Alors que les combats continuent à secouer le Soudan, Solidarités International a été la première ONG à entrer la semaine dernière à l'ouest du Darfour et dans la ville d'el-Geneina. Les habitants de cette ville ont payé un tribut cher de la guerre, déclenchée le 15 avril dernier, avec 70% de la ville ayant été brûlée, selon l'organisation, et dans une situation humanitaire catastrophique.
Spécialisée dans le domaine de l'assainissement de l'eau, l'organisation Solidarités international a pu entrer dans le chef-lieu du Darfour occidental, où elle a retrouvé une réalité catastrophique. Justine Musik Piquemal, qui dirige l'équipe de cette ONG, « n'a pas vu de corps ni sur la route, ni dans la ville », alors que des responsables locaux de la ville évoquent plus de 5 000 habitants morts, mais dont les corps auraient été nettoyés après avoir jonché les rues jusqu'à il y a une semaine.
Selon elle, plus de 120 000 réfugiés qui étaient abrités dans des écoles ou des bâtiments administratifs se trouvent sans logement, notamment après des combats « extrêmement violents entre la RSF (Forces paramilitaires de soutien rapide (commandées par le général dit « Hemedti » - NDLR), la SAF (Forces armées soudanaises - NDLR) et les milices arabes et les milices masalit dans la ville ».
Nous, Solidarité International, on n'a pas vu de corps ni sur la route, ni dans la ville, donc on n'est pas témoin de ça en direct. Effectivement, les combats ont été extrêmement violents. On le sait puisqu'on a rencontré des réfugiés, qui sont plus de 80 000, donc les personnes ne sont pas parties pour rien. On a rencontré nos équipes soudanaises, nos voisins, qui étaient très contents d'avoir enfin une ONG internationale qui arrive sur el-Geneina. Le fait de venir démontrer qu'on pouvait prendre la route et qu'on pouvait aussi maintenant reprendre le travail, ça fait une lueur d'espoir à toute cette population qui n'a donc plus d'eau, plus d'électricité, plus à manger. Il n'y a pas de réseau téléphonique, donc ils sont un peu coupés du monde. De pouvoir venir jusqu'à eux, ça a permis aux personnes qu'on a rencontrées de commencer à avoir un peu d'espoir qu'il y aurait de l'eau potable et de la nourriture qui serait distribuée bientôt.
la responsable de Solidarités international Justine Muzik Piquemal Justine Muzik Piquemal parle d'une situation catastrophique à al-Geneina
L'ONU s'est récemment inquiétée de possibles « crimes contre l'humanité » au Darfour. La ville d'al-Genaïna, à l'ouest du Darfour, a connu de très violents combats. Mais Justine Musik Piquemal, a surtout été frappée par le silence qui domine la ville.
Le silence est très impressionnant, il n'y a pas de bruit, les gens ne parlent pas : ils chuchotent. Il y a très peu de gens dans la rue, et on sait qu'il y a encore des habitants puisque nous faisons de la distribution d'eau potable et on sait qu'il y a des queues énormes à notre distribution, parce qu'on est loin de couvrir tous les besoins. Mais quand on rentre d'al-Geneina, c'est le silence. Il n'y a pas de bruit, il n'y a pas de bruit du tout. Donc malgré le fait qu'il y ait des pick-up de militaires ou des gens qui marchent un peu dans la rue, c'est extrêmement silencieux, c'est très impressionnant. J'ai écrit, il n'y a pas très longtemps, sur mon LinkedIn que la guerre ne faisait pas de bruit. Je le redis encore une fois, ce silence est extrêmement pesant dans la ville.=
En entrant à el-Geneina, la responsable de Solidarités international Justine Muzik Piquemal a été frappée par le silence dans la ville