Afrique: Visite président tchadien en France - Mahamat Idriss Déby chez son parrain élyséen

Le président tchadien de la transition Mahamat Idriss Déby a été reçu ce mercredi 18 octobre à l'Élysée par Emmanuel Macron.
analyse

Le président tchadien effectue depuis mardi une visite de travail en France. Autant dire chez lui, ou à tout le moins, chez son parrain français, Emmanuel Macron, avec qui il a eu un tête-à-tête hier dans l'après-midi.

Qui ne se souvient en effet pas de la façon dont le locataire de l'Elysée, après la mort d'Idriss Déby Itno, a adoubé le fils et soutenu la succession dynastique du pouvoir, il y a 3 ans, au motif que le Tchad était un verrou important dans la lutte contre le terrorisme au Sahel et que si ce verrou devait sauter, c'est toute la sous-région sahélienne qui en pâtirait ?

Au nom donc de l'impératif sécuritaire, on a fermé les yeux sur ce qui semblait être un coup d'Etat constitutionnel. C'est d'ailleurs pour cette raison que nombre de contempteurs de la France crient au deux poids, deux mesures, dans la mesure où ce n'est pas le même traitement qui est réservé aux autres putschistes qui ont essaimé ces dernières années en Afrique, notamment au Burkina Faso, au Mali, au Niger et en Guinée Conakry. Même s'il est vrai qu'au Tchad il s'est agi d'un transfert du pouvoir paternel au fils tandis que dans les autres pays, c'était des coups d'Etat en bonne et due forme.

Depuis, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts et les militaires français ont été, tour à tour, chassés du Mali, du Burkina Faso et du Niger et sont en ce moment en train de replier sur N'Djamena, d'où ils devraient rentrer au bercail. Autant dire que cette visite de Mahamat Déby sera forcément frappée du sceau sécuritaire. Elle a lieu d'ailleurs au moment où une partie de l'opinion tchadienne est vent debout contre l'arrivée des troupes françaises, qu'elle voudrait voir quitter le pays. On n'en est certainement pas encore là, mais difficile de penser que ce qui est arrivé à la France dans les trois pays sahéliens susmentionnés n'aura pas d'impact, d'une manière ou d'une autre, sur ces troupes basées au Tchad.

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La situation au Niger a pu aussi être abordée par les deux hommes. On se rappelle qu'à l'arrivée au pouvoir du général Abdourahamane Tchani à Niamey, le président tchadien avait tenté une médiation qui semble avoir fait long feu.

Ce séjour de Déby fils intervient, ne l'oublions pas, à seulement quelques jours du premier anniversaire de la répression sanglante des manifestants qui protestaient le 20 octobre 2022 contre la prolongation de la Transition de 24 mois supplémentaires et le maintien de Mahamat Idriss Déby à sa tête.

Selon la Commission nationale des droits de l'homme du Tchad, cette répression a fait 128 morts. 6 mois après, 259 des 262 personnes condamnées dans cette affaire ont été graciées. Il n'est donc pas interdit de penser que la situation au pays de François Tombalbaye a pu être au menu des échanges entre les deux hommes. Cela d'autant plus que le Tchad a besoin d'argent pour retrouver une vie constitutionnelle normale. Les Tchadiens ont besoin de 53 millions de dollars pour le référendum, de 260 millions de dollars pour les élections et de 32,5 millions de dollars pour le processus de DDR (Désarmement, démobilisation et réintégration) des groupes rebelles signataires de l'accord de Doha, ce qui fait un gros paquet d'argent. Et si ça se trouve, c'est certainement un soutien que le chef de l'Etat est allé solliciter auprès de Paris.

Cela dit, Déby fils aura les pieds à Paris et la tête à N'Djamena, où l'attend un dossier brûlant, quoique d'un tout autre genre. En effet, le ministre de la Défense, le général Daoud Yaya Brahim, et le secrétaire général du gouvernement, Haliki Choua Mahamat, ont annoncé leur démission après avoir été cités dans une affaire de moeurs. Une histoire d'alcôve qui ne manque pas, depuis hier, de susciter moult commentaires sur la moralité de ceux qui dirigent le pays. Même s'il faut se garder de condamner tous les autres sans procès, il faut reconnaître que ça fait quand même désordre, d'autant plus que les dirigeants, à l'image de la femme de César, doivent être au-dessus de tout soupçon.

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