Congo-Kinshasa: La Croix rouge est débordée par le nombre de déplacés

"A chaque nouveau déplacement, les populations sont rendues encore plus vulnérables", alerte dans le communiqué la cheffe de la sous-délégation du CICR à Goma

Le CICR doit suspendre son assistance à des dizaines de milliers de personnes dans le Nord-Kivu. L'Église et des organisations locales tentent de prêter main forte.

Dans la province du Nord Kivu, dans l'est de la République démocratique du Congo, des milliers des déplacés internes, qui s'étaient installés à Kanyabayonga, fuyant l'avancée des rebelles du M23 dans le Rutsuru, ont dû reprendre le chemin de l'exode, vers les cités de Kaina, Kirumba et Luofu.

Depuis plusieurs jours, l'armée congolaise et ses milices alliées affrontent les rebelles du M23 qui tentent d'entrer dans la cité de Kanyabayonga, à l'entrée sud du territoire de Lubero.

Cette situation complique aussi les actions humanitaires sur place. Hier, dans un communiqué de presse, le Comité international de la Croix rouge a annoncé la suspension de son assistance en vivres auprès de 58.000 déplacés, alors que seulement la moitié d'entre eux a pu recevoir de l'aide.

Le désespoir, l'angoisse et la peur du lendemain : ce sont les mots qui sortent de la bouche de ces déplacés qui arrivent par milliers dans cette cité de Kirumba, située à 27 kilomètres de Kanyabayonga.

De nombreuses personnes ont commencé à fuir à pied depuis dimanche dernier (02.05).

A Kinshasa, "ils ne voient pas notre souffrance"

Furaha Abimana vient à peine d'arriver à Kirumba, ce mercredi. Originaire de Rutsuru, elle en est à son troisième exil depuis le début de l'offensive du M23.

"Nous sommes encore en fuite, on était partis de Rutsuru pour Kiwanja, après on s'était déplacés pour Kanyabayoga, et nous voici maintenant à Kirumba, explique-t-elle. On nous fait souffrir vraiment ! Je ne sais pas où dormir, on n'a pas le nécessaire pour vivre ici."

Alice, pour sa part, tient des propos durs envers les dirigeants du pays. Après la longue distance qu'elle vient de parcourir à pied entre Kanyabayonga et Kirumba, elle et ses enfants sont épuisés.

"Il faut que le président finisse cette guerre, s'exclame-t-elle. Nous, on ne fait pas de la politique, nous sommes des agriculteurs, mais nous voilà maintenant logés dans des églises, loin de nos maisons. Nous avons marché à pied avec des enfants qui sont très fatigués et d'autres déshydratés. Nos pieds sont en train de gonfler. Nous n'avons pas de médicaments, pas de nourriture. Cela fait deux ans que nos enfants ne vont plus à l'école, chaque jour nous sommes obligés de fuir. Pourtant, nous avons voté pour un président et des députés, mais ils ne voient pas tous notre souffrance."

La population locale s'organise

Les églises et d'autres structures locales s'organisent sur place pour accueillir et apporter de l'aide aux déplacés qui ont repris le chemin de l'exode. Selon le père Roger Wasukundi, curé de la paroisse de Luofu, près de Kanyabayonga, les communautés locales tentent de palier à l'absence des ONG.

"Ici nous sommes envahis par un grand nombre de déplacés, explique-t-il. Certains logent dans nos salles de classe, d'autres dans les locaux de la paroisse. Localement, presque chaque famille accueille des déplacés. Nous avons lancé une campagne de solidarité auprès des paroissiens. On a demandé à ceux qui ont quelque chose de l'amener à la paroisse. Cela pourra plus ou moins aider ceux qui ne sont pas dans des familles d'accueil. Il y a des vieilles personnes, des enfants, même des malades."

L'administrateur du territoire de Lubero invite la population à la vigilance et à faire confiance à son armée.

Ce lundi (03.06), deux obus tirés par les rebelles du M23 sont tombés à Kanyabayonga. Un enfant est mort et deux autres personnes ont été blessées, confirme l'administrateur de Lubero.

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