Togo: Appel à la libération de prisonniers politiques - Faure se montrera-t-il bon prince ?

Nathaniel Olympio du front «Touche pas à ma Constitution» qui a lancé une action, ce mardi 13 août pour soutenir les prisonniers politiques au Togo.

Au Togo, une coalition de partis politiques et d'organisations de la société civile a annoncé, le 12 août dernier à Lomé, la capitale, le lancement, dans les semaines à venir, d'une campagne de sensibilisation visant à exiger la libération des prisonniers politiques.

Et ce, à travers des meetings, des sit-in, des plaidoyers qui seront organisés à travers le pays, au cours de cette campagne de sensibilisation où le porte-à-porte et les distributions de tracts tiennent une bonne place dans la stratégie du Front. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'après avoir échoué à empêcher, en avril dernier, le « coup d'Etat constitutionnel », pour reprendre ses propres termes, qui a fait basculer le pays dans un régime parlementaire dans les conditions que l'on sait, le Front « Touche pas à ma Constitution » n'abandonne pas le combat au Togo.

Et cette campagne « zéro prisonniers politiques », en plus d'être une interpellation pour le gouvernement, semble procéder de la volonté du Front, de ne pas abandonner à leur triste sort, ses militants qui ont été arrêtés lors des manifestations contre le régime.

Faure Gnassingbé reste le seul maître du jeu politique au Togo

C'est dire si au-delà des déclaration de ses leaders, ce mouvement se veut un geste de réconfort moral pour ces militants embastillés que les conférenciers du jour ont présentés comme « des combattants blessés que l'on n'abandonne pas sur le champ de bataille ». La cause est certes noble pour le Front qui se sent quelque part responsable du sort de ces militants dont certains sont privés de liberté depuis plusieurs années.

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Mais l'opposition sera-t-elle entendue par le pouvoir de Lomé ? Rien n'est moins sûr. Surtout si cette campagne qui prévoit, entre autres actions, des meetings et des sit-in, s'inscrit dans la logique d'un bras de fer visant à faire plier le pouvoir. Et si cela venait à être le cas, il faut craindre que le mouvement ne produise l'effet contraire si le pouvoir doit y trouver des raisons de procéder à d'autres arrestations qui iront grossir les rangs des prisonniers.

Et puis, connaissant le régime de Lomé, on ne voit pas comment ces manifestations, à elles seules, pourraient le contraindre à revoir sa copie, encore moins à se plier à la volonté de l'opposition. Toujours est-il que si la rue pouvait changer les choses au Togo, il y a longtemps que l'opposition qui cherche à mettre fin à six décennies de règne de la dynastie Gnassingbé, se serait débarrassée de l'héritier de la célèbre famille présidentielle de la région de Kara.

C'est pourquoi l'on est porté à croire que plutôt que de chercher à forcer la main à l'homme fort de Lomé, la démarche de l'opposition vise plus à attirer l'attention de l'opinion publique sur le sort et les conditions peu enviables de détention des prisonniers. C'est dire si en dépit de toute l'agitation de l'opposition et de la société civile, Faure Gnassingbé reste le seul maître du jeu politique au Togo. Se montrera-t-il alors bon prince ? Là est toute la question.

Faure Gnassingbé gagnerait à saisir la balle au bond pour agir en bon père de famille au Togo

Mais au-delà de toutes considérations, cette campagne de ses adversaires peut être une occasion pour lui de soigner l'image de son pouvoir, en jouant la carte de la décrispation et en se posant en artisan de la paix. Il a d'autant plus intérêt à le faire qu'après avoir travaillé à assurer ses arrières et à consolider son pouvoir dans les conditions que l'on sait, le défi majeur qui reste le sien, est celui de la réconciliation entre les fils et les filles du Togo.

A ce titre, sachant que tout est accompli au sommet de l'Etat pour lui, Faure Gnassingbé gagnerait à saisir la balle au bond pour agir en bon père de famille au Togo. Bien entendu, en y mettant la manière pour ne pas donner l'impression de céder à une quelconque pression encore moins au diktat de ses contempteurs. En tout cas, ce serait un bien pour un bien, aussi bien pour l'opposition que pour le pouvoir qui aurait bien aimé se passer de la mauvaise publicité qu'offre cette campagne de l'opposition.

Toujours est-il que si la démocratie doit avoir un meilleur visage au Togo, cela passera par des concessions de part et d'autre. En tout état de cause, autant on attend de voir si les populations marqueront leur adhésion à cette campagne, autant on attend de voir si ce mouvement laissera le pouvoir de marbre ou si « Faure le fort », se montrera sensible à la cause.

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