saisi la partie du Communiqué de la CEDEAO qui lui convenait (sa reconnaissance comme Président de la République) et a décidé d'en tirer profit pour écarter le PAIGC du pouvoir et, de facto, maintenir le gouvernement de Mr. Nabian, qu'il avait nommé en violation des dispositions de la Constitution de la République et des exigences de la CEDEAO, et qu'il avait fait installer par la force, avec la complicité d'une partie de l'armée, en présence des forces de l'ECOMIB  censées protéger les institutions.

Cinquièmement, malgré l'incohérence de cette décision de la CEDEAO, le PAIGC et les partis de la majorité ont décidé de donner une chance à la solution politique proposée, en acceptant de former un nouveau gouvernement avec toutes les forces politiques représentées au Parlement. Cependant, le manque de fermeté de la CEDEAO à faire respecter ses propres décisions a donné l´occasion au Président auto-proclamé de créer, avec l'appui de l´armée et des forces de sécurité sous son contrôle, un environnement de violence politique et d'insécurité pour forger une supposée 'nouvelle majorité' au Parlement et ainsi justifier le maintien de son gouvernement inconstitutionnel et illégal.

Tout le processus qui a conduit à la réalisation de la séance plénière du Parlement du 29 Juin 2020, pour l´approbation du programme du gouvernement Nabian, s'est entaché d'irrégularités, notamment dans la composition du Bureau du Parlement, la démission de Ministres pour reprendre leurs places de députés la veille de la séance plénière, et leur reconduction aux postes ministériels au lendemain de la séance de votation du programme du gouvernement, le processus de substitution des députés, etc.

C´était donc par des coups de force constants, une répression systématique et la violation des lois, orchestrées par les nouvelles autorités, appuyés par l´armée, que cette supposée ´nouvelle majorité` est née. Mr Embaló a même menacé de dissoudre le Parlement si la coalition politique qui le soutien n´arrivait pas à faire passer son programme au Parlement. En d'autres termes, si le PAIGC et ses alliés prouvaient avoir la majorité au Parlement, celui-ci serait dissout.

Reconnaître cette nouvelle majorité, tout en ignorant l´environnement d´ostensible hostilité contre les vainqueurs des élections législatives que nous sommes, est difficile à comprendre. Malgré tout cela, nous avons assistés, incrédules, à l´acte de reconnaissance de la CEDEAO de la nouvelle majorité parlementaire forgée et au gouvernement imposé par Mr Embaló.

Enfin, la Cour Suprême fait toujours l'objet de menaces de la part de Mr. Embaló, sans pouvoir décider en toute liberté sur le contentieux électoral. C'est ce qui explique le changement, du jour au lendemain, de la position de certains Juges qui se sont transfusés, sous la pression, vers le camp du pouvoir auto proclamée.

Voilà ici quelques exemples d´incohérences de la CEDEAO et qui démontrent comment cette institution à laquelle j'ai toujours cru dans mes fonctions passées et au sein de laquelle j'ai toujours milité, a contribué à l´aggravation de la crise politique en Guinée-Bissau.

Donc vous contestez toujours la victoire de Umaro Sissoko Embaló que vous qualifiez de coup de force ?

Les événements du 27 février 2020 étaient en réalité un coup d'État, perpétré à la lumière du jour, avec l'intervention décisive d'une frange de l´armée et le regard complaisant d'une force régionale d'interposition (l'ECOMIB), dont le mandat est pourtant de préserver la paix et de protéger les institutions. Un coup d'État qui visait à mettre fin à un contentieux électoral en analyse devant la Cour Suprême de Justice, mais qui, en fait, visait aussi à dissimuler des objectifs plus obscurs.

Il ne faut pas oublier qu'à cause des menaces de Mr. Embaló le recomptage des voix par la Commission Électorale, qui pourrait se faire en 3 ou 4 jours, a été empêché. Nous avons récolté des témoignages selon lesquels des urnes et des bulletins de voix ont été détruits par des forces de défense et de sécurité, dans la nuit du 31 Décembre 2019, pendant un délestage provoqué à Bissau.

