Plusieurs experts internationaux ont appelé, jeudi 12 novembre lors du sommet « Finance en Commun », à une réponse concertée et une coopération élargie entre les banques publiques de développement et les acteurs de terrain pour apporter des réponses concrètes aux pays fragiles, dont la situation pâtit de la crise sanitaire mondiale.
A l'initiative de la Banque africaine de développement, une session virtuelle était organisée sur le thème « Sécurité humaine dans les contextes fragiles : accroître les investissements humanitaires et de résilience ». Elle a réuni un panel de haut niveau comprenant Khaled Sherif, vice-président de la Banque, chargé du développement régional, de l'intégration et de la prestation de services, Katherine Garrett-Cox, PDG de GIB Asset Management UK, une société britannique spécialisée dans la gestion d'actifs, Peter Maurer, président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et Shinichi Kitaoka, président de l'Agence japonaise de coopération internationale (JICA).
Premier intervenant à prendre la parole, Peter Maurer, président du CICR, a souligné que la pandémie de Covid-19 avait aggravé sérieusement la situation des pays fragiles, déjà affectés par l'insécurité alimentaire, le changement climatique ou encore les conflits armés. Près de 80% des cas de fragilité dans le monde proviennent d'une vingtaine de situations en Afrique, au Proche et au Moyen-Orient, a-t-il précisé.
« Qu'il s'agisse d'accès aux soins, à l'eau, qu'il s'agisse des conditions de vie ou d'emploi, il nous faut analyser chaque contexte spécifique. Nous devons bâtir des programmes qui répondent à chaque besoin », a-t-il exhorté face à l'urgence de certaines situations, qui appellent à une plus grande coopération entre les acteurs de terrain et les banques publiques de développement.
Le président de l'Agence japonaise de coopération internationale (JICA), Shinichi Kitaoko, a rappelé le soutien actuel du Japon aux pays africains touchés par la crise sanitaire mondiale, en termes d'infrastructures de santé ou de mise à disposition de médicaments. « Le Japon a financé la construction d'une centaine d'hôpitaux à travers le continent », a précisé Shinichi Kitaoka, ajoutant que son pays s'était engagé à atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 et qu'il appuierait les pays africains sur la voie du développement durable et de la croissance verte et inclusive.
Katherine Garrett-Cox a souligné que le marché de l'investissement durable a progressé de 34% entre 2016 et 2018 pour atteindre 30 000 milliards de dollars, répondant à une demande d'investissement en finance durable de plus en plus forte ces dix dernières années. « Premièrement, il y a une opinion de plus en plus partagée, selon laquelle les bonnes pratiques de développement durable peuvent générer de bons retours sur investissement, a-t-elle affirmé. Deuxièmement, il y a une prise de conscience grandissante de l'importance de mobiliser des capitaux pour le développement durable. »
Dans un contexte de crise sanitaire, qui pourrait détruire 30 millions d'emplois et porter à 450 millions le nombre de personnes vivant dans une extrême pauvreté en Afrique, Khaled Sherif s'est voulu optimiste sur la volonté de tous les acteurs du développement de travailler ensemble pour renforcer et stabiliser la situation des zones à risque et des pays fragiles : « Trop longtemps, a-t-il d'abord concédé, nous avons laissé la question du développement des populations vulnérables aux associations humanitaires, ONG, fondations et acteurs de la société civile. Nous devons créer désormais des alliances nouvelles et fortes afin d'améliorer l'impact des actions humanitaires et de développement au profit des communautés rurales et des populations vulnérables. »
Rappelant la stratégie de la Banque africaine de développement, Khaled Sherif a précisé : « Nous avons la conviction que seule une Afrique intégrée est une Afrique résiliente et créatrice de prospérité. »
La Banque a fortement renforcé son soutien aux États fragiles dans le cadre de la mise en œuvre de ses priorités opérationnelles les « High 5 ». Entre 2014 et 2019, ses engagements en faveur de ces pays ont connu une hausse de 51% par rapport à 2008-2013. Quelque 345 opérations d'un montant de 6,45 milliards de dollars américains ont été approuvées pour ces pays, où le principal défi de développement reste la fragilité.
« Finance en Commun », est un événement organisé en mode virtuel du 11 au 13 novembre 2020 dans le cadre de la troisième édition du Forum de Paris pour la paix. Ce premier sommet mondial, qui réunit 450 banques publiques de développement a permis de signer une Déclaration conjointe à travers laquelle, une nouvelle coalition d'institutions financières consacrées au développement se sont engagées à mutualiser leurs efforts pour faire face aux nouveaux défis mondiaux liés à la crise du Covid-19 et réorienter leurs financements vers une croissance inclusive qui prend en compte les engagements de l'Accord de Paris et les Objectifs de développement durable (ODD).