Afrique: Relations entre Paris et Bamako - Entre duplicité et surenchère

Le général Baratz, commandant de la force Barkhane (COMANFOR), le 17 août 2022.
analyse

Encore une nouvelle escalade entre Bamako et Paris ! En effet, alors que l'on croyait que la tension retomberait entre les deux capitales et ce, après le retrait définitif de Barkhane du Mali, les autorités de Bamako ont remis le couvert en passant de nouveau à l'offensive.

Elles accusent ouvertement la France de violer leur espace aérien et de soutenir les groupes armés terroristes, en l'occurrence, la branche sahélienne du Groupe Etat islamique.

Elles le disent dans une lettre ouverte adressée au Conseil de sécurité des Nations unies, dans laquelle elles énumèrent une série de cas présentés comme des " violations répétitives et fréquentes de l'espace malien par les forces françaises : drones, hélicoptères ou avions de chasse ".

Au total, une cinquantaine de cas auraient été enregistrés, selon Bamako qui affirme que ces survols de l'espace malien " sans autorisation ", ont " servi à la France pour collecter des renseignements au profit des groupes terroristes et pour larguer des armes et des munitions ". Dont acte !

Ces accusations de soutien aux groupes armés terroristes, portées contre la France, n'ont rien de surprenant. Elles remontent à bien longtemps même si, au départ véhiculées par l'opinion malienne, elles ont, cette fois-ci, la particularité d'émaner des autorités de Bamako.

Ces dernières, on se rappelle, avaient déjà annoncé la couleur au lendemain de l'attaque de Tessit qui avait coûté la vie à 42 soldats, quand elles affirmaient que les assaillants avaient bénéficié" d'un appui majeur et d'une expertise extérieure ".

Vrai ou faux ? Difficile de répondre à cette question. Car, la France, il faut le reconnaitre, a longtemps joué à un jeu si trouble au sein de ses anciennes colonies, qu'il est difficile de l'absoudre à bons comptes.

%

La meilleure manière de fâcher davantage Paris, c'est de prouver que la coopération Russie/Mali peut réussir là où Barkhane a " échoué "

N'est-ce pas elle qui, pendant longtemps, faisait et défaisait les présidents dans son pré-carré, suivant ses intérêts ? N'est-ce pas la même France qui, au début de la crise malienne, s'était interposée entre l'armée malienne et des groupes rebelles, provoquant le chaos qui a, par la suite, favorisé l'arrivée massive des djihadistes dans le septentrion malien ?

On peut multiplier les exemples sur le continent où la France, dans le meilleur des cas, joue les équilibristes là où l'on s'attend à ce qu'elle prenne clairement position, et dans le pire des cas, souffle sur les braises.

Toutefois, s'il est vrai que la France a toujours fait dans la duplicité dans ses relations avec ses anciennes colonies, cela ne doit pas constituer une raison pour les autorités maliennes de la transition de se défausser de leurs responsabilités. Car, on a parfois l'impression qu'elles exploitent tellement le sentiment anti-français qu'elles en ont fait un fonds de commerce, quand elles ne font pas parfois dans la surenchère.

A moins qu'Assimi Goïta et ses frères d'armes qui sont arrivés au pouvoir en alléguant leur volonté de lutter contre l'insécurité, n'aient trouvé là une belle occasion pour masquer leur incapacité à combattre le terrorisme qui, aujourd'hui plus qu'hier, continue d'endeuiller injustement des familles au Mali.

En tout cas, Barkhane ayant plié bagage, il revient aux autorités maliennes de s'assumer pleinement. L'heure ne doit plus être à l'escalade ou à des escarmouches mais plutôt à un engagement ferme au front afin de rassurer les Maliens qui ne savent plus à quel groupe armé se fier ; tant ils souffrent le martyre.

Du reste, la meilleure manière, pour les autorités maliennes de la transition, de fâcher davantage Paris, c'est de prouver que la coopération Russie/Mali peut réussir en si peu de temps, là où Barkhane a " échoué " en près d'une décennie.

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.