Afrique: Forum sur les migrations en Libye - De la nécessité de changer de paradigme

Forum International sur la Migration Transméditerranéenne
18 Juillet 2024
analyse

Le 17 juillet dernier, s'est tenu à Tripoli, en Libye, un forum sur les migrations, qui a regroupé des participants représentant une trentaine de pays et institutions. Au nombre des personnalités présentes à cette rencontre dans la capitale libyenne, la cheffe du gouvernement italien, Giorgia Meloni.

Mais aussi le président tchadien, Mahamat Idriss Deby Itno qui, en marge de ce forum, a signé avec Tripoli, un accord pour le recensement des ressortissants tchadiens présents au pays de Kadhafi et pour des rapatriements volontaires.

Mais si la présence du numéro un tchadien semble tenir davantage de la volonté de sécuriser son pouvoir en raison de la présence peu rassurante d'une forte colonie de mouvements politico-militaires tchadiens comptant de milliers de combattants en Libye, pour les participants au forum, il s'agit de trouver des solutions innovantes à la crise migratoire qui donne des insomnies aux dirigeants des pays du vieux continent. Pour eux, le fléau pourrait trouver sa solution dans la mise en oeuvre de projets de développement en Afrique.

En un mot comme en mille, ils misent sur le développement dans les pays africains de départ pour atténuer les effets néfastes de l'immigration clandestine en Europe.

C'est le manque de perspectives qui pousse bien des jeunes Africains à aller à la recherche de l'eldorado en Europe

Toujours est-il que la Libye étant l'un des principaux pays de transit pour les candidats à la traversée de la Méditerranée depuis la chute du colonel Kadhafi dans les conditions que l'on sait, son choix ne pouvait pas mieux tomber pour cette rencontre de haut niveau qui mobilise les énergies de l'autre côté de l'océan Atlantique.

Tout comme la présence de la cheffe de l'Exécutif italien dont le pays est l'un des points de chute majeurs de ces migrants en quête d'un mieux-être, ne paraît pas anodine. C'est dire l'importance de ce forum de Tripoli qui comptait d'éminentes personnalités au sein des participants dont le credo est de favoriser la création d'emplois en Afrique pour retenir la jeunesse du continent chez elle.

Même si l'objectif premier, pour l'Europe, est de se protéger des vagues de migrants subsahariens qui constituent un véritable boulet au pied du vieux continent, il n'en demeure pas moins que ce forum est une initiative qui, si elle est bien menée, pourrait valoir des satisfactions en terme de réduction du chômage en Afrique.

Car, il est bien connu que c'est le désoeuvrement et le manque de perspectives qui poussent bien des jeunes Africains à aller, souvent au péril de leur vie, à la recherche de l'eldorado en Europe. C'est pourquoi il faut souhaiter que les fruits de cette belle initiative puissent tenir la promesse des fleurs. Et que le groupe de travail chargé de définir les projets prioritaires dans les pays africains de départ des migrants, puisse avoir la bonne inspiration.

Mais en attendant d'en savoir davantage sur la feuille de route et le budget de ce programme ambitieux, un changement de paradigme s'impose. D'abord, au niveau des dirigeants africains qui doivent montrer beaucoup plus d'engagement en faveur de la jeunesse en travaillant à créer le cadre et les conditions de son épanouissement.

Le salut de l'Europe viendra du développement de l'Afrique

Cela passe non seulement par l'adoption d'une politique qui prend en compte leurs préoccupations, mais aussi par une gestion rigoureuse des projets selon les règles de la bonne gouvernance. Ce qui n'est pas toujours le cas en Afrique où pullulent les éléphants blancs quand les fonds de certains projets ne sont pas purement et simplement détournés à d'autres fins s'ils ne finissent pas dans les poches de puissants du moment ou de leurs comparses.

Encore faudrait-il que ces projets cadrent véritablement avec les réalités africaines et soient adaptés aux besoins des populations bénéficiaires. Ensuite, le changement de paradigme s'impose au niveau des puissances occidentales qui ne sont pas loin de ressentir, à travers ces mouvements migratoires de jeunes Africains, les effets boomerang de leur politique.

Car, elles ne peuvent pas continuer à piller le continent noir et travailler à le maintenir dans une situation de dépendance permanente et espérer la fin des migrations. C'est dire si le salut de l'Europe viendra du développement de l'Afrique. Cela passe d'abord par le rééquilibrage des termes de l'échange à l'effet de briser progressivement le paradoxe de ce continent aux immenses richesses mais dont les populations croupissent dans la misère crasse.

En un mot, il faut payer les matières premières à leur juste prix. Il faut aussi éviter la politique du saupoudrage à travers le financement de projets éphémères en Afrique. Autrement, tant que le berceau de l'humanité continuera de se présenter comme le condensé de toutes les calamités de la terre, avec ses hordes de gueux et de mendiants sans perspectives d'avenir, l'Occident restera un objectif pour cette jeunesse africaine qui préfère mourir en bravant le désert et la mer, que de mourir assise.

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