Kenya: Premier bilan et premières critiques sur le "fonds des débrouillards" de William Ruto

Kenya Shilling.

Au Kenya, the Hustler Fund (le fonds des débrouillards, en français) était une mesure phares du programme de William Ruto durant sa campagne pour la présidentielle. Depuis son lancement début novembre, il a attiré plus de 17 millions de kenyans, pour un total de 21 milliards de shillings empruntés (soit environ 160 000 euros).

L'idée est de créer un fonds qui servira à accorder des micro-prêts aux Kényans les plus pauvres, et ainsi relancer l'économie kényane " par le bas ". En quelques secondes sur un téléphone suffisent pour emprunter. Une simplicité qu'apprécie Isaac Mbugua, chauffeur et utilisateur depuis le premier jour : " Je devais me déplacer, mais je n'avais pas assez d'argent pour payer le transport, donc j'ai demandé un emprunt. En cinq minutes, j'ai reçu l'argent. "

Taux d'intérêt à 8%

La contrepartie est un taux d'intérêt à 8% et l'obligation de rembourser sous 15 jours. Le fonds est accessible à tous contrairement aux crédits classiques, mais les sommes empruntables sont pour l'instant très limitées. L'équivalent de 4 à 8 euros en moyenne. C'est trop peu, estime Felix Leni, est agent de sécurité : " Moi, j'ai décidé de ne pas rembourser. On avait placé de l'espoir dans ce fonds. On pensait qu'on pourrait emprunter 50 ou 100 euros, quelque chose qui te permette de lancer une petite affaire, et de générer de quoi rembourser. Mais avec 4 euros et mon salaire à la fin du mois, comment je fais? "

L'autre interrogation pour de nombreux Kényans est à quoi vont servir les intérêts prélevés par l'État sur chaque transaction. " Il faut qu'ils soient plus clairs, selon Kevin Glen Oniango, un utilisateur de 32 ans. Ils disent que cet argent ce sont nos économies, mais quand je vais sur mon compte dans le téléphone, ça n'apparaît pas? "

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Au cours d'une interview, William Ruto, le chef de l'État, a promis mercredi 4 janvier que l'argent de ces commissions sera automatiquement placé sur un compte, puis investi dans un dans des obligations d'État et qu'il sera bientôt possible pour chacun de consulter sur une application le montant de ses économies et de ses bénéfices.

Des microcrédits plus adaptés aux entreprises

Le président kényan a aussi annoncé que serait lancée, le deuxième volet de ce fonds, destiné, cette fois aux petites entreprises. Selon Ken Gichinga, économiste kényan au sein de l'institut Mentoria, c'est à eux que devrait davantage bénéficier ce fonds : " Ceux qui vont en bénéficier, ce sont les businessmen qui manient l'argent au quotidien. Les petites et moyennes entreprises, en activité, vont pouvoir absorber ces fonds, soit en achetant plus de stocks, soit en recrutant du personnel. Ils vont donc pouvoir faire circuler l'argent en interne. "

Pour l'économiste, les échéances sont trop courtes pour que ces prêts puissent profiter à des particuliers voulant monter des affaires : " La grande majorité des gens qui ne sont pas dans les affaires, ceux qui n'ont que leur seul salaire comme revenu et qui tombe à la fin du mois, ils sont susceptibles d'emprunter, mais n'auront pas la possibilité d'investir en lançant leur propre affaire. On ne peut pas lancer une affaire qui rapporte de quoi rembourser en 15 jours ! Donc à la fin du mois, ils vont être payés, ils vont rembourser et emprunter encore, dans un cycle qui n'est pas très porteur. Donc, il va y avoir des gagnants et des perdants. "

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