Afrique: Menace d'intervention militaire de la CEDEAO au Niger - Alger sauvera-t-elle la tête du général Tchiani ?

Le ministère des Affaires étrangères de l'Algérie, en 2011.

Alors que la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) s'active pour l'opérationnalisation de son intervention militaire au Niger où les tombeurs de Mohamed Bazoum ne montrent aucune volonté de réinstaller le président déchu dans son fauteuil, la diplomatie algérienne s'est mise en branle, à l'effet de trouver une solution pacifique à la crise.

C'est ainsi que le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a entamé, le 23 août dernier, une mini-tournée qui l'amènera successivement au Nigeria, au Bénin et au Ghana, pour prêcher le sermon de la non-violence auprès des dirigeants de ces pays engagés dans le projet de déloger par la force du canon, le Général Tchiani du palais présidentiel de Niamey.

La question qui se pose est la suivante : quelles sont les chances de succès de cette médiation algérienne qui intervient près d'un mois après le coup d'Etat au Niger, au moment où la CEDEAO n'est pas loin de perdre patience face à l'option de la diplomatie qui peine véritablement à dessiner un scénario crédible de sortie de crise ?

Malgré la clameur, le scénario de l'intervention militaire de l'organisation sous-régionale semble se préciser

La question est d'autant plus fondée qu'à l'issue de leur deuxième conseil de guerre tenu à Accra les 17 et 18 août derniers, les chefs d'Etat-major des armées des pays membres de l'organisation sous-régionale se sont dit « prêts à intervenir dès que l'ordre sera donné », allant même jusqu'à avancer que « le jour de l'intervention a aussi été fixé ». C'est dire toute la détermination des chefs d'Etat de la CEDEAO à ne pas reculer dans leur volonté d'en découdre militairement avec la junte qui s'est emparée du pouvoir à Niamey.

Une position d'autant moins surprenante que tout porte à croire qu'instruite par les précédents malien, guinéen et burkinabè, où le retour à l'ordre constitutionnel a été ou risque d'être renvoyé aux calendes grecques dans ces pays en transition, la CEDEAO qui joue plus que jamais sa crédibilité dans ce quatrième cas de figure, ne veut pas se laisser conter fleurette par les putschistes de Niamey. C'est dire si malgré la clameur qui monte, le scénario de l'intervention militaire de l'organisation sous-régionale semble se préciser. Et ce, au moment où la diplomatie algérienne tente de prendre la main dans ce dossier très explosif.

Alger sauvera-t-elle alors la tête du Général Tchiani ? Parviendra-t-elle à convaincre la CEDEAO de renoncer à l'usage de la force contre les tombeurs de Mohamed Bazoum ? On attend de voir. D'autant que malgré son opposition à une intervention militaire au Niger, le président Tebboune a vigoureusement condamné le coup d'Etat. Mais dans le même temps, on peut se demander à quel impératif répond cette façon, pour Alger, d'essayer de prendre la main dans le dossier nigérien, au moment où la diplomatie dans son ensemble semble marquer le pas.

On est impatient de voir à quoi aboutira cette offensive diplomatique algérienne

Est-ce pour prévenir les conséquences d'une éventuelle intervention militaire chez son voisin du Sud avec qui l'Algérie partage une frontière commune de près d'un millier de kilomètres ? Est-ce pour donner une chance au dialogue ? Quoi qu'il en soit, la mission paraît, d'ores et déjà, plutôt ardue. En effet, il est certes difficile de dire si le fait de ne pas appartenir à l'organisation communautaire, est un atout ou un handicap pour Alger.

Mais, même à supposer que le message du diplomate algérien soit entendu de la bonne oreille à Abuja, Cotonou et Accra, dans le contexte actuel, quelles garanties Alger pourra-t-elle donner que les militaires de Niamey tiendront parole dans le rétablissement de l'ordre constitutionnel à brève échéance ? Or, tout porte à croire que la CEDEAO se veut intransigeante sur le délai du retour à la légalité constitutionnelle, pour faire de l'exemple du Niger, un cas d'école visant à sonner le glas des coups d'Etat dans son espace géographique. C'est dire si d'un côté comme de l'autre, les enjeux paraissent énormes. C'est pourquoi, l'on est impatient de voir à quoi aboutira cette offensive diplomatique algérienne aux allures de médiation de la dernière chance, si la CEDEAO ne se décide pas d'ici là, à passer à l'action.

A moins que toutes ces agitations frénétiques de l'institution d'Abuja qui continue de brandir l'épouvantail de l'intervention militaire, ne participent plutôt d'une stratégie visant à maintenir la pression sur la junte nigérienne face à une opinion de plus en plus défavorable à l'usage de la force, à l'effet d'obtenir le maximum de concessions et de garanties. En tout état de cause, dans cette crise nigérienne où elle joue sa crédibilité, la CEDEAO ne peut pas se dégonfler du jour au lendemain comme un ballon de baudruche. Mais plus le temps passe, plus c'est le pouvoir du Général Tchiani qui s'enracine chaque jour un peu plus au Niger où il est en train de boucler son premier mois, là où la CEDEAO lui avait donné une semaine pour réinstaller le président Mohamed Bazoum sur son trône.

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