Le garde des sceaux, ministre de la justice, Me Ousmane Diagne, a installé hier, mardi 17 septembre les magistrats qui composent le pool judiciaire financier. Au nombre de vingt-sept, ils sont chargés de traquer les biens supposés mal acquis.
On peut considérer que la traque des biens supposés mal acquis annoncée par le Premier ministre, Ousmane Sonko, lors de la réception des agents de la Primature en début septembre, est lancée. Le garde des Sceaux, ministre de la Justice, Ousmane Diagne, a installé hier, mardi 17 septembre, les vingt-sept (27) magistrats qui composent ce pool judiciaire financier. La juridiction répond au besoin de, « réprimer les infractions à caractère économique et financière», dit le ministre de la justice.
Ce pool financier institué au sein de la Cour d'appel et du tribunal de grande Instance hors classe de Dakar est ajoute-t-il, « une réponse aux nombreux défis posés par l'exigence citoyenne de redevabilité, la mondialisation de l'économie, les flux rapides de capitaux, le développement des technologies de l'information et de la communication, ainsi que les multiples réseaux criminels qui ne connaissent pas de frontières et ne sauraient donc être démantelés que par des mécanismes judiciaires adaptés ».
Le pool financier s'inscrit en partie dans la même perspective que les autres organes de lutte contre la délinquance financière comme l'ancienne Cour de répression de l'enrichissement illicite (Crei), la Cour des comptes, l'Inspection générale d'Etat et l'Office national de lutte contre la fraude et la corruption et la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif).
Me Ousmane Diagne l'explique en ces termes : « la loi sur le pool judiciaire financière s'inscrit dans la même dynamique, en ce qu'elle hérite des dispositions pertinentes de la loi relative à la CREI, prend en compte les critiques formulées contre celle-ci et intègre les engagements internationaux d'autres pays en matière de lutte contre les pires formes de criminalité transnationales organisées ». Cependant précise-t-il, « le pôle judiciaire financier allie les besoins d'efficacité dans la répression et l'efficience dans la gestion des ressources humaines.
Il ne se limite pas seulement à remplacer la CREI, mais se veut plus innovante et conforme aux exigences du moment ». Le garde des sceaux rappelle aussi que la juridiction, « dispose d'un domaine de compétences plus élargi. En ce sens, outre l'enrichissement illicite, le pôle prend en compte d'autres incriminations telles que la corruption et pratiques assimilées, les détournements, escroqueries et soustractions de deniers publics, le faux monnayage, les infractions liées aux technologies de l'information et de la communication, les infractions liées à la réglementation des marchés publics, piraterie maritime, financement du terrorisme, le trafic de migrants, les infractions liées à la réglementation bancaire ».
Pour certaines de ces infractions, le pool partage la compétence avec les juridictions de droit commun et, pour d'autres, il l'exerce de manière exclusive. Le garde des sceaux, informe en outre que, « des mécanismes sont aménagés pour prévenir ou résoudre les éventuels conflits de compétences ». En invitant les magistrats nommés à ce pool à la culte de l'excellence, le ministre de la justice promet un accompagnement sans faille de l'autorité.
« L'État, de son côté, ne ménagera aucun effort pour vous mettre dans les conditions optimales de performance et d'épanouissement professionnel. Les moyens appropriés seront déployés, au besoin, en rapport avec les partenaires au développement ».
Le procureur général, Mbacké Fall, appelle le pool financier à la probité et la vérification
« La mise en place du pool judiciaire financier vient affirmer au plan local, la volonté de lutter plus efficacement contre l'impunité des crimes et délits à caractère économique ou financier », trouve le procureur Général près de la cour d'Appel de Dakar, Mbacké Fall. Mieux ajoute-t-il, « la création d'un pool financier va en droit ligne avec le respect des engagements découlant des conventions internationales signées et ratifiées par les États partis ».
S'adressant aux magistrats du dit pool, Mbacké Fall les exhorte, « à faire leur travail conformément à la loi, mais dans le respect de la dignité de la personne humaine et des droits de la défense ». Il les appelle aussi, « à garantir le respect des secrets des enquêtes et le respect de l'instruction pour éviter de porter atteinte à l'honorabilité des personnes suspectées mais toujours présumés innocentes tant que le tribunal compétents et impartial ne leur aura pas déclaré coupables sur la base d'éléments de preuves apportées et discutées au cours des débats d'audience ».
Il vous appartient ainsi aux magistrats, dit-il, « de vérifier les renseignements qui vous sont fournis quelque qu'en soit leur source. Et ils doivent les vérifier avant de prendre des décisions. « Ne vous lasser jamais de procéder ou de faire procéder à tous les actes utiles à la manifestation de la vérité. C'est parce que l'honneur, la liberté et le patrimoine des personnes sont en jeu », conseille-t-il.
Mbacké Fall rappelle aussi que, « s'adressant au croyant, le Coran dit, « si un pervers (littéralement) vous apporte une nouvelle vérifier bien clair de crainte par inadvertance vous ne portez atteinte à des gens et que vous le regrettez par la suite ». Ce principe de précaution est à son avis, « de portée universelle » et « son exigence est presque impérative dans l'oeuvre de justice ».
Mbacké Fall se dit convaincu que, « les juges nommés au pool financier judiciaire vont mesurer « la lourdeur de vos responsabilités et qu'ils feront leur sacerdoce, la vérification des faits avant de prendre des décisions contre les personnes ». Selon toujours le procureur général, « il ne s'agira pas d'un règlement de comptes au sens péjoratif du terme mais plutôt d'une reddition des comptes », car il est impératif dit-il, « que les prévaricateurs des faibles ressources puissent rendre compte de leur gestion.
Ils devront régler leur compte avec l'Etat et ce ne sera que justice ». Le président de la Cour d'appel de Dakar, Abdoulaye Ba, appelle les juges à appliquer la loi, toute la loi, mais rien que la loi. Il juge que les magistrats nommés disposent de tous les atouts pour mener à bien leur sacerdoce et qu'ils s'y attèleront avec efficacité, sans tambour ni trompette.
Pour rappel, le pool financier a été instauré sous le régime du président Macky Sall. L'Assemblée nationale a voté la loi l'instituant le 23 juillet 2023 sous la présence du professeur Ismaïla Madior Fall alors garde des Sceaux, ministre de la Justice. Les vingt sept magistrats qui le composent ont été choisis par le président de la République, Bassirou Diomaye Fall en conseil supérieur de la magistrature du 9 août 2024.