Un nouveau fichier national doit recenser les personnes liées à des activités terroristes. Il pourrait toutefois servir d'alibi pour restreindre les libertés.
C'est une ordonnance prise par le chef de la transition, le général Abdourahamane Tiani, qui vise, selon les autorités, à renforcer les mesures delutte contre le terrorisme.
Selon cette ordonnance, les personnes ou entités qui seront inscrites sur ce fichier, verront automatiquement leurs avoirs financiers gelés, seront interdites de se déplacer à l'intérieur du pays ou de voyager à l'étranger.
Elles pourraient également être déchues de leur nationalité nigérienne par décret, en cas de condamnation à une peine d'emprisonnement d'au moins cinq ans.
Les faits susceptibles de donner lieu à l'inscription au fichier comprennent, entre autres, la commission, la planification, le soutien ou la facilitation des actes terroristes, une menace pour la stabilité de la nation ou le port d'armes contre l'Etat.
"Une bonne chose"
Au sein des organisations proches de la transition, on salue l'instauration d'un tel fichier.
"Nous avons depuis longtemps demandé que l'Etat sévisse contre le groupuscule d'individus qui s'est mis en marge de la lutte héroïque du peuple nigérien pour affirmer sa souveraineté et son indépendance et c'est pour cela que nous saluons cette décision", dit Ibrahim Bana, secrétaire à la communication du Front patriotique pour la souveraineté du Niger.
Même analyse du côté de Ibrahim Namaiwa, membre du Mouvement pour la promotion de la citoyenneté responsable.
"Nous sommes dans un contexte de guerre et quand on est en guerre, on est obligé de prendre des mesures pour prévenir et réprimer des actes tendant à compliquer davantage la lutte ou les efforts des forces de défense, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme."
"On pourra facilement être en prison"
Mais l'inscription sur ce fichier peut aussi être consécutive d'actes plus vagues, comme l'intelligence avec une puissance étrangère ou le fait d'ébranler la fidélité des armées".
Ce qui fait redouter un musèlement encore plus sévère des libertés, selon Mamane Kaka Touda de Alternative Espace Citoyen.
"Prendre des mesures ou des dispositions pour prévenir ou lutter contre le terrorisme, personne n'est contre cela. Mais je pense que le contenu de cette ordonnance, avec des notions telles que la diffusion de données ou propos de nature à troubler l'ordre public, ce sont des notions qu'on a déjà connues. Il suffit par exemple d'écrire sur Tweeter ou Facebook et tu peux facilement être pris et jeté en prison",
Les défenseurs des droits de l'Homme se montrent sans cesse préoccupés par le rétrécissement des libertés dans les pays du Sahel.
Des libertés déjà mises à mal au Burkina Faso, où une douzaine de journalistes et d'activistes ont été réquisitionnés sur le front, après avoir dénoncé les dérives du pouvoir militaire de transition.