Madagascar: Assemblée nationale - La motion de censure enclenchée

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La motion de censure contre le gouvernement a été remise officiellement à la présidente de l'Assemblée nationale hier, à 11 heures. Une démarche publiée sur la page Facebook de l'institution en fin d'après-midi avant d'en être retirée.

L'Assemblée nationale passe à l'acte. La motion de censure contre le gouvernement est officiellement entre les mains de Christine Razanamahasoa, présidente de la Chambre basse. L'acte a été reçu à son bureau à 11 heures, hier.

La machine parlementaire pour évincer l'équipe de Christian Ntsay, Premier ministre, comme prévu par la Consti-tution, est donc enclenchée. Cent cinq députés ont signé la motion dont les motifs sont déclinés sur trois pages. "Le non-respect de la Constitution", par "l'ingérence dans les affaires intérieures de l'Assemblée nationale", est inscrit en tête de liste. Le gouvernement insisterait pour "contrôler la gestion financière de l'Assemblée nationale".

L'autre grand point affirme que l'équipe gouvernementale n'a pas concrétisé le programme de mise en œuvre de la Politique générale de l'État, présenté devant l'institution de Tsimba-zaza, le 19 août 2019 et le 15 juin 2020. La proposition de motion de censure fait notamment référence à la loi de règlement 2019 qui indique que cette année-là, seulement 45% des objectifs fixés ont été atteints. Entre-temps, cependant, l'équipe gouvernementale a connu quelques remaniements.

Les points que les cent cinq élus reprochent au gouvernement aujourd'hui, sont cependant les sujets sur lesquels ils les congratulaient durant les multiples séances et de questions - réponses depuis le début de leur législature. Une certaine incohérence intrigante. À s'en tenir au scénario des deux séances nocturnes à huis clos de Tsimbazaza, lundi et mardi, la fronde actuelle a un lien avec des questions d'allocation d'indemnités et de crédits carburants des députés.

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La convocation de Christian Ntsay, Premier ministre, et de Rindra Hasimbelo Rabarinirina-rison, ministre de l'Economie et des finances, à la Chambre basse mardi soir, notamment, n'a pas permis de désamorcer la crise. La menace d'une motion de censure est ainsi officiellement traduite en acte. Les députés du groupe parlementaire "Isika rehetra miaraka amin'i Andry Rajoelina" (IRD) sont les plus nombreux à avoir signé la proposition de motion, avec des centristes et les députés d'opposition.

Rétropédalage?

Hier à l'Assemblée nationale, les conciliabules entre députés ont inondé l'institution. Dans la salle des séances, dans les couloirs, dans le parking et à la cafétéria, les discussions allaient bon train. Les extrêmistes comme le député Naivo Raholdina et la députée Hanitra Razafimanantsoa retrouvaient soudainement une complicité. Des scènes qui rappellent les prémices du mouvement des soixante-treize députés, qui a fait vaciller l'administration Rajaonarimampianina en 2018.

Juste après le dépôt de la proposition de motion de censure, une séance plénière s'est tenue à Tsimbazaza. Les députés ont modifié l'ordre du jour de l'institution. Le face-à-face avec le gouvernement prévu aujourd'hui et demain est reporté pour les 14 et 15 décembre. De prime abord, les élus se donnent le temps nécessaire pour mener à terme leur fronde et, éventuellement, permettre la mise en place d'un nouveau gouvernement. Ce qui pourrait indiquer que le coup a été préparé à l'avance.

À s'en tenir aux mots du président de la République rapportés par le communiqué du conseil des ministres d'hier, ce dernier désavoue "la défiance" des élus de Tsimbazaza. Les députés élus de la province de Toliara ont, par ailleurs, fait une déclaration commune, hier soir, pour affirmer qu'ils s'opposent à la motion de censure. Parmi ceux qui se sont présentés à la presse se trouvent

pourtant des signataires de la proposition remise à Christine Razanamahasoa, hier.

Une grande réunion s'est tenue au siège de la coalition IRD, à Ivandry hier soir. Une ultime tentative des décideurs du camp Orange pour désamorcer la crise institutionnelle d'après les informations. Une démarche qui aurait fait mouche. Les arguments mis sur la table ne sont pas indiqués cependant. Au regard des textes, cet éventuel rétropédalage de principe pourrait être difficile dans les actes, du moins avant le vote. Le dépôt officiel de la motion de censure semble en effet être un point de non retour.

Le vote de la motion ne peut avoir lieu que "quarante-huit heures" après son dépôt selon la Constitution. Le règlement intérieur de l'Assemblée nationale laisse visiblement une porte ouverte à un revirement des députés avant "la mise en discussion", de la motion. "Aucun retrait d'une motion de censure n'est possible après sa mise en discussion", dispose en effet l'alinéa 3 de l'article 196 du texte. Il ajoute que "lorsque la discussion est engagée, elle doit être poursuivie jusqu'au vote".

La motion de censure n'est adoptée que si elle est votée par les deux tiers des membres de la Chambre basse. Les signataires de la proposition dépassent ce quota. Reste à voir s'il y aura désistement ou s'ils mèneront à terme leur intention.

Haro sur la déstabilisation

Selon le communiqué du conseil des ministres, la réunion de l'Exécutif d'hier, a démarré par une réaction de Andry Rajoelina, président de la République sur le soubresaut politique à l'Assemblée nationale. Le chef de l'État, selon ce rapport, soutient que le pays "ne mérite plus de vivre une situation d'instabilité". Les querelles politiques qui nuisent à l'apaisement ne doivent pas aggraver les conséquences socio-économiques des différentes crises globales, ajoute le locataire d'Iavoloha, selon le communiqué publié par l'institution présidentielle. Dans un appel à l'apaisement, le conseil des ministres demande une franche collaboration entre les acteurs politiques, les élus et les responsables désignés pour "sauver Madagascar et non pas le détruire".

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