C'est acté. Khalifa Sall, leader de « Taxawu Sénégal » et Karim Wade du Parti démocratique sénégalais (Pds) ont obtenu leur ticket pour participer à l'élection présidentielle de février 2024.
Karim Wade et Khalifa Sall, condamnés à des peines fermes avant d'être graciés, sont désormais éligibles à la présidentielle de février 2024. Ils ont été remis dans le jeu grâce à l'adoption du projet de loi 12/2023 modifiant la loi n°2021-35 du 23 juillet 2021 portant Code électoral. Le texte a été adopté par 124 voix pour, 1 contre et 0 abstention, le samedi dernier lors de la deuxième session extraordinaire de l'année 2023. Cette modification, fruit du consensus obtenu par les acteurs du Dialogue national, abroge et remplace les articles L28, L.28, L.29, L.57, L.120, L.121, L.122, L.123 et L.126 du Code électoral.
Cependant, les débats ont plus tourné sur l'article L28.3. Il est écrit dans le texte que nul ne peut refuser l'inscription sur les listes électorales aux personnes qui, frappées d'incapacité électorale à la suite d'une condamnation, bénéficient de la réhabilitation ou font l'objet d'une mesure d'amnistie ou de grâce. En outre, il est indiqué, dans le même texte, que pour les personnes bénéficiant d'une mesure de grâce, l'inscription sur les listes électorales ne pourra intervenir qu'après l'expiration du délai correspondant à la durée de la peine prononcée par la juridiction de jugement, s'il s'agit d'une peine d'emprisonnement ; ou d'une durée de trois ans à compter de la date de la grâce, s'il s'agit d'une condamnation à une peine d'amende. Mais, le Ministre de l'Intérieur, Antoine Félix Diome, venu défendre le projet devant les parlementaires, a soutenu qu'au de-là, il y a eu d'autres avancées issues du Dialogue national auquel le Président de la République, en parfaite cohérence avec sa pensée politique, avait convié toutes les forces vives de la Nation. Parmi ces avancées, rappelle-t-il, il y a le parrainage qui est désormais optionnel et le plafonnement du montant de la caution à 30 millions de FCfa pour la présidentielle.
Corriger une anomalie de la loi électorale
En effet, lors de la séance plénière, des députés de l'opposition ont proposé le retour de l'alinéa 1er de l'article L57 dans sa version d'origine, issue du consensus de 1992, qui ne posait pas comme condition la qualité d'électeur pour faire acte de candidature et être élu. Relativement à cette proposition, le Ministre de l'Intérieur a indiqué que la nouvelle rédaction de l'article L57 a pour objet de corriger une anomalie de la loi électorale. « Il est prévu, dans tous les types d'élection, la qualité d'électeur pour faire acte de candidature et être élu. L'article L57 vient uniformiser les conditions d'éligibilité dans les différents types d'élections au Sénégal », a déclaré Antoine Félix Diome, rassurant qu'aucun homme politique au Sénégal n'a le pouvoir de choisir ses propres adversaires. « Ce projet de loi n'est pas fait pour réhabiliter Khalifa Sall et Karim Wade et éliminer Ousmane Sonko. Toute personne qui se trouve dans la même situation juridique que celle visée par le texte en bénéficiera », a ajouté l'ancien procureur de la Cour de répression de l'enrichissement illicite (Crei), tout en rappelant que le Sénégal a un système électoral fiable et la configuration de l'Assemblée nationale l'illustre.
ANTOINE FÉLIX DIOME, MINISTRE DE L'INTÉRIEUR
« L'inculpation de Ousmane Sonko n'a rien voir avec la dissolution de l'ex-parti Pastef »
Ceux qui lient la dissolution de l'ex parti de Ousmane Sonko à l'inculpation de ce dernier, suivi de son placement sous mandat de dépôt, font une mauvaise interprétation. C'est ce qu'a laissé entendre le Ministre de l'Intérieur, Antoine Félix Diome, le samedi 5 août dernier, à l'Assemblée nationale, lors du vote du projet de loi portant modification du Code électoral. « L'inculpation de Ousmane Sonko n'a rien à voir avec la dissolution de l'ex parti Pastef », a-t-il déclaré pour lever les équivoques. Selon lui, le Sénégal est un pays de paix et de dialogue, mais, relève-t-il pour le dénoncer, le contexte politique qui prévaut dans le pays depuis 2021 ne fait pas partie de notre tradition. « La politique, c'est le débat d'idées et non les invectives, les saccages des biens publics et privés, les incendies. Qui peut rejeter au Sénégal que l'ex leader de Pastef n'a pas appelé les jeunes à sortir manifester, à saccager les maisons des leaders politiques ? Des édifices publics et privés ont été saccagés, des casernes de gendarmerie attaquées, l'université de Dakar brûlée. Pire, Ousmane Sonko a même demandé aux jeunes d'aller déloger Macky Sall au Palais », a rappelé le Ministre de l'Intérieur, informant même que les jeunes manifestants de cet ex parti appellent maintenant les cocktails Molotov « Café Touba ». Ce qui, à ses yeux, est inadmissible dans un État de droit. C'est pourquoi, dit-il : « l'État a pris la responsabilité de dissoudre ce parti ». Et, souligne-t-il avec fermeté : « les auteurs de ces faits peuvent déchanter, car un Sénégal où l'on essaye d'apeurer les gens n'arrivera pas. La conséquence d'un parti politique qui trouble gravement l'ordre public, c'est sa dissolution ».