Libye: A Soussa, la recherche des personnes portées disparues se poursuit

Derna, en Libye, après le passage de la tempête Daniel, le 19 septembre 2023.

Soussa, ville libyenne située à quelque 70 kilomètres de Derna dans le district d'Al Jabal Al Akhdar, au nord-est de la Libye, sur l'ancien site d'Apollonia a, elle aussi, été sinistré suite au passage de la tempête Daniel. Au total, 22 personnes décédées ont pu être identifiées et enterrées, 45 autres, peut-être deux fois plus, sont encore portées disparus. Pour les proches des disparus, le deuil reste impossible.

En descendant la rue principale qui traverse Soussa, ce qui attire le regard d'abord, c'est la couleur blanche des centaines de rochers et de pierres emportés vers la vallée. L'eau a creusé d'énormes fossés des deux côtés de la route, cette même route, littéralement coupée par endroit où des maisons ont été emportées.

Avant d'être emportée par la crue, c'est à ce même endroit qu'habitait Noura, une enseignante d'anglais, mère de six enfants, Sa mère tient le plus jeune de ses petits-enfants dans les bras, dans une maison qui porte encore les traces des inondations : « Quand le torrent est venu, mon beau-fils est sorti pour prendre la voiture et fuir, mais l'eau a envahi d'un coup la maison, et a emporté la voiture. Il ne savait plus quoi faire. Ils ont alors commencé à monter sur le toit. Ma fille passait les enfants à son mari l'un après l'autre. Quand son tour est arrivée, l'eau a cassé la clôture de la maison et elle a été emportée. Son mari n'a pas pu l'attraper. Je pleurais et j'appelais la police au secours, ils me disaient qu'ils n'avaient pas les moyens pour la sauver. Ils m'ont demandé de prier pour elle. Tout le monde l'a vu partir, mais nous étions tous impuissants. Je sais qu'elle est morte maintenant, mais je voudrais juste l'enterrer. »

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Tout comme la mère de Noura, la soeur de la victime, n'arrive pas à faire son deuil : « Durant les premiers jours, à chaque fois qu'on entendait avoir trouvé une femme blessée, ma mère reprenait espoir et elle se disait qu'il s'agissait peut-être d'elle, qu'elle était peut-être vivante. Si on retrouve le corps et on l'enterre, elle sera tranquille. Au moins, il y aura un tombeau qu'elle pourra visiter, pour prier pour son âme, un tombeau que ses enfants pourront visiter quand ils seront plus grands, que je pourrais visiter pour rester avec ma soeur, lui parler. Où est-ce qu'elle pourrait être maintenant, sous la terre, sous la mer ? A-t-elle été dévorée par les chiens errants ? »

Si de nombreuses personnes ont pu être sauvés à Soussa, c'est grâce aux efforts des volontaires qui se sont improvisés secouristes. Parmi eux, Ali, pêcheur, comme avant lui, son père et son grand-père : « Dès le début de la tempête, nous avons utilisé les voitures blindées de la brigade Tarek ben Ziad, de l'armée nationale libyenne pour sauver des personnes bloquées dans leurs maisons. Nous entrions dans l'eau qui nous arrivait jusqu'à la fenêtre pour sortir les familles et les emmenées dans un lieu sûr, sur les hauteurs. À, un moment donné, nous étions entourés d'eau, j'avais avec moi, quatre femmes et près de vingt hommes. On est tous montés sur le toit. Il n'y avait plus d'électricité, ni de communication, puis d'autres volontaires sont venus à notre secours moyennant une corde, c"est comme ça qu'on a pu sortir un par un. »

Des visiteurs ou des étrangers parmi les potentielles victimes

À Soussa, comme ailleurs, deux semaines après la catastrophe, il reste impossible d'établir un bilan précis du nombre de victimes. Le Docteur Alaa a, lui aussi, échappé à la mort : « Soussa est une ville touristique, il est très difficile de connaitre le nombre de disparus, explique le médecin depuis l'hôpital de la ville. Nous avons des corps détériorés et on n'arrive pas à les identifier. Il y a tout un quartier de Soussa connu par ces chalets et qui sont habituellement remplis de touristes à cette période de l'année. Ce quartier a été entièrement anéanti, ce qui implique que tous ceux qui y résidaient sont supposés avoir été enterrés sous les décombres et ils sont tous des étrangers ou des visiteurs. Le nombre des 45 disparus n'est pas précis. »

Les dégâts causés par la tempête sont immenses à Soussa et les infrastructures ont été détruites à plus de 70%. Un employé municipal qui oeuvre au rétablissement du réseau d'eau potable, craint, lui aussi, un bilan bien plus lourd : « C'est la première fois en plus de 70 ans que des pluies torrentielles causent une telle catastrophe. Les personnes disparues sont sous le sol et les rochers, elles ont été emmenées par le torrent en ville. Et il y a aussi des disparus en mer. Il y a ceux qui sont de Soussa et probablement d'autres qui sont des visiteurs ou des étrangers. »

Les inondations ont touché la majeure partie de la ville, jusqu'au cimetière. Les victimes non identifiées sont enterrées dans des fosses communes, dans la ville voisine de Shahat.

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