Sénégal: Election présidentielle au pays - Campagne express pour 19 sprinteurs

Des candidats à l'élection présidentielle du Sénégal, Amadou Ba, Anta Babacar Ngom, Bassirou Diomaye Faye et Idrissa Seck

Cahin-caha, le Sénégal voit réunies toutes les pièces du puzzle d'une élection présidentielle qui aura mis le pays dans tous ses états depuis 36 longs mois. Elle est prévue pour le 24 mars prochain et enfin, les 19 candidats retenus par la Cour suprême peuvent officiellement battre campagne.

Le report n'aura donc duré qu'un petit mois, mais ce sont 30 longs jours dont les Sénégalais attendent l'épilogue, non sans une bonne dose de stress. Le pays, littéralement, est dans une course contre la montre pour organiser la présidentielle afin d'éviter un vide institutionnel. Réussira-t-il à le faire ? Les problèmes qui ont conduit au report du scrutin, notamment les graves tensions politiques et les soupçons de manque d'intégrité de certains juges de la Cour suprême, sont-ils tous réglés ? La question n'est pas superflue quant on sait qu'un candidat à cette présidentielle, Diomaye Faye, était encore en prison à l'ouverture de la campagne et que son état-major essaie d'occuper le terrain en récriminant contre la politique du deux poids, deux mesures.

En tout cas la campagne électorale est officiellement ouverte depuis samedi dernier. Une campagne express, car elle durera à peine 13 jours, soit 8 de moins que les 21 jours francs prévus par la loi. Mais à situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles, car le pire pour le Sénégal, ce n'est pas de vivre une campagne électorale incomplète, mais ce serait que l'élection n'ait pas du tout lieu. C'est dans la même logique que le Conseil constitutionnel a, comme qui dirait, tordu la main à la présidence en outrepassant ses prérogatives et fixant la date du scrutin au 24 mars. Proposition avalisée par Macky Sall sans tambour ni trompette. De fait, le temps est compté pour sauver les apparences de sa sortie de l'arène politique par la grande porte.

En effet, si le calendrier électoral avait été respecté, le successeur du président sénégalais sortant aurait déjà été élu ou alors les candidats seraient en campagne pour le second tour du scrutin. En lieu et place de cela, les électeurs en sont encore à se demander dans quels bureaux de vote ils sont inscrits et qui voter, cela d'autant plus que certains des 19 candidats lâchés dans le sprint final de cette campagne express ne sont pas bien connus des Sénégalais. Du reste, aucun d'entre eux n'aura le temps de parcourir toutes les régions du pays à la rencontre des électeurs.

Mais c'est le moindre mal, car de la tentation de Macky Sall de s'offrir un 3e mandat, à l'atmosphère insurrectionnelle dont a souffert le pays, on peut dire que le Sénégal revient de loin. A la fois chêne et roseau, ses institutions républicaines ont résisté aux bourrasques de plusieurs tempêtes de rue. Elles ont plié sans avoir rompu, nous donnant les exemples édifiants d'un pouvoir judiciaire qui désavoue et l'exécutif et le législatif, obligeant le président à convoquer le corps électoral à une date autre que celle avalisée par sa majorité parlementaire. Par ailleurs, l'armée est restée droite dans ses bottes républicaines quand des voix l'appelaient à prendre ses responsabilités devant la violente répression des manifestations de l'opposition avec des dizaines de morts et des milliers d'emprisonnements à la clé.

Sous nos tropiques, cet alliage de force et de souplesse des institutions républicaines sénégalaises est bon à souligner. Pourvu que le sprint final des candidats lancés dans cette campagne électorale atypique confirme cette belle image d'une démocratie mature, malgré l'iniquité perceptible dans certaines décisions politiques et juridiques qui ont pu faire désespérer de la perpétuation du modèle démocratique sénégalais.

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