Une motion de censure contre le gouvernement dirigé par le Premier ministre Ousmane Sonko est désormais sur la table du président de l'Assemblée nationale, Amadou Mame Diop.
Elle a été déposée par le groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar (BBY) hier, mardi 3 septembre. Après le rejet du projet de loi constitutionnelle portant suppression du Hcct et du Cese, l'opposition trace la voie pour faire tomber le gouvernement installé il y a moins de quatre mois. Une tâche qui ne sera pas de tout repos quand on sait qu'au Sénégal, de l'indépendance à nos jours, une seule motion de censure a prospéré.
La majorité passe à l'acte ! Comme annoncé avant-hier, par le président du groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar, Abdou Mbow, lors de la séance plénière pour le vote du projet de loi portant dissolution du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT) et du Conseil économique, social et environnemental (CESE), les députés de ladite coalition ont déposé hier, mardi 3 septembre, une motion de censure, sur la table du président de l'Assemblée nationale, Amadou Mame Diop.
C'est l'article 86 de la Constitution qui confère, en effet, aux parlementaires le pouvoir de déposer une motion de censure qui, une fois adoptée par la majorité, entraînera la démission du gouvernement, dirigé par le Premier ministre, Ousmane Sonko.
Ce dépôt de la motion de censure va ainsi permettre de convoquer les députés pour une session extraordinaire de l'Assemblée nationale qui sera la troisième pour cette année 2024, après celles liées à la modification de son règlement intérieur et au projet de loi portant dissolution du HCCT et du CESE. Les députés de l'opposition accusent Ousmane Sonko de vouloir bouder sa Déclaration de politique générale (DPG). Lui qui avait pourtant exigé la révision du règlement intérieur de l'Assemblée nationale votée depuis le 16 août pour pouvoir le faire.
Pour rappel, des motions de censure ont eu à être déposées contre des gouvernements dans le passé. En décembre 2022, le groupe parlementaire Yewwi Askan Wi (YAW) l'avait fait contre le Premier ministre, Amadou Ba, après sa Déclaration de politique générale. Cette motion de censure avait été rejetée pour n'avoir recueilli que 55 voix contre, sur un total de 165 députés.
«Cette motion de censure se présente comme une motion de défiance à l'égard du Premier ministre qui n'a pas voulu poser la question du vote de confiance des députés, au terme de sa déclaration de politique générale. Il y va de la crédibilité de l'institution parlementaire. Le refus d'organiser un vote de confiance au terme de la déclaration de politique générale prononcée par le Premier ministre peut être assimilé à une volonté politique de bloquer la démocratie», avait expliqué le président du groupe parlementaire de YAW d'alors Birame Soulèye Diop, actuel ministre de l'Energie, du Pétrole et des Mines.
En 2012 également, des députés de l'opposition avaient déposé une motion de censure pour contraindre à la démission le Premier Ministre Abdoul Mbaye qu'ils accusaient d'avoir « blanchi » de l'argent de l'ex-président tchadien Hissène Habré lorsqu'il est arrivé en exil à Dakar en 1990. La motion de censure n'était pas passée puisqu'elle n'avait recueilli que 14 votes alors qu'il en fallait 76 pour la faire passer.
Parmi les quelques épisodes de motions de censure au Sénégal, il s'y ajoute celles contre le Premier ministre Mamadou Lamine Loum en 1998 et le gouvernement de Mamadou Dia en 1962, seule à avoir abouti. Il s'en est suivi une crise ayant abouti à l'installation d'un régime présidentiel voire hyper-présidentialiste.