Les sénateurs libériens ont voté mardi 9 avril à l'unanimité un texte qui vise à créer un tribunal pour juger les crimes commis lors des deux guerres civiles dans le pays, soit de 1989 à 1996 et de 1999 à 2003. Si les députés avaient déjà voté en faveur de cette demande de longue date de la communauté internationale, le vote du Sénat a été une surprise car de nombreux anciens chefs rebelles ou de guerre sont désormais sénateurs.
La communauté internationale et les victimes réclamaient de longue date un tel tribunal, des demandes jusqu'ici restées ignorées. Mais 20 ans après les faits le président Joseph Boakaï avait annoncé lors de sa prestation de serment en janvier la création d'un office chargé « d'explorer la faisabilité » de ce tribunal. Le mois dernier, le Parlement s'était également prononcé en faveur d'une loi pour sa mise en oeuvre.
Ce vote au Sénat est plus qu'un point d'étape : c'est une petite surprise car d'anciens chefs rebelles ou de guerre ayant été partie aux conflits lors des guerres civiles du Libéria occupent aujourd'hui des hautes fonctions dans le pays.
Exemple avec Prince Johnson, mis en cause dans plusieurs rapports d'enquête. Aujourd'hui sénateur, il avait mis en garde le mois dernier contre « les risques de déstabilisation » d'une telle mesure. Mardi, il s'est pourtant rétracté et a voté le texte de loi qui vise à créer ce tribunal spécial. Si le projet aboutit, il pourrait se retrouver sur le banc des accusés.
Malgré les 250 000 morts et les milliers de victimes encore vivantes, aucun jugement n'a été prononcé dans le pays. Les juridictions libériennes locales ne sont pas habilitées sans le vote d'une loi mettant en place un tribunal spécial. Certains crimes ont toutefois fait l'objet de jugements à l'étranger.
Le parcours législatif de cette création est encore long. Le texte voté au Sénat doit dorénavant repasser devant l'Assemblée nationale qui doit adopter les modifications apportées par les sénateurs. Le texte actuel doit également être soumis à l'approbation du président Joseph Boakaï avant sa rédaction effective. Une fois celle-ci concrétisée, elle devra par la suite et dans un troisième temps être à nouveau débattue et votée par les deux assemblées.