L'Assemblée nationale sénégalaise a, en sa séance du 5 août 2023, adopté la réforme du Code électoral, permettant à toute personne condamnée et bénéficiant ensuite d'une amnistie ou d'une grâce, de recouvrer ses droits d'éligibilité. Si le texte qui a été adopté par 124 voix pour, 1 contre et 0 abstention, est promulgué, les opposants Khalifa Sall, ancien maire de Dakar, et Karim Wade, ancien ministre d'Etat, de la Coopération et des transports et fils de l'ex-président Abdoulaye Wade, pourront donc prendre part à la présidentielle de février 2024. On se rappelle que les deux hommes avaient été écartés de la présidentielle de 2019 suite à leur condamnation dans des affaires financières distinctes. Avec l'adoption du nouveau Code électoral, ces deux hommes politiques peuvent savourer maintenant leur thiébou diène* puisqu'ils recouvrent ainsi leurs droits d'éligibilité. Preuve, s'il en est, qu'il ne faut jamais, en dépit de ses ennuis judiciaires, enterrer un homme politique. En tout cas, l'histoire donne tort à tous ceux qui avaient déclaré morts politiquement Karim Wade et Khalifa Sall.
Cela dit, pendant que les deux figures de l'opposition sont en train de regagner l'arène des gladiateurs pour le combat de février, l'un des leaders charismatiques de l'opposition, Ousmane Sonko, quant à lui, est en train de plonger. Tant et si bien que l'on se demande s'il n'est pas le plus grand perdant dans cette histoire. Or, c'est son combat qui aura permis d'ouvrir le dialogue national dont les conclusions ont abouti à la modification du Code électoral. Mieux, de contraindre, d'une certaine manière le président Macky Sall à renoncer à un troisième mandat. C'est dire si Ousmane Sonko aurait toutes les raisons de se sentir gros Jean comme devant. D'autant que non seulement il a été jeté en prison, mais aussi son parti, le PASTEF, a été dissous.
Cela dit, la réhabilitation de Khalifa Sall et de Karim Wade va contribuer un tant soit peu à décrisper l'atmosphère sociopolitique tendue au Sénégal. Pour autant, suffira-t-elle à apporter la paix dans le pays ? Tout porte à croire que non. En effet, tant que Ousmane Sonko restera en prison, le locataire du palais de la République du Sénégal risque de ne pas avoir le sommeil tranquille.
Il faut aussi appeler l'opposition à jouer balle à terre
On est d'autant plus fondé à le penser qu'une partie de la jeunesse qui voit en cet opposant, l'homme du changement, est vent debout contre le régime de Macky Sall qu'elle accuse à tort ou à raison, d'instrumentaliser la Justice pour empêcher un candidat sérieux de briguer la magistrature suprême. Bien que salutaire, la réhabilitation politique des deux opposants peut paraître aux yeux de nombreux Sénégalais, comme un acte insuffisant pour tirer la démocratie sénégalaise vers le haut. Car, quoi que l'on dise, plus qu'un dialogue, il s'agit aussi d'un arrangement entre hommes politiques. Macky Sall qui veut certainement des élections apaisées en février prochain au pays de la Teranga, a du pain sur la planche. Il doit travailler à mettre fin à la casse pour stopper la comptabilité macabre qui ne cesse de croître au grand dam des Sénégalais. Mais il faut aussi appeler l'opposition à jouer balle à terre. Il ne faut pas se voiler la face, sa posture insurrectionnelle peut se révéler lourde de conséquences non seulement pour elle-même, mais aussi pour l'ensemble du pays.
Thiébou diène* (plat traditionnel sénégalais fait à base de riz, de po