Face à la persistance de la crise qui prévaut entre Niamey et Cotonou, deux anciens présidents du Bénin ont entrepris une démarche de réconciliation entre les deux capitales.
Il s'agit de Nicéphore Soglo et Boni Yayi qui ont fait le déplacement de Niamey, le 24 juin dernier, pour rencontrer les autorités nigériennes à l'effet de trouver une solution. Une mission d'autant plus noble qu'elle se veut une contribution, selon les services de communication des deux personnalités politiques, visant « à rétablir les relations cordiales et fraternelles » entre les deux pays voisins d'Afrique de l'Ouest.
Et pour l'honneur des deux médiateurs, l'histoire retiendra que leur acte est l'une des premières initiatives émanant d'une tierce partie, visant à dénouer la crise politique qui pollue les relations entre deux pays aux intérêts économiques imbriqués et qui ont tout à gagner de l'entente cordiale plutôt que de la mésentente de leurs dirigeants. C'est dire si dans leur brouille, les autorités béninoises et nigériennes ne sont pas abandonnées à leur sort.
Et le jeu de la médiation des ex-présidents Soglo et Yayi en vaut d'autant plus la chandelle qu'au-delà des relations de bon voisinage, une normalisation de la situation impacterait positivement les conditions de vie des populations de part et d'autre de la frontière.
Dans cette affaire, il est difficile de juger de la bonne foi des protagonistes
C'est dire la nécessité, pour les maîtres respectifs de Niamey et de Cotonou, de jouer balle à terre. C'est dire aussi l'importance de la mission de bons offices des deux anciens locataires du palais de la Marina qui ont, pour eux, leur expérience d'anciens chefs d'Etat et leur volonté de faire bouger les lignes dans le sens de l'apaisement.
La question qui se pose est la suivante : quelles chances de succès pour ces pompiers de service ? La question est d'autant plus fondée que la partie est loin d'être gagnée d'avance. Et cette médiation ne s'annonce pas comme une sinécure au regard du climat de méfiance qui s'est installé entre les exécutifs des deux pays.
Comment peut-il en être autrement quand l'ombre de la France dont les relations se sont détériorées avec le Niger depuis l'arrivée des militaires au pouvoir à Niamey, continue de planer sur les relations entre les deux voisins ouest-africains ? Niamey ayant notamment accusé ouvertement Cotonou d'abriter des bases françaises où s'entraîneraient des terroristes en vue de déstabiliser le Niger.
Des accusations balayées du revers de la main par le Bénin qui se dit prêt à la transparence pour prouver son innocence. Comment peut-il encore en être autrement quand les protagonistes semblent engagés dans un bras de fer aux allures de jeu d'échec, qui répond plus des ego des princes régnants que des priorités de leurs deux peuples qui paient un lourd tribut à une situation qui rend leur quotidien encore plus difficile ?
Toujours est-il que le constat aujourd'hui est qu'autant le Bénin multiplie les initiatives en vue de la réouverture de la frontière nigérienne pour insuffler une nouvelle dynamique à son économie, autant Niamey semble dans des considérations autres pour ne pas dire dans l'attente davantage de gages avant toute décision de normalisation de la situation avec son voisin.
L'initiative des anciens présidents Nicéphore Soglo et Boni Yayi mérite d'être soutenue
C'est dire la délicatesse de la mission du duo d'anciens présidents béninois en terre nigérienne. Et leur marge de manoeuvre semble d'autant plus petite que l'on se demande s'ils pourront prendre des engagements au nom du président Patrice Talon. Et puis, dans cette affaire, il est difficile de juger de la bonne foi des protagonistes quand les paroles des uns et des autres, ne s'accompagnent pas d'actes nécessaires à la désescalade.
C'est à se demander même, si le président de la transition nigérienne ne garde pas une rancune tenace contre son homologue béninois, depuis les sanctions de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) sur fond de menaces d'intervention militaire de l'organisation communautaire pour rétablir le président Mohamed Bazoum dans son fauteuil. Des mesures punitives contre Niamey qui ont été levées dans les conditions que l'on sait, sans que cela ne contribue, malheureusement, quelque quatre mois après, à la décrispation entre les deux voisins.
Autant dire que le mal est profond et qu'il y a urgence à agir. C'est dire aussi combien l'initiative des anciens présidents Nicéphore Soglo et Boni Yayi est louable et mérite d'être soutenue.
Tout le mal qu'on leur souhaite, c'est que leur médiation puisse porter fruit à l'effet de rabibocher les deux chefs d'Etat voisins dans l'intérêt supérieur des deux peuples. En tout état de cause, Niamey ne paraît qu'une étape et on attend de voir ce qui sortira de leur rencontre avec le Général Tchiani et ses compagnons d'armes.