Niger: Départ du dernier contingent americain du pays - Niamey doit s'assumer pleinement

Le général de brigade Moussa Barmou, commandant des forces d’opérations spéciales du Niger, avec le lieutenant-général Jonathan Braga, commandant des opérations spéciales de l’armée américaine, à la base aérienne 101 au Niger, le 12 juin 2023. (photo d'illustration)

Cinq mois après la dénonciation de l'accord militaire avec Washington par le régime de Niamey, l'armée américaine a achevé le retrait de ses soldats du Niger.

En effet, le dernier contingent qui se trouvait sur la base d'Agadez, a plié bagage le 5 août dernier, soit plus d'un mois avant le deadline du 15 septembre 2024 que l'US Force s'était fixé pour quitter le pays.

C'est donc un retrait maîtrisé en douceur et en bon ordre qui s'est achevé par le transfert des installations de la base à l'armée nigérienne, le 5 août dernier, au cours d'une cérémonie qui a connu la présence d'officiers des deux pays. Tout est bien qui finit bien pour l'armée américaine dont le retrait n'a pas donné lieu à des tensions avec les autorités du Niger comme on l'a vu avec l'armée française, priée de débarrasser le plancher quelques mois plus tôt.

Toujours est-il qu'avec ce départ des derniers GI'S, c'est douze années de présence de l'armée américaine au Sahel et de coopération militaire très rapprochée entre Washington et Niamey, qui prennent ainsi fin.

Il revient à Tiani et ses frères d'armes de travailler à combler le vide laissé par les soldats américains

Une coopération militaire entamée en 2012 sous le président Mahamadou Issoufou qui en avait signé l'accord, et dénoncée en mars 2024 par le Général Tiani et ses frères d'armes dans un contexte de lutte contre le terrorisme qui peine à produire des résultats probants. Et ce, malgré la présence des forces de puissances occidentales engagées dans la lutte contre les groupes armés terroristes.

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Au demeurant, c'est, mutatis mutandis, quasiment les mêmes raisons qui ont amené les tombeurs de Mohamed Bazoum, à demander le départ des troupes françaises dont le retrait, achevé en décembre 2023, marquait la fin de dix années de présence militaire au Sahel, après leur renvoi successivement du Mali et du Burkina Faso.

Deux pays du Sahel confrontés, comme le Niger, à l'hydre terroriste qui ne cesse d'étendre ses tentacules au point d'obliger ces pays à adopter une nouvelle stratégie de défense qui les a amenés à se rapprocher de la Russie au détriment des partenaires traditionnels. Pour en revenir au Niger, maintenant que les troupes internationales se sont retirées du pays, Niamey doit s'assumer pleinement.

L'occasion est d'autant plus belle que le retrait de ces troupes étrangères du pays et la reprise en main de la situation par l'armée nigérienne, sonne comme un air de souveraineté retrouvée. C'est dire combien le Général Tiani et ses frères d'armes devront retrousser leurs manches pour travailler à relever le défi sécuritaire qui reste entier un an après leur arrivée au pouvoir et malgré leurs efforts, dans un contexte où ils devaient faire face aux sanctions internationales suite au coup d'Etat du 26 juillet 2023 qui a mis fin au régime du président Mohamed Bazoum dans les conditions que l'on sait.

Et c'est peu dire que la nature ayant horreur du vide, il leur revient de travailler à combler le vide laissé par les soldats américains pour éviter que l'ennemi n'en profite pour reprendre du poil de la bête, ou que leurs compatriotes n'en viennent à regretter le départ de ces derniers.

Son retrait qui ne s'est pas fait de gaieté de coeur, reste, quoi qu'on dise, un coup dur pour Washington

Un défi immense, à l'image de la taille du pays où les rébellions armées du Nord restent autant une préoccupation que le terrorisme qui continue d'endeuiller des populations innocentes. En tout état de cause, c'est à l'aune des résultats sur le terrain et du retour de la paix, que le Comité national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) sera jugé par les Nigériens qui lui ont traduit un soutien indéfectible dans sa lutte pour l'émancipation du pays.

Autant dire qu'il faut maintenant gagner la guerre contre le terrorisme pour faire taire définitivement les mauvaises langues. Quant à l'armée américaine, tout porte à croire que son retrait qui ne s'est pas fait de gaieté de coeur, reste, quoi qu'on dise, un coup dur pour Washington qui avait misé sur son ancrage au Niger pour installer une importante base de drones à Agadez.

Non seulement pour lutter contre les djihadistes dans la région, mais aussi pour se positionner face à son légendaire rival russe. Et maintenant que sa présence militaire est remise en cause, le retrait de ses soldats presque sur la pointe des godasses, l'oblige à réadapter sa stratégie pour garder une présence dans cette partie de l'Afrique.

Cela est d'autant plus vrai que le divorce entre Niamey et les puissances occidentales que sont la France et les Etats-Unis, s'est suivi d'un rapprochement des nouvelles autorités de Niamey avec Moscou. Et ce, dans le sillage des deux autres pays de l'Alliance des Etats du Sahel (AES) que sont le Mali et le Burkina Faso, et dans une volonté de diversification des partenaires pour mieux faire face aux défis de l'heure. Tout le mal qu'on leur souhaite, c'est de réussir ce pari qui est, pour l'instant, loin d'être gagné d'avance.

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