Niger: M. Hamid Amadou N'gadé Conseiller en Communication du Président de la République du Niger SEM Mohamed Bazoum – « Le président Bazoum s'apprêtait à procéder à un changement à la tête de la garde présidentielle»

M. Hamid Amadou N'gadé Conseiller en Communication du Président de la République du Niger SEM Mohamed Bazoum
30 Juillet 2023
interview

La tension est encore vive au Niger. Pour mieux comprendre en profondeurs les tenants de cette situation, allafrica.com a interpellé M. Hamid Amadou N'gadé Conseiller en Communication du Président de la République du Niger SEM Mohamed Bazoum. Dans une interview exclusive qu'il a nous accordé, ce proche du président Bazoum dénonce la posture des militaires putshistes et analyse les sanctions lourdes prises par la CEDEAO et l'UEMOA ainsi que les conséquences qu'elles peuvent avoir sur le Niger et ses populations.

Comment se portent le président Bazoum et sa famille et où se trouvent-ils actuellement ?

Le président va très bien. Il a le moral très haut et il est très déterminé. Sa famille est à côté de lui. Il est toujours à la résidence présidentielle. La particularité c'est que la résidence présidentielle se trouve à l'intérieur du camp de la garde présidentielle donc c'est un peu la situation à l'état actuel des choses.

La CEDEAO vient de prendre des sanctions lourdes contre la junte militaire au Niger. Comment analysez-vous ces mesures ?

Les sanctions sont à l'image de la réalité de la situation parce que la CEDEAO avait le devoir d'être dur et de prendre des sanctions et des mesures assez fermes. On est dans un contexte où il y a une succession de coup d’État. Cette tentatives au Niger ne repose sur aucune raison valables ni pertinentes. On a vu le discours du porte-parole des putshistes  avec des arguments très fallacieux. On ne peut pas venir parler du problème de la sécurité dans un contexte où le Niger en réussit plutôt bien. C'est vrai qu'il y a de petites excursions avec quelques déplacés au niveau de la zone de l'Ouest vers Tillabéri. Dans l'ensemble on est en train de juguler cela et l'armée est en train de recruter massivement. En 2011, l'armée comptait 11 mille hommes. Aujourd'hui, on est aux alentours de 50 mille. On avait une adéquation, un militaire - un fusil mais là on l'a réussi. On a récemment équipé l'armée en matériel militaire de pointe avec des drones et autres. Donc le putsh ne se justifie pas.

En terme économique, le Niger a eu la croissance la plus élevée de l'Afrique en 2022. Elle aura l'une des plus élevées en 2024. Les perspectives sont bonnes. On a de grands projets comme le barrage de Kandadji qui est censé finir prochainement et qui est financé par les Partenaires au développement en particulier la Banque mondiale. On a le pipeline qui doit traverser le Bénin et qui devrait être opérationnel à la fin de cette année et qui allait être une source de revenus très importante pour notre pays. Récemment, le président de la République a inauguré une cimenterie et à lancer des projets de route un peu partout. A Niamey, il y a des projets partout. On a des investisseurs qui viennent et d'autres qui veulent venir parce qu'on avait cette stabilité politique, cette démocratie qu'on avait. C'est grâce à cela qu'on était sur la voie du développement.

On ne peut pas accepter que quelqu'un se lève pour des convenances personnelles et sans aucune raison valable remettre tout cela en cause sans mesurer les conséquences. C'est ça qui est très grave.

Quelle sera la portée économique si toute fois les sanctions de la CEDEAO entreraient en vigueur ?

Si ces sanctions sont appliquées ce sera catastrophique. On est un pays enclavé. Avec un embargo total ce sera difficile car il y'aura notre principal accès qu'est le port de Cotonou qui sera coupé. Le pays avec qui on échange le plus c'est le Nigéria et ce sera fermé. Vous imaginez un peu comment ce sera. Les comptes seront bloqués au niveau des institutions financières avec la BCEAO. A termes, même les salaires ne pourront pas être payés. Ce qui est très grave. Les Nigériens ne méritent pas  de vivre ces situations-là.

C'est inadmissible parce que les sanctions sont lourdes. Beaucoup de projets qui dépendent de nos partenaires comme l'Union Européenne, la Banque Mondiale, la BOAD, entre autres, vont s'arrêter. Tout sera à l'arrêt. Il y a aussi les grands projets au niveau de la fourniture d'énergie car c'est sur financement de l'Agence française de développement (Afd) et de l'Union Européenne.

Tout cela malheureusement sera impacté parce qu'une seule personne ne veut pas être remplacé ou ne veut pas aller à la retraite. Il prend tout le pays en otage et nous faire vivre en autarcie. Ce qu'on n'a pas la capacité de faire et il faut l'admettre car c'est la réalité des faits, malheureusement.

Croyez-vous à l'efficacité de ces mesures si l'on se réfère aux cas du Mali, du Burkina Faso et de la Guinée ?

La CEDEAO est très ferme. Elle a donné une semaine pour rétablir l'ordre constitutionnel et le président Mouhamed Bazoum dans ses fonctions. On peut imaginer d'autres scénarios jusqu'à l'intervention militaire. C'est vrai que ce n'est pas quelque chose qu'on peut souhaiter mais c'est une possibilité parce que si on laisse ce coup d’État passé c'est fini. Le premier militaire qui pense qu'il a assez d'hommes sous son commandement  va se lever pour faire un coup d’État. Ça va créer un précédent dangereux.

C'est vrai que pour le Mali et le Burkina, les contextes étaient différents. Même eux sur le plan sécuritaire, après le putsh, la situation allait de mal en pis. Ce n'est vraiment pas la solution pour nos pays. Donc il faut que la CEDEAO soit ferme et prenne des décisions qui n'a jamais  eu  à prendre. On a vu le cas de Gilbert Diendéré et le cas de capitaine Amadou Haya Sanogo qui étaient obligés de faire marche arrière. Au niveau de la Sierra-Léone également c'est déjà arrivé, il y a quelques années. Ce n'est pas un précédent qui n'a jamais eu lieu. Il faut que la CEDEAO reste ferme et je fais confiance au président Tinubu qui est en    exercice.  Il est très déterminé et il n'acceptera pas ces genres de choses.

Est-ce qu'ils y avaient des signes annonciateurs d'un putsh au Niger ?

Des signes annonciateurs, c'est un peu difficile d'en parler mais il y a eu quelques informations collectées par les services de renseignement qui dataient. Le président s'apprêtait à procéder à un changement au niveau de la tête de la garde présidentielle. C'est une refonte au niveau de la garde présidentielle qui était prévue pour cette semaine. Je pense que c'est ça qui a précipité le général Abdourahamane Tchiani, chef de la garde présidentielle à passer à l'action, pour des raisons très personnelles et très égoïstes.

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