Afrique: Des relations tumultueuses

Bujumbura, Burundi.
15 Janvier 2024

Plus rien ne va entre le Burundi et le Rwanda, deux Etats voisins d'Afrique de l'Est qui se regardent en chien de faïence. Bujumbura accuse Kigali de soutenir le principal groupe rebelle, RED-Tabara qui combat le régime d'Evariste Ndayishimiye. Le pouvoir de Paul Kagamé a beau clamé n'être associé « en aucune manière, avec aucun des groupes armés burundais », les autorités burundaises n'en ont cure. La semaine dernière, le Burundi, convaincu que le Rwanda offre gite et couvert à ses ennemis, a pris des mesures de représailles, en procédant à la fermeture de ses frontières terrestres avec son voisin et à l'expulsion de certains de ses ressortissants présents sur son sol.

« Après avoir constaté que nous avions un mauvais voisin, Paul Kagamé, nous avons arrêté toute relation avec lui jusqu'à ce qu'il revienne à de meilleurs sentiments », a affirmé le ministre burundais de l'Intérieur, Martin Niteretse. Les deux Etats ne sont pas à leur première passe d'armes. Les relations entre le Burundi et le Rwanda n'ont pas toujours été au beau fixe. Elles ont pris un coup depuis le coup d'Etat manqué de 2015 au Burundi.

Le président d'alors, Feu Pierre Nkurunziza, dont la candidature à un troisième mandat était contestée, y avait vu la main de Kigali, accusé d'être le principal soutien des putschistes. Cette lecture de la situation avait conduit à la fermeture des frontières avec le Rwanda. En 2022, le président Ndayishimiye qui travaillait jusque-là à se rapprocher du Rwanda est revenu sur cette décision, rouvrant à nouveau les frontières. Ce geste d'apaisement n'a été que de courte durée, au regard des derniers développements de l'actualité concernant ces deux Etats.

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Si, le Burundi prête à son voisin des accointances avec RED-Tabara qui commet des attaques meurtrières et des exactions dans le pays, Kigali n'aurait pas apprécié l'envoi de ses troupes pour aider à la lutte contre les rebelles du M23 dans l'Est de la RDC, selon certaines indiscrétions. Quoiqu'il en soit, les deux pays doivent se ménager, dans l'intérêt supérieur de leurs peuples, appelés à cohabiter, à cause de la proximité géographique.

Au-delà des brouilles avec le Rwanda, situation qui pourrit davantage l'atmosphère dans les Grands lacs, le Président Ndayishimiye est garant de la stabilité et de la paix dans son pays. C'est parce que les esprits ne sont pas encore au Burundi qu'un voisin peut s'y inviter, quitte à être accusé à tort ou à raison de soutenir telle ou telle faction. Bien avant son indépendance en 1962, le Burundi a connu plusieurs massacres et la série noire s'est poursuivie, avec une guerre civile qui a fait plus de 260 000 morts entre 1993 et 2004.

Ces périodes sombres constituent de douloureux souvenirs, mais ce pays d'Afrique de l'Est de plus de 11 millions d'habitants ne connait toujours pas la stabilité espérée. Les incidents sont légion, du fait des tensions politiques et des actions des groupes rebelles. Depuis son arrivée au pouvoir, le Président Ndayishimiye qui connait très bien le parcours trouble de son pays s'est montré disposé à dialoguer avec les groupes rebelles, mais sa main tendue n'est visiblement pas la bienvenue. Le groupe RED-Tabara qui ne semble pas reconnaitre son autorité, exige comme préalable à la négociation, des conditions d'organisation d'élections démocratiques, libres et inclusives.

Son parti, le plus dominant au Burundi, le CNDD-FDD est accusé par le RED-Tabara et une frange de Burundais, d'avoir confisqué le pouvoir depuis 2005. En toute circonstance, le gros défi qui s'impose au chef de l'Etat burundais, c'est de travailler à rassembler ses compatriotes divisés au lieu de déployer ses énergies ailleurs. Si tous les Burundais regardent dans la même direction, ce qui n'est pas impossible, aucun mauvais esprit, fut-il un voisin, ne peut semer la zizanie entre eux.

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