En effet, c'est avec le soutien des militaires que Umaro Sissoko Embaló s´est auto-proclamé Président de la République le 27 Février 2020, dans une cérémonie que lui-même a appelé de 'symbolique'. Ce sont les militaires et les forces de sécurité qui ont pris d'assaut les institutions publiques, chassé les membres du gouvernement légitime de Mr. Aristides Gomes et installé par la force le gouvernement Nabian, nommé en violation des dispositifs Constitutionnels. À l'auto-proclamation du candidat Umaro Sissoko Embaló s´est suivi l´occupation du Palais présidentiel; des menaces à l'encontre des titulaires des organes de souveraineté, notamment le Premier Ministre et Chef du Gouvernement légal et légitime, ainsi que des députés et des juges de la Cour Suprême de Justice, entre autres. L´invasion des installations de la Cour Suprême par des hommes de l´armée et les menaces et persécutions contre un certain nombre de juges considérés hostiles au nouveau régime qui s´est imposé par la force, ont empêché la conclusion des travaux par la Cour Suprême.

L´élément marquant de ce nouveau scénario politique est l´interférence de l´armée dans les affaires politiques, après un effacement de huit ans, à la suite du coup d´État d´Avril 2012. Le comportement de l´armée au cours des dernières années a été dans l´essentiel Republican. Néanmoins, dans un tournant au moins surprenant, des éléments de la hiérarchie militaire, dont certains sont encore sous le coup des sanctions des Nations Unies, ont décidé de se mêler du jeu politique et de soutenir Mr. Embaló.

Du moment que la CEDEAO qui est l'instance communautaire ainsi que le Conseil de Sécurité des Nations-Unies reconnaissent le régime actuel de la Guinée-Bissau, qu'est-ce que vous comptez faire maintenant ?

Comme nous l´avons souligné, la CEDEAO a eu des positionnements ambigus et souvent incohérents et la communauté internationale, suivant dans l´essentiel le principe de la subsidiarité, s´est aligné avec la position de la CEDEAO.

Nous ne pouvons pas être d´accord avec la position d´une partie de la communauté internationale vis-à-vis la dynamique politique en Guinée-Bissau, qui cautionne un coup d´État, qui reconnait un gouvernement imposé par la force, ou bien qui ignore les forfaitures de ce régime lié au narcotrafic et au terrorisme international. C'est pourquoi nous avons interposé un procès auprès de la Cour de Justice de la CEDEAO contre la décision de la Commission de la CEDEAO et nous attendons que la justice soit faite.

Nous jugeons aussi que les faits politiques et sécuritaires en Guinée-Bissau, notamment tels que décrits dans le dernier rapport du SG au Conseil de Sécurité des Nations Unies du 29 Juillet 2020, ne peuvent pas objectivement soutenir la décision politique de reconnaître un régime installé par la force des armes. Il s´agirait là-dessus d´une très grave incohérence qui pourra avoir des conséquences néfastes pour le pays et pour la sous-région.

D'ailleurs, lors de la réunion du Conseil de Sécurité des Nations Unies du 10 Août 2020, certains pays membres, notamment la France, la République Dominicaine et autres, se sont exprimé clairement sur la violation de la Constitution, l'interférence de l'armée dans le jeu politique, et les dérives autoritaires de ce régime putschiste en Guinée-Bissau. Je crois que ce sont des positionnements fondés sur la vérité et nous les remercions pour cela. Ces derniers jours, nous avons vu le Président auto-proclamé se précipiter pour un voyage éclair à la République Dominicaine, et nous nous demandons quel était le véritable objectif de ce voyage.

