Afrique: Sommet afrique-russie de Saint Petersburg - La diplomatie du Canon et des céréales fera-t-elle son effet ?

Le président Macky Sall du Sénégal et son homologue du Burkina Faso, le Capitaine Traoré du Burkina Faso
25 Juillet 2023
analyse

Les 27 et 28 juillet 2023, se tient à Saint Petersburg, le sommet Afrique-Russie. Deuxième du genre après celui de Sotchi tenu en 2019 sur les bords de la mer noire, ce sommet qui se tient en pleine guerre froide avec l'Occident, ne pouvait pas être meilleure opportunité pour l'Ours russe, de chercher à polir son image et à raffermir ses liens de coopération avec le continent noir.

Un continent qui, au-delà de la position de neutralité qu'il a voulu adopter dans la guerre en Ukraine, n'en subit pas moins de plein fouet, les effets induits. C'est dire si le timing de ce sommet ne pouvait pas mieux tomber pour Moscou.

En tout cas, à en juger par la cinquantaine de chefs d'Etat et de gouvernements africains qui sont annoncés à ce jamborée de Saint Petersburg, il y a des raisons de croire que ce sommet ne manque pas d'intérêts pour les dirigeants africains.

Et il est permis de penser que certains d'entre eux vont chercher dans la capitale de l'ancien empire russe, ce qu'ils n'ont pu obtenir ailleurs. Surtout par ces temps d'insécurité quasi généralisée et de famine qui menacent le continent africain d'Est en Ouest et du Nord au Sud.

Le sommet de Saint Petersburg intervient au lendemain de la sortie de la Russie de « l'accord céréalier » avec l'Ukraine

C'est dire si dans le contexte actuel, Vladimir Poutine a une belle carte diplomatique à jouer en direction des dirigeants africains. Et le thème du sommet qui porte sur « la paix, la sécurité et le développement » est d'autant plus d'actualité qu'au-delà de l'hôte du sommet qui parle de paix alors que lui-même est engagé dans une guerre qui aurait fait sourire n'eût été son côté dramatique, ce sont trois questions fondamentales qui demeurent aujourd'hui encore au coeur des préoccupations des dirigeants africains.

Et Dieu seul sait si dans l'imaginaire de nombreux Africains, ces préoccupations ont largement de quoi trouver aujourd'hui réponse du côté de la deuxième puissance militaire au monde qui est, soit dit en passant, aussi un grand exportateur de céréales.

La question que l'on peut alors se poser est de savoir si la diplomatie du canon et des céréales fera son effet. La question est d'autant plus fondée que ce sommet de Saint Petersburg intervient au lendemain de la sortie de la Russie de « l'accord céréalier » avec l'Ukraine, qui fait peser davantage l'épée de Damoclès du risque d'insécurité alimentaire avec son corollaire d'envolée des prix sur de nombreux pays africains.

De là à voir dans le retrait de Moscou, une décision calculée à l'effet de mieux mettre la question de l'approvisionnement du continent noir en céréales, dans la balance des discussions de ce sommet, il y a un pas que d'aucuns ont vite fait de franchir.

Toujours est-il que si à la faveur de ce sommet, le patron du Kremlin devait donner de la main droite aux Africains ce qu'il a retiré de la main gauche aux Occidentaux, la question serait de savoir si cela fera évoluer la position des dirigeants africains par rapport à la question de l'invasion de l'Ukraine.

C'est de par sa capacité à tenir ses promesses que Vladimir Poutine pourra s'attirer la sympathie et la fidélité des dirigeants africains

Car, dans cette guerre par procuration entre la Russie et l'Occident, qui se mène aussi sur le plan diplomatique, il n'est un secret pour personne que chaque partie cherche à rallier le maximum d'alliés à sa cause.

Et si la participation des chefs d'Etat africains qui ont fait le déplacement de Saint Petersburg, doit être à la hauteur de leur confiance au patron du Kremlin, il ne fait pas de doute que Vladimir Poutine a un grand coup à jouer, vu qu'il a ratissé large jusqu'au sein des « bannis » de la CEDEAO et de l'Union africaine. Et ce, dans une démarche inclusive qui a vu, par exemple, le président de la transition burkinabè, le capitaine Ibrahim Traoré, effectuer son premier déplacement officiel hors du continent, pour participer à ce sommet auquel son homologue malien, le colonel Assimi Goïta, est aussi officiellement invité.

Et c'est l'Occident qui fait grise mine. D'autant que dans le contexte actuel, un tel rush des dirigeants africains vers Saint Petersburg, n'est pas pour plaire aux détracteurs du dirigeant russe qui, après son renoncement à effectuer le déplacement d'Afrique du Sud pour participer au prochain sommet des BRICS pour les raisons que l'on sait, n'est pas loin de tenir sa revanche sur les Occidentaux dans ce qui ressemble, d'ores et déjà, à une grande victoire diplomatique.

Et l'on est d'autant plus curieux de voir les conclusions de ce sommet que l'on se demande s'il suffira, à lui seul, à faire basculer durablement dans le giron russe, des pays du continent noir devenu le théâtre de rivalités des grandes puissances qui multiplient les espaces d'échanges bilatéraux, à l'image de prétendants engagés dans une cour assidue à une même et jeune demoiselle.

En tout état de cause, c'est de par sa capacité à tenir ses promesses que Vladimir Poutine pourra s'attirer la sympathie et la fidélité des dirigeants africains. C'est en cela que l'on attend de voir de quoi accouchera le sommet de Saint Petersburg.

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