Le Nigeria a brillé par sa solidité défensive tout au long de cette CAN 2024. Une force incarnée par son capitaine et défenseur central William Troost-Ekong. Un colosse, non pas aux pieds d'argile, mais aux crampons recyclés, qui défendra les couleurs des Super Eagles contre les Éléphants en finale de la compétition, le 11 février à Abidjan.
Les Super Eagles doivent beaucoup à Victor Osimhen. Mais ils peuvent également remercier leur défenseur central et capitaine William Troost-Ekong, acteur essentiel de leur parcours jusqu'en finale de cette Coupe d'Afrique des nations 2024.
Doté de l'une des meilleurs lignes d'attaque du continent, le Nigeria n'a pourtant pas vraiment été prolifique lors de cette édition ivoirienne, en s'imposant régulièrement sur des scores minimalistes. En revanche, elle a su être particulièrement solide devant son but, un secteur de jeu où on ne l'attendait pas forcément. Ce qui a fait d'elle la meilleure défense du tournoi avec seulement deux buts encaissés avant la finale : un contre la Guinée équatoriale (1-1) en phase de groupes, l'autre contre les Sud-Africains en demi-finale (1-1, 4-2 TAB).
« Je pense que nous avons peut-être été un peu sous-estimés défensivement. Nous avons l'attaque la plus emballante avec le meilleur joueur d'Afrique, notre numéro neuf Victor Osimhen. Ça n'est pas une surprise, mais je sais aussi ce que nos défenseurs peuvent faire », prévenait le capitaine nigérian lors de la phase de poules.
Lancé par une légende nigeriane
Né à Haarlem aux Pays-Bas en 1993, Troost-Ekong grandit d'abord à Amsterdam puis à Londres, en internat à partir de 12 ans. Formé dans les clubs londoniens de Fulham (2008-2010) puis Tottenham (2010-2013), le défenseur a commencé sa carrière professionnelle au FC Groningue (Pays-Bas) avant de voyager dans toute l'Europe en portant les couleurs de La Gantoise (Belgique), Bursaspor (Turquie), Udinese (Italie), Watford (Angleterre) et du PAOK Salonique (Grèce), où il joue actuellement.
International nigerian depuis neuf ans, Troost-Ekong aurait pu logiquement faire le choix de jouer pour les Oranje, l'équipe nationale des Pays-Bas. Mais en 2015, un coup de téléphone a tout changé. « Je rêvais aussi de jouer pour l'équipe nationale néerlandaise, a-t-il admis. Mais quand Stephen Keshi (le sélectionneur nigerian de l'époque) m'a téléphoné, une légende de mon enfance, notamment en tant que défenseur central, j'ai été un peu surpris qu'il me demande de jouer pour le Nigeria. Je n'ai pas eu à y réfléchir à deux fois. »
« Je pense que j'ai dit oui avant même de penser à quoi que ce soit, ou de demander à quelqu'un, parce que ça me semblait la bonne décision, et je ne me suis jamais retourné depuis », poursuit le défenseur qui totalise désormais 70 matches disputés pour les Super Eagles, dont 15 en Coupe d'Afrique des nations.
Un leader tactique pour les Super Eagles
On retient évidemment ses interventions musclées et son duo de golgoths formé avec Calvin Bassey, l'autre homme en forme de la défense nigeriane. Mais Troost-Ekong possède bien d'autres qualités sur le terrain selon Gernot Rohr, sélectionneur du Nigeria entre 2016 et 2021 et actuel entraîneur du Bénin.
« Il a un impact tactique sur les autres, compte tenu de son intelligence. William replace ses coéquipiers, il sait faire respecter la ligne du hors-jeu, faire remonter la défense... En outre, il a une excellente frappe, un jeu long de qualité et un jeu aérien au-dessus de la moyenne », juge le technicien franco-allemand, qui l'a aligné sur la feuille de match 48 fois sur ses 54 matches dirigés avec le Nigeria.
C'est justement Rohr qui lui a confié son premier brassard de capitaine, à l'occasion d'un match de préparation à la Coupe du monde en Pologne, remporté contre Robert Lewandowski et les siens. L'entraîneur se souvient aussi d'un joueur avec la tête sur les épaules, qui avait facilité son arrivée à la tête de la sélection nigeriane. « C'était mon tout premier match avec eux, en septembre 2016 contre la Tanzanie. Nous étions à l'aéroport de Lagos et l'avion qui devait nous emmener à Uyo n'était pas là. On a passé cinq heures ensemble, il m'a donné des informations sur le Nigeria, sur l'équipe. Il m'a introduit, en quelque sorte, avec son récit et ses expériences. C'était pourtant un jeune joueur », d'à peine 23 ans à l'époque.
Engagé sur différents terrains
Troost-Ekong s'est aussi illustré à travers son combat pour l'écologie. Lors de cette édition ivoirienne, il est devenu le premier joueur à arborer des crampons recyclables sur la scène internationale, fabriqués à partir de résidus de bambou et de canne à sucre. « C'est un message qui dépasse ma seule personne. J'essaie de penser aux enfants et à leur avenir. J'ai moi-même trois enfants et j'aimerais qu'ils puissent profiter des mêmes choses que moi actuellement, comme pouvoir jouer au football ou vivre avec un climat qui n'est pas complètement hostile », déclarait-il.
Auteur de son quatrième but marqué en Coupe d'Afrique des nations contre l'Afrique du Sud en demi-finale, le défenseur central est entré dans l'histoire de la sélection nigeriane en égalant le record de son idole et ancien sélectionneur Stephen Keshi. Les deux hommes détiennent désormais chacun le record de buts inscrits en tant que défenseurs centraux dans la compétition.
Lors du match pour la consécration face aux Éléphants, dimanche 11 février, des noms comme Osimhen ou encore Haller seront certainement les plus attendus. Mais comme à son habitude, Troost-Ekong devrait abattre un boulot colossal dans l'ombre, face à une équipe ivoirienne que les siens ont déjà battu en phase de poules (1-0) grâce à un pénalty inscrit par... le capitaine nigerian lui-même.
« Je pense que c'est peut-être la meilleure équipe du Nigeria dans laquelle j'ai joué, avec tout le respect que je dois aux légendes qui ont porté ce maillot », déclarait Troost-Ekong en début de compétition. Il ne lui reste à présent plus qu'une seule étape à franchir pour écrire son histoire avec les Super Eagles.