Abir Moussi, dont le projet comptant sur la mise en spectacle de la vie politique a été éclipsé par le processus du 25 juillet, vise à regagner le devant de la scène politique nationale. Dernièrement, elle est redescendue dans la rue pour se faire entendre, mais surtout pour rappeler que son projet politique existe toujours. Alors qu'elle s'est déjà lancée dans une guerre de tous contre tous, maintenant, elle vise le Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt) et l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt).
Déjà en conflit avec les médias, Abir Moussi et son Parti destourien libre (PDL) se sont attiré, dernièrement, les foudres de deux grandes organisations en tenant durant la même journée du samedi dernier, une double manifestation devant les sièges du Snjt et de l'Ugtt à Tunis. Sauf que les choses ne sont pas passées comme prévu et la situation a dégénéré.
Moussi et plusieurs membres et sympathisants du PDL ont organisé un rassemblement devant le siège du Snjt et ont tenté, selon l'Ugtt dont les locaux se trouvent en face de celui du Snjt, de forcer le passage pour accéder au bâtiment. Cadres et adhérents de la Centrale syndicale étaient là pour empêcher l'assaut.
En effet, l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt) a indiqué dans un communiqué rendu public, que les partisans du parti destourien libre et sa présidente ont tenté de prendre d'assaut le siège de la Centrale syndicale et d'agresser ses agents. L'Ugtt a dénoncé cette attaque contre l'action syndicale, précise la même source.
Le bureau exécutif de l'Ugtt, qui a tenu une réunion en urgence suite à cette invasion, a décidé d'engager une procédure judiciaire auprès des autorités compétentes pour sanctionner les agresseurs.
Il a également dénoncé les slogans scandés par les agresseurs, «identiques», selon la Centrale syndicale «à ceux scandés par les Ligues de protection de la révolution lors de leur attaque perpétrée contre le siège de l'Ugtt, place Mohamed Ali, le 4 décembre 2012», rappelle notamment la même source.
Abir Moussi argumente
Pour sa part, la présidente du Parti destourien libre a posté une vidéo sur le réseau Facebook où on la voit hospitalisée. Elle s'en est prise à ce qu'elle appelle «la police de Kaïs Saïed suite à une agression sauvage réprimant la manifestation ».
«Nous avons informé la police de tous nos mouvements. Nous avons averti les parties officielles de toute notre logistique, mais enfin nous avons été réprimés», a-t-elle expliqué.
La présidente du PDL a affirmé que tout leur matériel a été saisi et que leurs mouvements ont été limités par la police. Elle explique que sa marche avait pour but de «libérer les médias de l'emprise des Frères musulmans».
«Nous avons trouvé refuge au siège de notre maison, l'Ugtt. Nous n'avions eu aucune intention de nuire à l'Ugtt, mais nous étions surpris par une attaque de certaines personnes qui voulaient soi-disant protéger ce siège. L'Ugtt est pour tous les Tunisiens et n'est pas pour cette bande», a-t-elle encore détaillé.
La tension était déjà palpable entre le Syndicat des journalistes et Abir Moussi. Alors que, depuis près de deux ans, le Snjt avait boycotté Abir Moussi, cette dernière s'est lancée dans une guerre contre ce qu'elle appelle une mainmise des Frères musulmans sur le domaine des médias.
Elle avait accusé certains journalistes et responsables de médias «de recevoir des fonds pour des formations fictives et ce, dans le cadre d'opérations de corruption».
D'ailleurs, le Parti destourien libre a annoncé avoir saisi la justice contre deux journalistes « pour activités douteuses en lien avec le terrorisme ».
Il s'agit de Leila Ben Attia, directrice d'un Centre de formation médiatique et du réseau des rédacteurs du Moyen-Orient et Mabrouka Khedhir, présidente du Conseil consultatif dudit réseau. Selon le communiqué « ces deux structures sont en lien avec des activités terroristes mettant en péril la sécurité nationale ».
«Le Syndicat national des journalistes tunisiens avait refusé ce qu'il a appelé le harcèlement exercé par Abir Moussi contre les journalistes et réfute toutes ses fausses accusations et ses contre-vérités», a rétorqué pour sa part le Snjt, annonçant qu'il se réserve le droit de porter plainte contre elle.
Samedi dernier, l'affiche sur les locaux du Syndicat national des journalistes comme réaction au rassemblement organisé par le PDL et sa présidente Abir Moussi, a fait jubiler la toile. C'est au moyen d'une grande affiche portant d'un côté l'effigie de Abir Moussi et, de l'autre, celle de l'ancien président de la République, Zine El Abidine Ben Ali, que le Syndicat a réagi au rassemblement de Abir Moussi.
Kaïs Saïed, premier bénéficiaire ?
En tout cas, c'est entre autres, par ce genre d'incidents et de chaos que le Président de la République a réussi son coup du 25 juillet. Puisant dans la fébrilité de la classe politique et surtout dans l'image de l'ancien Parlement, Kaïs Saïed a pu gagner la confiance des Tunisiens.
En tout cas, le fossé entre le locataire de Carthage et l'opposition politique se creuse davantage. Pour le Président de la République, ses opposants sont derrière «la misère du peuple tunisien et des pénuries actuelles».
Dans ses différentes apparitions médiatiques, Kaïs Saïed a insisté sur le fait qu'il restera fidèle à son engagement et qu'il ne «succombera pas à leurs campagnes de dénigrement et à leurs calomnies».