La Banque africaine de développement est la force motrice de l'un des projets énergétiques les plus ambitieux au monde : l'initiative Desert to Power. Elle vise à apporter de l'énergie à l'une des régions les moins développées et les plus marginales du continent.
Cet effort transformateur et audacieux vise à faire de la vaste région sahélienne de l'Afrique, très ensoleillée et qui est l'une des régions les plus vulnérables du monde, une centrale électrique solaire, ciblant 11 pays : Burkina Faso, Tchad, Djibouti, Érythrée, Éthiopie, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Sénégal et Soudan.
En exploitant l'immense potentiel solaire de la région, Desert to Power vise à produire 10 gigawatts d'énergie solaire d'ici 2030, facilitant ainsi l'accès à l'électricité pour 250 millions de personnes.
Ce projet novateur a été conçu par le président de la Banque, Akinwumi Adesina, qui l'a qualifié de « baobab » de la Banque.
« Desert to Power est ce que j'appelle le baobab des projets. Il nécessitera tous nos efforts si nous voulons changer les choses », a-t-il déclaré lors d'une réunion de la COP.
En décembre dernier, la Banque a approuvé le Projet d'interconnexion électrique de 225 kV Mauritanie-Mali et de développement de centrales solaires associées (PIEMM), qui est une opération prioritaire dans le cadre de l'initiative « Desert to Power ». Le projet contribuera à développer le commerce régional d'électricité au Sahel, permettra au Mali d'importer chaque année environ 600 GWh d'électricité provenant de sources d'énergie renouvelables en provenance de Mauritanie et permettra au Mali et à la Mauritanie d'augmenter leur taux national d'accès à l'électricité et d'améliorer la performance de leur sous-secteur de l'électricité en réduisant la consommation de carburant et en arrêtant plusieurs générateurs dont les coûts d'exploitation sont exorbitants, réduisant ainsi les émissions de gaz à effet de serre. À terme, le projet devrait permettre de raccorder 100 000 nouveaux ménages à l'électricité (80 000 en Mauritanie et 20 000 au Mali).
Cette initiative constitue une étape majeure dans la résolution des problèmes critiques d'accès à l'énergie en Afrique et dans la réduction de la dépendance à l'égard des combustibles fossiles tels que le fioul lourd. Ce sont des facteurs clés de la fragilité environnementale dans la région, qui aggravent le réchauffement climatique à l'origine de nombreux événements météorologiques dramatiques qui frappent désormais régulièrement le continent.
La Banque a également réussi à mobiliser des financements climatiques provenant de sources internationales telles que Green Climate et à les combiner avec ses propres ressources pour soutenir l'initiative Desert to Power.
En outre, le Fonds pour l'énergie durable en Afrique (SEFA) de la Banque, le plus grand mécanisme interne de financement mixte de la Banque avec des engagements de plus de 500 millions de dollars de 10 donateurs, notamment le Danemark, les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Italie, la Norvège, l'Espagne, la Suède, l'Allemagne, le Fonds nordique de développement et l'Alliance mondiale pour l'énergie au service des populations et de la planète, fournit des capitaux catalytiques pour des projets du secteur privé dans les pays bénéficiaires de l'initiative Desert to Power et au-delà.
Aujourd'hui, le portefeuille de Desert to Power compte 10 projets d'investissement et plus de 15 opérations d'assistance technique dans 7 des 11 pays d'opération.
L'initiative a été saluée par des décideurs politiques, des diplomates, des politiciens et des professionnels des médias.
Financial Times (FT), journal britannique faisant autorité, l'a récemment saluée comme un exemple de projets de développement imaginatifs dont l'Afrique a besoin pour impliquer ses populations et prévenir les troubles régionaux exploités par des acteurs antiétatiques.
Dans un article approuvé par son comité de rédaction, FT a appelé les gouvernements occidentaux à soutenir le projet ainsi que d'autres initiatives similaires visant à améliorer la vie quotidienne des populations. Le développement apporte la stabilité, a-t-il soutenu.
L'initiative s'inscrit dans le cadre d'un effort plus large visant à faire évoluer l'Afrique vers des sources d'énergie plus durables, contribuant ainsi à atténuer la déforestation et ses impacts associés.
En Afrique, la déforestation est un problème majeur, une superficie équivalente à celle de la Suisse étant déboisée chaque année, principalement à des fins de cuisson et de chauffage. Cette perte de forêts exacerbe les tempêtes de poussière, perturbe le régime des pluies et accélère la désertification, faisant peser de graves menaces sur la biodiversité et les climats locaux.
L'investissement de la Banque dans l'énergie solaire est crucial pour plusieurs raisons. Premièrement, une énergie fiable et abordable est essentielle pour réduire la dépendance au charbon de bois, qui est non seulement l'une des principales causes de la déforestation, mais aussi une option coûteuse pour de nombreux ménages. La croissance démographique rapide du continent a intensifié les besoins en énergie, avec une population qui a doublé et qui double encore pour atteindre au moins 1,2 milliard d'habitants, dont près de la moitié n'a pas accès à l'électricité.
Bien que des projets de reforestation soient en cours dans des pays comme le Kenya, le Congo, Madagascar et le Malawi, le taux de perte de forêts dépasse de loin ces efforts. Le besoin immédiat est d'électrifier rapidement le continent, en choisissant des sources d'énergie durables telles que le solaire, l'éolien et l'hydroélectricité plutôt que des combustibles fossiles plus nocifs.
Le potentiel de l'Afrique en matière d'énergies renouvelables est vaste, mais largement inexploité. Le continent dispose d'une capacité solaire presque illimitée (11 TW), d'importantes ressources hydroélectriques (350 GW, dont seulement 5 à 6 % sont actuellement exploités), de l'énergie éolienne (110 GW, dont seulement 2 % sont utilisés) et de sources d'énergie géothermique (15 GW).
Malgré ce potentiel, 600 millions de personnes en Afrique vivent sans accès à l'électricité. Le continent ne représente que 6 % de la demande mondiale d'énergie et un peu plus de 3 % de la demande d'électricité. Cela souligne l'importance d'accroître les investissements dans les énergies renouvelables pour répondre aux besoins énergétiques du continent de manière durable.
De 2016 à 2022, la Banque africaine de développement a approuvé des engagements énergétiques d'un montant de 8,3 milliards de dollars, dont 87 % sont consacrés à des projets d'énergie renouvelable. Ces investissements ont déjà permis de générer 3,4 GW d'électricité, dont 2,6 GW provenant de sources renouvelables. La Banque élabore également une stratégie africaine des minéraux verts afin de tirer parti de l'abondance de minéraux critiques du continent, tels que le cobalt, le manganèse et le platine, qui sont essentiels pour faciliter la transition énergétique dans toute la région du Sahel et changer à jamais le visage de l'une des régions les plus défavorisées d'Afrique.