Conférence économique africaine 2023 - Dexperts exhortent les pays africains à investir dans le capital humain pour s'intégrer aux chaînes de valeur mondiales

23 Novembre 2023
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African Development Bank (Abidjan)
communiqué de presse

Si la participation des pays africains aux chaînes de valeur manufacturières mondiales s'est améliorée ces dernières décennies, elle reste faible et dominée par les exportations de produits primaires et l'engagement dans des tâches peu qualifiées.

Les pays du continent doivent saisir les opportunités de mieux s'intégrer dans le commerce international, en promouvant la fabrication à valeur ajoutée et en investissant davantage dans le capital humain. Cela leur permettra d'exploiter le potentiel de l'industrialisation, qui peut stimuler la croissance inclusive en Afrique.

Telles sont conclusions qui ressortent de cinq études présentées, vendredi, lors de la sixième session de recherche de la Conférence économique africaine 2023.

Cette conférence, qui s'est tenue du 16 au 18 novembre à Addis-Abeba, en Éthiopie, était organisée conjointement par la Banque africaine de développement, la Commission économique des Nations unies pour l'Afrique et le Programme des Nations unies pour le développement. Elle avait pour thème central : « Les impératifs du développement industriel durable en Afrique ».

Si l'emploi dans le secteur manufacturier a plus que doublé entre 1990 et 2018 en Afrique, de 8,6 à 21,3 millions d'emplois, la participation des pays africains aux chaînes de valeur mondiales (1,7% en 2019, contre 1,5% en 2000, selon les données 2022 de la Commission de l'Union africaine et du Centre de développement de l'OCDE) s'est faite de façon inégale.

C'est le constat dressé par Bernard Nguekeng, enseignant en économie et management à l'université Yaoundé II, au Cameroun. « Une plus forte participation des pays de l'Afrique australe et de l'Afrique du Nord en amont et en aval aux chaînes de valeur mondiales contraste avec la faible participation de l'Afrique centrale », a-t-il-relevé dans son étude qui couvre 51 pays du continent sur la période 1996-2018.

Soulignant l'impact positif de cette participation sur l'économie de ces sous-régions, M. Nguekeng a rappelé que l'industrialisation était « un facteur clé de création d'emplois, d'amélioration de la productivité et de renforcement des exportations en Afrique. » L'industrialisation figure parmi les cinq priorités stratégiques de la Banque africaine de développement, et est un objectif principal de l'Agenda 2063 de l'Union africaine, a-t-il rappelé.

Qui dit industrialisation, dit nécessité pour les pays africains de se spécialiser dans la montée en compétences de leur main d'oeuvre, de développer leurs infrastructures et les activités créatrices de richesse pour mieux s'intégrer aux chaînes de valeur mondiales, selon l'avis partagé des panélistes.

Il est nécessaire de mettre en place des politiques appropriées, conçues pour exploiter les avantages comparatifs de chaque pays, tout en encourageant la concurrence et l'innovation dans les industries à forte valeur ajoutée, ont recommandé les experts.

À cet égard, l'étude sur la transformation structurelle dans une vingtaine de secteurs, conduite par Wissal Sahel, économiste du développement à l'université Mohammed V de Rabat, a montré le lien entre réformes politiques et croissance sectorielle et hausse de la productivité de la main d'oeuvre.

« L'avantage comparatif du Maroc dans l'agriculture a été soutenue par une politique volontariste, à l'instar du Plan Maroc Vert. En revanche, la contribution du secteur manufacturier à la croissance reste faible. Le commerce extérieur pèse lourdement sur l'industrie », a souligné Mme Sahel.

Les gouvernements africains doivent soutenir les entreprises du continent pour améliorer significativement leur compétitivité, créer des liens avec les économies locales et surmonter les obstacles à l'investissement. Pour attirer les investissements dans les chaînes de valeur stratégiques, les pays doivent investir notamment dans la productivité et les compétences.

Bruno Emmanuel Ongo, professeur d'économie à l'université Yaoundé II, a axé ses travaux de recherche sur les effets des chaînes de valeur mondiales sur la croissance inclusive en Afrique subsaharienne.

Dans son étude qui couvre 46 pays sur la période 1995-2020, il a fait le constat que peu de pays africains participaient aux chaînes de valeur mondiales. Il a relevé également que la croissance robuste du PIB continental, de 5,1% en moyenne sur la dernière décennie, avait eu un impact peu inclusif sur l'emploi.

« Plutôt que d'importer des textiles d'autres régions du monde, valorisons nos produits africains ! Ainsi, nous contribuerons fortement au développement de l'industrie locale et à l'intégration du continent », a exhorté M. Ongo.

Lui aussi a souligné qu'il était nécessaire de développer urgemment les politiques de renforcement des compétences via les programmes d'enseignement et la formation continue, notamment dans la technologie. « Le capital humain et la gouvernance n'améliorent pas l'intégration des pays du continent aux chaînes de valeur mondiales », a-t-il constaté.

Faisant écho à ses co-panélistes sur la nécessité d'investir dans le capital humain, Nneka Esther Osadolor, professeur à l'université du Bénin au Nigéria, invite à aller vers une spécialisation industrielle verticale afin d'exporter des produits finis à valeur ajoutée élevée.

Son étude, axée sur la participation aux chaînes de valeur mondiales comme facteur favorisant une industrialisation durable en Afrique, a montré une hétérogénéité selon les pays et les sous-régions, l'Afrique australe et l'Afrique du Nord étant plus favorables à l'industrialisation.

« La participation aux chaînes de valeur mondiales est liée positivement à l'industrialisation. La technologie est un élément essentiel pour l'industrialisation. Il faut mettre l'accent sur la production de biens intermédiaires et finis », a soutenu M. Osadolor.

Le dernier panéliste, Olufemi Adebola Popoola, chercheur à l'Institut nigérian de recherche économique et sociale, a souhaité montrer les effets sur l'emploi et l'innovation de la participation aux chaînes de valeur mondiales au Nigéria.

« Cette intégration peut aider à réaliser ces objectifs, mais les volumes commerciaux sont encore trop faibles au Nigéria et le déficit d'innovation technologique demeure important. Du coup, très peu d'entreprises participent aux chaînes de valeur mondiales », a expliqué M. Adebola. Son étude ne prend cependant en compte que 67 entreprises dans trois secteurs clés du Nigéria : la pharmacie, la pétrochimie et l'alimentaire.

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