Tchad: Incompréhension dans le sud-ouest du pays où les violences se poursuivent

attaques dans le sud-ouest du Tchad

Cela fait plus d'un mois que des villages de la province du Logone-Oriental sont visés par des hommes armés dont l'origine et les motivations font débat. Le canton d'Andoum a été à nouveau visé vendredi 19 mai.

Trois villages ont été brûlés par ce qu'un notable décrit comme une véritable horde surgie à cheval. Les églises ont été pillées et sept personnes ont été tuées, dont un chef de village. Il y a aussi de nombreux disparus qui ont fui au moment de l'attaque.

Ce que les habitants d'Andoum ne comprennent pas, c'est que cette attaque s'est produite quelques instants après la visite des autorités locales venues apporter leurs condoléances, suite à une première attaque qui a fait 16 morts et une dizaine de blessés, mercredi 17 mai, à l'aube. Les militaires avaient poursuivi les assaillants, en tuant six et en capturant huit, mais à peine le cortège officiel parti, ce vendredi 19 mai, Andoum a été à nouveau visé.

La semaine précédente, c'est la région de Goré, plus au sud-est, qui avait vu plusieurs localités attaquées. Une trentaine de civils au total avaient péri.

Face à cette situation, le gouvernement a communiqué sur des groupes de « bandits » menant des « incursions répétitives et planifiées » à partir du territoire voisin de la République centrafricaine « dans le but de créer un climat insurrectionnel dans la zone ». Mercredi 17 mai, le ministre de la Défense, Daoud Yaya Brahim, s'était dit satisfait de l'opération conjointe menée pendant plusieurs jours en Centrafrique et avait affirmé sur notre antenne que les populations locales allaient pouvoir « souffler ».

C'est pourtant l'inquiétude qui domine. Plusieurs personnes contactées, depuis samedi, dans cette région, s'interrogent sur l'origine de ces assaillants qui parlent haoussa, arabe tchadien ou fulfulde et se déplacent par dizaines à moto, cheval ou dromadaire. Nos interlocuteurs affirment qu'on en voit déambuler, en armes, jusque dans la ville de Goré, sans être inquiétés.

Autre exemple de crispation : une soixantaine de chefs de villages du canton de Beboni, près de Doba, ont été convoqués, jeudi 18 mai, à Bebedja par une délégation militaire venue de Ndjamena. Selon un participant, on leur a demandé d'établir des listes de personnes en possession d'armes et d'organiser le désarmement des civils. Le chef de canton a affirmé à ses interlocuteurs que les villageois n'avaient pas d'armes. Il demande aux populations de ne pas s'éloigner des villages.

Réactions politiques

Cette flambée de violence, depuis la fin du mois d'avril, fait réagir les acteurs politiques tchadiens. Sur sa page Facebook, l'opposant Succès Masra, originaire de cette région et qui se trouve toujours à l'étranger, dénonce des « massacres ciblés ». « On arme une partie de la population contre une autre désarmée », écrit-il.

À Ndjamena, l'indignation est partagée : l'opposant Théophile Bongoro a affirmé, vendredi, devant la presse que « l'État est dépassé par ces événements », tandis que le président de la Commission nationale des droits de l'Homme, Mahamat Nour Ibedou, demande la création d'une force mixte tchado-centrafricaine.

Pour l'ancien chef de cabinet de Mahamat Idriss Déby, Abdoulaye Sabre Fadoul, ces « sauvageries » ne sont ni du « banditisme », ni des « conflits intercommunautaires ordinaires ». Sur les réseaux sociaux, il appelle à « faire bloc avec les autorités qui tentent de pacifier la zone », tout en dénonçant un « État introuvable » et s'interroge sur la tournée que vient d'achever le président de transition dans huit provinces, sans passer par le sud du pays.

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