Ce lundi 4 septembre, s'ouvre à Nairobi, au Kenya, le premier sommet africain pour le climat. Pendant trois jours, des dirigeants d'Afrique et d'ailleurs se retrouvent pour échanger avec les acteurs de la société civile ainsi que des entreprises publiques et privées, et des organisations internationales. Objectif affiché : parvenir à une feuille de route commune du continent, pour la présenter à la COP, en novembre.
Cette fois, les participants veulent du concret. « Pas question de se réunir et que tout cela n'aboutisse à rien, comme souvent lors de ces réunions », confie le responsable d'une ONG ouest africaine travaillant sur le climat.
Une vingtaine de chefs d'État ou de gouvernement africains et près de 20 000 membres de délégations du monde entier se retrouvent à Nairobi.
Le président kényan, William Ruto, dont le pays accueille l'évènement, est à la manoeuvre et veut que ce rendez-vous marque un changement dans la façon dont le continent se mobilise sur les sujets environnementaux.
Ces trois jours doivent ainsi être l'occasion d'évoquer la croissance verte pour le continent, ainsi que le financement de l'action climatique.
Ce sont, en tout cas, quelques-uns des thèmes déclinés, lors de débats ou de tables rondes auxquels prendront part Azali Assoumani, le président de l'Union africaine, ou encore Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies.
La véritable ambition de cet évènement est de parvenir à trouver une approche commune et à formuler des « solutions africaines » aux défis climatiques, devant aboutir à la signature d'une « déclaration de Nairobi ».
Si cela se concrétisait, ce serait un engagement fort en Afrique, à moins de trois mois de la COP28, qui débute fin novembre à Dubaï.
Des engagements concrets, et forts, sont attendus
Les pays du continent africain sont parmi les plus vulnérables face au dérèglement climatique : sécheresses, inondations, cyclones... les catastrophes naturelles s'y multiplient.
Or, en sus, les moyens manquent pour y répondre, d'autant que plusieurs pays souffrent du poids de leur dette.
Le besoin d'une nouvelle architecture financière pour le climat devrait donc être au coeur des discussions, autour de la restructuration de dettes, par exemple, ou de la mise en place de taxes sur les énergies fossiles et sur des industries polluantes, telles que l'aviation et le transport maritime.
Le sommet entend mettre en avant le potentiel du continent dans la lutte contre le changement climatique.
Des engagements sont attendus notamment dans l'augmentation de la production agricole, la protection des océans et des forêts ou encore le développement des énergies renouvelables.
« J'espère que l'on pourra s'éloigner des énergies fossiles »
Parmi les 20 000 délégués, des représentants de la société civile. Car les activistes et autres défendeurs du climat attendent beaucoup de ces trois jours de discussions.
L'appel de plusieurs organisations ? Ne pas s'arrêter aux discussions et promesses, mais élaborer des solutions concrètes pour faire face aux défis du changement climatique sur le continent.
« J'espère que l'on pourra s'éloigner des énergies fossiles et des fausses solutions comme les crédits carbones et que les leaders africains vont plutôt insister sur le besoin d'avoir des investissements dans le secteur des énergies renouvelables », confie Charity Migwi, militante pour le climat au sein de l'association 350 Africa.
« Il faut aussi qu'ils poussent pour la mise en oeuvre des promesses de financement autour du climat, pour que les fonds soient mis à disposition, ajoute-t-elle. Les États africains sont déjà trop endettés, prendre plus de prêts pour financer les actions climatiques signifierait nous enfoncer dans la pauvreté. »
Une déclaration de Nairobi serait un document regroupant des propositions communes aux différents États africains sur le climat. C'est un point tout particulièrement important, pour Cherop Soy, militante kényane qui représente la jeunesse au sommet.
« Les pays africains présentent des géographies et des contextes variés, rappelle-t-elle, mais cela reste important que le continent puisse parler avec une voix unifiée. Car dans l'ensemble, les défis auxquels nous faisons face sont très similaires. »
Le sommet est aussi présenté comme une opportunité pour préparer la COP28, qui aura lieu à Dubaï en décembre. Et d'y apporter des solutions africaines aux questions climatiques.
« Nous espérons que ce ne soit pas un débat de plus »
Jointe par RFI, Fatima Diallo est directrice exécutive de la Cradesc, une organisation qui oeuvre notamment dans le domaine de la transition énergétique au Sénégal. Pour elle aussi, ce sommet doit provoquer un véritable changement de paradigme pour être utile.
« J'y vais dans un état d'esprit très constructif et à la fois très critique. On ne veut pas juste que ce soit les répliques des différentes COPs. On a vu le désastre pour ce qui nous concerne, nous, la société civile, de ce qu'a été la COP27. »
Nous sommes là, mitigés par rapport à la COP28 qui va venir, et donc nous y allons, tout de même, avec un esprit très constructif et très positif, je dirais, en espérant justement que ce ne sera pas un débat de plus.
« Nous avons vu l'engagement, que ça soit à l'African Development Bank, que ce soient les États en tant que tels, à travers les discours, en tout cas, qu'ils sont en train de prononcer, en prélude, dans les différents médias par rapport à leur engagement à ce sommet et à en faire une réalité », poursuit Fatima Diallo.
Donc, nous espérons vraiment qu'au-delà de beaux discours, on en sortira avec une déclaration qui permettrait de s'acheminer vers un plan d'action et une feuille de route très claire où les États prendraient aussi des engagements très clairs qu'ils auraient l'obligation, ensuite, de mettre en oeuvre.
La première journée, ce lundi, est consacrée aux discussions ministérielles. Mardi, les chefs d'État et de gouvernement se réuniront avant la clôture du sommet mercredi.
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