Il est de notre devoir d'attirer l'attention de la communauté internationale sur les risques associés à la légitimation d´une situation politique et sécuritaire périlleuse et sur ses conséquences. Ce que nous attendons de l´ensemble de la communauté internationale c´est un effort concerté en vue d´assurer le respect de la Constitution et le rétablissement de l´ordre constitutionnel, les seuls gages de paix et de stabilité politique en Guinée-Bissau. Il n'est pas raisonnable de demander ma coopération et celle de mon parti, le PAIGC,  pour la construction d'un État de Droit et Démocratique avec un régime bâti sur la base de l'inconstitutionnalité et de l'illégalité.

L'envoyée de l'ONU pour la Guinée-Bissau, Rosine Sori-Coulibaly, a demandé lundi au Conseil de sécurité de continuer à suivre de près la situation dans ce pays qui reste instable, alors que le Bureau des Nations Unies va fermer à la fin de l'année. Quelle analyse faites-vous de cette sortie ?

Le moindre des choses qu´on puisse dire c´est que ce seraitune sortie compliquée. L´UNIOGBIS a eu un mandat clair des Nations Unies pour œuvrer à la paix et à la stabilité politique en Guinée-Bissau. C´est vrai que sa présence dans le pays dure depuis longtemps et que beaucoup de ressources ont été déployés pour le bon déroulement de sa mission. Mais il n´est pas moins vrai - et nul ne peut le nier - que l´UNIOGBIS sortirait de la Guinée-Bissau sans accomplir sa mission essentielle et laisserait un pays dans une profonde crise politique.

Certes, les acteurs politiques Bissau Guinéens sont les principaux responsables de cette crise, mais la CEDEAO et la communauté internationale censées aider le pays à s´en sortir n´ont pas été à hauteur, ce qui est regrettable.

Selon vous, qu'est-ce qui peut régler de manière définitive la crise politique qui perdure en Guinée-Bissau afin de mettre le pays sur les rails?

Il faut surtout respecter les résultats des élections, respecter la volonté du peuple Bissau Guinéen. Depuis les années 90, la Guinée-Bissau organise régulièrement des élections. Aucune législature n´est arrivée à terme. Elles sont toujours interrompues, soit par des coups d´États, soit par d´autres formes de bouleversement de l´ordre constitutionnelle. Sinon, comment comprendre qu´aujourd´hui, dans un Parlement composé de 102 députés, le gouvernement soit dirigé par le parti qui a à peine 5 députés ! C´est absurde, c´est un véritable hold up électoral. À quoi servent les élections législatives si du coup le vainqueur devient perdant, poussé à l´opposition par la loi de la force ?

Aujourd'hui, nous savons pertinemment qu´il existe des groupes d´intérêts déterminés à attaquer, à affaiblir et à remettre en cause l'existence du PAIGC. Ce qu´il faut savoir c´est que le PAIGC a gagné toutes les élections législatives depuis 2004, mais ces forces ont toujours empêché notre parti de gouverner. Il s´agit de lobbys maléfiques qui sont prêts à tout pour déstabiliser le pays au nom de leurs intérêts particuliers.

En 2014, par exemple, le PAIGC a gagné les élections législatives à la majorité absolue. Malgré sa majorité confortable (57 sièges sur 102 au Parlement), le PAIGC a formé un gouvernement inclusif avec la participation des partis politiques avec et sans sièges au parlement et des éléments indépendants de la société civile dont la compétence est reconnue.

En 2015, un an après les élections, le gouvernement a été limogé par le président de la République de l'époque, José Mário Vaz, en utilisant des arguments fallacieux et inconstitutionnels. Il s'en est suivi une période d'instabilité politique, la nomination et la révocation des gouvernements successifs au mépris de la Constitution et, par la suite, la médiation de la CEDEAO pour tenter de mettre fin à la crise politique sans fin.

La médiation de la CEDEAO avait abouti à l´adoption d´une feuille de route à Conakry, mais cette feuille de route n´a jamais été mise en œuvre parce que ces groupes d´intérêts qui ont séquestré le pouvoir, avec l'appui d'une partie de l´armée, n´avaient qu´un seul objectif: détruire le PAIGC.

