Initialement prévue le 9 novembre, l'élection présidentielle à Madagascar a été reportée au 16 novembre à cause d'une blessure de l'un des treize candidats en lice, dont le président sortant, Andry Rajoelina, qui a dû démissionner, conformément aux dispositions de la Constitution.
Dix des candidats, regroupés sous le nom de "Collectif des candidats", contestent le déroulement du processus électoral. Ils exigent la disqualification d'Andry Rajoelina en tant que candidat en raison de sa nationalité française qui aurait entraîné la perte de sa nationale malgache. Ces candidats demandent également le remaniement de l'actuelle Commission électorale nationale indépendante (Céni), de la Haute cour constitutionnelle (HCC) et du gouvernement collégial dirigé par le Premier ministre Christian Ntsay.
Ils sont convaincus que ces institutions sont biaisées et soutiennent officieusement la candidature de Rajoelina. Ils demandent, en outre, une négociation pour résoudre le conflit et répondre à leurs demandes. Pour le moment, la Fédération des églises chrétiennes et la présidente de l'Assemblée nationale, Christine Razanamahasoa, essayent d'offrir en vain leur médiation.
Les revendications de l'opposition
Forcer Andry Rajoelina à participer à une négociation qui pourrait aboutir à sa propre disqualification en tant que candidat est tout à fait inconcevable. Au moins deux autres candidats ont aussi une double nationalité franco-malgache : Jean Jacques Ratsietison et Sendrison Raderanirina. Deuxièmement, l'actuel gouvernement collégial, la Céni et la HCC n'accepteront pas de cautionner une telle négociation ni de se dissoudre et de céder le pouvoir à un nouveau gouvernement de consensus, à une nouvelle Céni et HCC rebaptisée "Cour électorale spéciale" comme en 2013.
La satisfaction de ces revendications suppose qu'une nouvelle crise politique grave ou guerre civile survient. Ce qui pourrait justifier une implication de la communauté internationale. Le Collectif des candidats a entamé ses manifestation de rue le 2 octobre dernier. Il entend les poursuivre jusqu'à ce que ses revendications soient satisfaites. De leur côté, Andry Rajoelina et deux autres candidats, Siteny Randrianasoloniaiko et Sendrison Raderanirina, ont lancé leur campagne électorale.
Une situation volatile
La question qui se pose aujourd'hui est de savoir si l'élection présidentielle aura lieu, comme prévu, au 16 novembre. Rien n'est sûr car la situation est très volatile et la tension entre les deux camps risque de dégénérer à tout moment, surtout à l'approche de la date fatidique. Malgré tout, le gouvernement en place, la Céni et la HCC, qui soutiennent dans une certaine mesure leur ancien patron, Andry Rajoelina, sont déterminés à ce que l'élection présidentielle se tienne à la date prévue. Reste à savoir alors s'ils réussiront dans cette entreprise.
Cette élection risque de se dérouler dans un contexte de manifestations massives de rue et peut-être de violences, mais considérée comme "libre, équitable et acceptée par tous". Cela dépendra des évaluations des différents observateurs électoraux et surtout des partenaires financiers dont le pays dépend pour sa survie économique.
Plusieurs organisations de la société civile et la Communauté de développement de l'Afrique australe ont déjà annoncé leur participation en tant qu'observateurs. D'autres organisations nationales et internationales sont aussi attendues. La plupart des partenaires financiers ont contribué aux fonds de financement de l'élection. Pourtant, celle-ci comporte des risques importants aussi bien pour Andry Rajoelina et son équipe que pour les membres du Collectif des candidats.
Pour les premiers, s'ils s'entêtent à organiser l'élection dans de telles conditions, sans essayer de diminuer la tension, ils risquent de faire face à un durcissement du mouvement de l'opposition et éventuellement à une guerre fratricide. De plus, même s'ils réussissent à tenir l'élection dans ces conditions, ils pourraient finalement aboutir à des résultats qui ne seront reconnus ni au niveau national ni à l'échelle internationale.
Pour les membres du Collectif des candidats, le risque le plus apparent serait de perdre l'élection sans y participer, c'est-à-dire que ses membres se seront disqualifiés eux-mêmes au lieu de disqualifier Andry Rajoelina. .