La capacité de dépistage quotidienne des pays africains est passée de 13 200 au début de l'épidémie à 105 000
La crise de la Covid-19 a révélé la fragilité structurelle des équipements sanitaires en Afrique. En mars 2020, l'Afrique était au pied du mur, désarmée face à l'ampleur des effets d'un virus apparu en Asie pour gagner rapidement l'ensemble de la planète. Seuls deux pays africains étaient alors capables de dépister le nouveau coronavirus : le Sénégal, avec son Institut Pasteur, et l'Afrique du Sud, le pays le plus industrialisé du continent.
Mais l'Afrique s'est relevée rapidement. Les pays ont commencé à se doter de laboratoires de dépistage. Soutenus solidement par la Banque africaine de développement, ils ont réalisé une prouesse logistique et scientifique. Dès l'apparition de la pandémie, la Banque a dégagé deux millions de dollars d'aide d'urgence pour aider l'OMS Afrique à renforcer ses capacités d'appui aux pays africains. Depuis l'été 2020, la Banque aide les pays à faire face à l'urgence sanitaire et aux conséquences socio-économiques de la pandémie grâce notamment à sa Facilité de réponse rapide à la Covid-19 dotée de 10 milliards de dollars.
Dès l'été 2020, les pays ont réhabilité leurs laboratoires alors inadaptés et ceux qui n'en disposaient pas ont pu s'en doter. À la fin de l'automne, quasiment tous les pays africains étaient capables de tester leurs populations. Certains d'entre eux disposaient même de laboratoires assez performants leur permettant de s'attaquer au séquençage génétique du virus. Au bout de quelques mois, des pays africains, qui avaient très peu de dispositifs de diagnostic, se sont dotés de deux, dix laboratoires voire plus, selon leurs caractéristiques géographique et démographiques. L'Afrique du Sud, l'Égypte, le Maroc, l'Algérie se sont très vite démarqués sur le nombre de tests journaliers grâce à la multiplication des laboratoires rendus fonctionnels.
Détecter le virus, une course contre la montre gagnée haut la main
La détection précoce a joué un rôle déterminant pour limiter la propagation du virus et permis de tracer, isoler et traiter les cas confirmés.
Lorsque le premier cas de contamination a été annoncé le 11 mars 2020, la Côte d'Ivoire ne disposait d'aucun laboratoire de détection du coronavirus ; elle en a aujourd'hui une dizaine.
Au Burkina Faso, où les échantillons étaient convoyés jusqu'à Dakar, aux premières heures de la maladie, le nombre de laboratoires de dépistage est maintenant passé de 7 à 18 grâce au soutien de partenaires au développement dont la Banque africaine de développement. Les résultats des tests s'obtiennent désormais en 48 heures.
Le Centre nigérian de contrôle des épidémies (NCDC) a mis en place des centres de dépistage à travers le pays le plus peuplé d'Afrique pour détecter les différents cas.
Au Kenya, pour parer à l'urgence, des machines initialement destinées à tester le VIH, la tuberculose ou la grippe aviaire ont été réorientées pour dépister le Covid-19, avant l'arrivée de nouvelles machines acquises par le gouvernement, grâce au soutien de partenaires dont la Banque.
Pour Atsuko Toda, vice-présidente, par intérim, chargée de l'Agriculture et du Développement humain à la Banque africaine de développement, « la multiplication des tests de dépistage, grâce aux laboratoires performants installés dans les pays africains, a favorisé la réouverture des économies. »
Selon des statistiques compilées en mars 2021 par le Complexe de développement régional, intégration et prestation de services (RDVP) de la Banque, le nombre de laboratoires d'analyse au Malawi a été multiplié par dix passant de 14 à 164 et par 2,5 en Éthiopie pour atteindre 66 ; en Centrafrique, cinq nouveaux laboratoires de dépistage ont été créés.
Les résultats ont été énormes sur le nombre de populations dépistées. L'Afrique du Sud a multiplié par sept le nombre de dépistages journaliers de 5000 à 35000, l'Éthiopie ( 3000 à 12 400), le Burkina (268 à 1 160).
Nouridine Kane Dia, représentant de la Banque africaine de développement au Niger, saluait dernièrement, le soutien « efficace » de la Banque à ce pays fragile du Sahel car, « les appuis de la Banque ont contribué à renforcer les capacités du Niger à répondre plus efficacement aux futures pandémies et aux chocs de santé publique ».
« L'enjeu pour les pays africains a été de contrôler les contaminations mais aussi d'assouplir les mesures restrictives pour permettre la réouverture des économies car la prolongation à long terme des mesures de confinement risquait de créer un crash économique et social », souligne Atsuko Toda.
Au total, selon le RDVP, l'appui de la Banque et d'autres partenaires a permis de porter la capacité de dépistage quotidien des pays africains de 13 200 au début de l'épidémie à 105 000 ; 100 000 agents de santé ont été formés et 314 unités de soins intensifs sont maintenant disponibles pour les patients atteints de Covid-19, contre 50 en moyenne au début de la maladie.
« C'est une course contre la montre gagnée haut la main. Il nous reste maintenant à gagner la guerre contre le coronavirus, affirme Atsuko Toda. Nous sommes partis quasiment de zéro. Quand on voit les progrès réalisés en quelques mois, on se rend compte qu'un long chemin a été parcouru. »
Romaric Ollo Hien, Département de la communication et des relations extérieures, Banque africaine de développement, email : o.hien@afdb.org