Baptisé « Taifa-1 » (Nation-1, en swahili), le premier satellite d'observation kényan doit décoller ce mardi 11 avril depuis la base américaine de Vandenberg, en Californie, à bord d'une fusée Falcon 9 de l'entreprise américaine Space X. Entretien avec le colonel Brig Hillary Kipkosgei, directeur par intérim de la Kenya Space Agency (KSA).
Un petit objet - 10 cm sur 10 de largeur et 30 cm de long -, mais un grand moment pour l'agence spatiale kényane. Le premier satellite d'observation kényan doit décoller ce mardi matin à 6h48 TU pour se déployer une heure plus tard. En 2018, le pays avait déjà lancé un premier nanosatellite, mais uniquement à titre expérimental. Celui qui doit rejoindre l'espace sera bien le premier satellite d'observation opérationnel, autrement dit le premier à pouvoir recueillir et transmettre, en temps réel, des données satellitaires.
Taifa-1 a été conçu et développé à Nairobi par une équipe d'ingénieurs kényans pour un coût estimé à 50 millions de shillings (environ 350 000 euros), en collaboration avec l'entreprise bulgare Endura Sat qui s'est occupée de la fabrication et du test de certaines pièces du satellite. Le Kenya espère commencer à recevoir des données à partir du mois d'août. D'ici là, il lui faut achever la fabrication du récepteur au sol et laisser le temps à Taifa-1 de se stabiliser et aux équipes de le configurer. Il sera le 46e satellite africain à être placé en orbite, 25 ans après le premier, un satellite égyptien lancé en 1998. Selon les autorités kényanes, les données collectées doivent permettre d'améliorer la gestion des ressources naturelles du pays et d'aider le secteur de l'agriculture.
RFI : À quoi vont pouvoir servir les données collectées et transmises par Taifa-1 ?
Brig Hillary Kipkosgey : Cela va nous permettre de surveiller par exemple notre couverture forestière. Perdons-nous des forêts ou bien est-ce que notre politique de reforestation permet d'augmenter notre surface forestière ? En ce qui concerne les ressources en eau, cela peut permettre de surveiller si nous perdons de l'eau ou bien si les volumes augmentent, voire de détecter des sources de pollution.
Est-ce que cela va vous aider également à lutter contre la sécheresse ?
La sécheresse ? Dans une certaine mesure. Mais pour surveiller la sécheresse, un satellite qui fournit des images ne suffit pas. Il faut également des capteurs sur le terrain et un satellite plus grand qui, à partir de ces capteurs, arrive à évaluer s'il y a une baisse du taux d'humidité des sols et donc un risque de sécheresse.
Notre satellite, parce qu'il est petit, n'a pas cette capacité. Mais pour nous, c'est une étape, un tremplin. Nous sommes en train d'apprendre à construire des satellites. Nous avons commencé, en 2018, avec un satellite trois fois plus petit que celui-ci et, depuis, nous avons fait des progrès.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Déjà, nous voulons montrer ce dont nous sommes capables. Nous avons atteint une certaine maturité. Ensuite, nous voulons, grâce à ce satellite, continuer à apprendre. C'est notre premier satellite opérationnel, il y a donc des choses à apprendre sur la gestion d'une opération spatiale, sur la gestion d'un récepteur au sol. En matière d'acquisition et de traitement des données, nous avons aussi des choses à apprendre.
Et par la suite, nous souhaitons utiliser ces connaissances pour lancer d'autres satellites... Trois, quatre, cinq et peut-être même six satellites qui travailleront ensemble et formeront une constellation. L'objectif est d'avoir des sources d'informations variées qui se complètent et que l'on peut comparer.
Enfin, notre programme spatial est peu connu. Les gens ne connaissent pas nos capacités et les opportunités que cela représente. Nous voulons donc profiter de cette opportunité pour sensibiliser les gens et pour obtenir leur soutien pour pouvoir investir dans d'autres programmes à l'avenir.