Historiquement peu émettrice en carbone, l'Afrique aura besoin de financements pour mener sa transition énergétique, ont martelé le chef de l'ONU et le Président de la Commission de l'Union africaine lors d'un point presse conjoint tenu ce mardi au siège des Nations Unies, à New York.
Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, et le Président de la Commission de l'UA, Moussa Faki Mahamat, se sont conjointement exprimé à l'avant-veille de la Conférence des Nations Unies sur le climat, la COP28, aux Émirats arabes unis, où ils seront tous deux présents.
« Ce grand rendez-vous doit être l'occasion de faire un plaidoyer, notamment pour le continent africain, qui est négativement impacté par les changements climatiques alors qu'il est le moins pollueur », a d'emblée souligné M. Faki.
Le point-presse a eu lieu à l'issue de la 7e session du dialogue de haut niveau entre l'UA et les Nations Unies.
Sur la question de la transition énergétique dont il sera tant question à Dubaï, M. Faki a à la fois vanté les potentialités du continent en terme de développement énergétique et remis les choses en perspective, en rappelant que le continent africain comptait près de 600 millions d'habitants « ne connaissant pas encore l'électricité ».
« Investissement rentable »
L'Afrique, a-t-il encore rappelé, « c'est 1,4 milliard d'habitants. C'est 30 millions de kilomètres carrés. C'est entre 60 et 65% de terres arabes non exploitées. C'est le bassin du Congo ». Des territoires bénéficiant d'un ensoleillement quasi quotidien.
« Il y a des rivières, il y a des cours d'eau, donc il y a une possibilité pour l'énergie propre, l'énergie renouvelable, l'énergie verte. Encore faut-il que des investissements conséquents et que la technologie nécessaire soient mis à disposition. J'insiste là-dessus : je suis sûr que cet investissement sera rentable », a affirmé le haut responsable de l'Union africaine.
La transition doit aussi tenir compte du rythme à adopter pour abandonner l'énergie fossile en Afrique sans compromettre le développement : « Je sais qu'à [la COP 27 de] Glasgow, il a été décidé de ne pas financer les énergies fossiles. Nous sommes tous pour l'énergie propre, mais cela doit être graduel et en fonction des besoins des pays », a-t-il souligné.
La promesse de « 100 milliards de dollars par an pour l'Afrique » n'a pas été atteinte, « alors que les besoins sont 10 fois plus importants, selon les estimations des institutions spécialisées. Donc voilà la question : nous attendons que des mesures concrètes soient prises à l'occasion de cette COP 28 », a bien insisté le chef de la Commission de l'UA.
« Double injustice »
Le chef de l'ONU a partagé l'analyse de son homologue africain s'agissant de la notion de justice « dont l'Afrique a besoin avant tout ». Particulièrement « dans les relations internationales, car l'Afrique a été victime des injustices structurelles de nos relations internationales », a constaté M. Guterres.
En fait, pour le chef de l'ONU, l'Afrique est « victime d'une double injustice » : l'injustice historique liée au colonialisme et à l'esclavage ; et l'injustice actuelle liée à l'architecture des relations internationales, notamment par rapport au pouvoir financier et économique.
« C'est pourquoi nous tenons tant à réformer les institutions financières internationales, afin de garantir qu'elles correspondent à l'économie d'aujourd'hui et non à celle d'après la Seconde Guerre mondiale, et que les pays en développement aient davantage de pouvoir ».
« Pas de dons, juste des investissements »
Pour la transition énergétique africaine, « ce n'est pas des dons que nous attendons, juste des investissements », a enfin nuancé le chef de la Commission de l'UA, pour « mettre en place une énergie nouvelle et propre, stabiliser et développer le continent, et peut-être régler des problèmes comme ceux de la migration, devenue aujourd'hui un sujet extrêmement sensible, notamment avec notre voisin immédiat l'Europe ».