Le PAIGC a gagné les dernières élections législatives de 2019 avec 47 députés et formé une majorité et un gouvernement. Le coup du 27 Février 2020 qui l´a écarté du pouvoir s´inscrit dans la même logique du hold up électoral et de déstabilisation du pays.

Il faut donc œuvrer à la mise en œuvre de la feuille de route de Conakry, à savoir, le rétablissement de l´ordre constitutionnel (c´est à dire le respect des résultats des élections, ce qui signifie la formation d´un gouvernement par le vainqueur des élections), ce qui permettra d´avancer avec des réformes importantes, notamment la réforme constitutionnelle et la réforme des forces de défense et sécurité.

Pour donner une chance à la solution politique proposée par la CEDEAO, j'ai même admis de me désister des procès en cours à la Cour Suprême de Justice de mon pays et à la Cour de Justice de la CEDEAO. Car j'ai l'intime conviction que les intérêts de la Nation priment sur mon intérêt personnel, et cela a toujours été notre ligne de conduite au sein du PAIGC. Malheureusement, j'ai trouvé très peu d'échos dans mon combat pour la recherche d'une solution politique juste, à même d'amener le calme et la stabilité en Guinée Bissau.

Quel est votre dernier message à l'endroit du peuple bissau-guinéen et de la communauté internationale ?

Il est important que la communauté internationale évalue de façon cohérente et objective la situation politique en Guinée-Bissau, ainsi que les risques inhérents à ses prises de position.

Aujourd'hui, nous sommes devant un pouvoir conquis par la force, et exercé par la force et la violence. Des citoyens sont agressés; des députés sont kidnappés et agressés; des anciens membres du gouvernement du PAIGC sont persécutés et leur vie et intégrité physiques sont en danger; des procès judiciaires sont en train d´être forgés contre des anciens membres du gouvernement; la liberté d´expression est bafouée; des juges de la Cour Suprême sont publiquement insultés et menacés par Sissoko Embaló, qui est clairement en train de mettre la pression sur la Cour Suprême pour valider son coup de force. Le Premier Ministre légitime Aristides Gomes se trouve sous protection dans les installations des Nations Unies, puisque les nouvelles autorités veulent coûte que coûte l´arrêter.

Nous sommes devant un pouvoir fondé sur la répression et l´usage de la force et qui n´offre aucune perspective pour la consolidation de la paix et de la stabilité politique. On craint que dans ce climat, il sera bientôt impossible d´exercer le droit à l´opposition, surtout de la part du PAIGC qui est clairement devenu la cible à abattre.

En même temps, nous assistons à la reprise en force du trafic de drogue en Guinée-Bissau, d'ailleurs dénoncée par certains pays et organisations internationales, dont la cause est l'association de certains éléments de ce régime putschiste à cette dérive criminelle. Des personnes soupçonnés d´appartenir au monde du trafic, qui avaient quitté la Guinée-Bissau lorsque le gouvernement de Mr Aristides Gomes menait un travail sérieux contre le narcotrafic, se promènent à nouveau à Bissau, et certains mêmes ont été condamnés par les tribunaux, mais jouissent d´une liberté totale, protégés par les nouvelles autorités.

La reconnaissance d'un Président autoproclamé et d'un gouvernement installé par la force par ce même Président autoproclamé est contraire aux principes cardinaux qui régissent un État de droit démocratique et risque de replonger la Guinée-Bissau dans une longue instabilité politique, à l'instar des années 2015-2019 sous l'ex-Président de la République José Mário Vaz, avec des conséquences imprévisibles.

Le peuple de la Guinée-Bissau comprend notre combat, et continue de nous soutenir. Il sait que l´avenir du pays est aujourd´hui sérieusement remis en cause. Il comprend que le PAIGC, sous mon leadership, a fait recours à des moyens démocratiques, et rien qu´aux moyens démocratiques, consacrés dans la Constitution et les lois pour faire valoir leurs droits. Le seul objectif de ce combat est de faire prévaloir la justice électorale et de rétablir la légalité constitutionnelle.

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