Alors que nous célébrons la Journée internationale de la fille, il est préoccupant de constater que seules 16 millions des 37 millions d’adolescentes d’Afrique de l’Ouest et du Centre sont scolarisées et fréquentent un établissement secondaire. Parmi elles, moins de la moitié achèveront le premier cycle du secondaire, et beaucoup se marieront ou auront une grossesse précoce avant l’âge adulte. Ces chiffres indiquent une perte de potentiel, et des perspectives limitées par des circonstances indépendantes de leur volonté.
La bonne nouvelle, c’est que chaque dollar investi dans l’éducation et l’autonomisation des adolescentes peut avoir des retombées sur toute leur vie – voire sur plusieurs générations – et générer de profonds bénéfices économiques et sociétaux. Il ne s’agit pas seulement de promouvoir l’égalité des chances, mais de bâtir des économies dynamiques et résilientes ainsi que des sociétés inclusives. Aucun pays ne peut se permettre de laisser ses filles sur la touche s’il espère réussir dans la course mondiale au développement.
Voici cinq bonnes raisons d’investir dans les filles pour changer la donne et transformer la région :
- Briser le cercle vicieux de la pauvreté
Éduquer les filles est l’un des moyens les plus efficaces pour briser le cercle vicieux de la pauvreté. Pour chaque année supplémentaire de scolarisation, une fille voit ses futurs revenus augmenter de 14 %, lui permettant de subvenir aux besoins de sa famille et d’investir dans l’éducation et la santé de ses enfants.
Au Nigéria, l’initiative pour l’apprentissage et l’autonomisation des adolescentes (AGILE) a permis à plus de 3 millions d’élèves, dont 1,7 million de filles, d’accéder à l’enseignement secondaire et de mener à bien leurs études. L’objectif étant d’atteindre 8,6 millions de filles. De même, au Bénin, la gratuité du deuxième cycle du secondaire pour les filles, combinée à des programmes d’acquisition de compétences pratiques, permet de former une nouvelle génération de femmes instruites et autonomes.
Les filets de protection sociale se sont également avérés efficaces pour aider les filles à rester à l’école. Au Mali, le programme de protection sociale adaptative au Sahel a permis d’augmenter de 56 % les chances des adolescentes d’être scolarisées et de passer en classe supérieure.
- Transformer un défi démographique en un potentiel dividende démographique
L’Afrique de l’Ouest et du Centre affiche les taux de fécondité les plus élevés et une forte proportion d’adolescents. D’ici 2075, un tiers de la population mondiale en âge de travailler sera africaine. Sans mesures d’urgence, cette population de jeunes en pleine expansion pourrait devenir un défi démographique exerçant des pressions de plus en plus fortes sur les possibilités d’emploi pour la jeunesse.
Chaque année de scolarité supplémentaire réduit le nombre de mariages d’enfants de 6 points de pourcentage et les taux de fécondité de 0,26 enfant par femme. Un tel impact améliore non seulement la santé et les perspectives économiques des filles, mais a aussi des effets durables sur les générations à venir. Les enfants nés de mères adultes courent beaucoup moins de risques de troubles cognitifs, de maladies, de retards de croissance et de mortalité que ceux nés de mères adolescentes.
Au Niger, un programme de bourses d’études dans le cadre du projet pour l’autonomisation des femmes et le dividende démographique au Sahel (SWEDD), et soutenu par plusieurs gouvernements de la région et la Banque mondiale, a permis de réduire de moitié le nombre d’abandons scolaires et les taux de mariage précoce chez les adolescentes, un changement qui peut transformer l’avenir d’un pays.
- Créer des économies inclusives et résilientes
Des filles éduquées contribuent à bâtir des économies inclusives et résilientes. Les femmes réinvestissent jusqu’à 90 % de leurs revenus dans leur famille et leur communauté, contribuant ainsi à améliorer la santé, l’éducation et la stabilité. Des programmes comme le SWEDD dotent les filles de compétences entrepreneuriales, numériques et pratiques.
Filles ou garçons, les jeunes veulent des emplois, et il est essentiel d’offrir des opportunités de formation et d’apprentissage, en particulier aux filles qui n’ont jamais été scolarisées. En Côte d’Ivoire, plus de 65 000 jeunes Ivoiriens ont trouvé un emploi grâce à une formation professionnelle, à des stages ou à des programmes d’entrepreneuriat, et 100 000 jeunes supplémentaires bénéficient d’interventions axées sur l’emploi pour améliorer leurs compétences et leur employabilité.
- Tirer parti de l’innovation numérique pour améliorer l’apprentissage
Grâce aux technologies numériques, l’Afrique a la possibilité de surmonter les obstacles à l’éducation. Au Nigéria, l’initiative EdoBEST a permis de former plus de 15 000 enseignants, de les équiper de tablettes et de dispenser des cours à plus de 300 000 enfants. L’État d’Edo est aujourd’hui un pionnier de l’utilisation des outils d’IA générative pour accompagner les élèves du deuxième cycle du secondaire qui suivent des cours du soir en anglais.
Avec une jeunesse africaine tournée vers l’avenir, la demande d’innovation et de compétences numériques, en particulier pour les filles, n’a jamais été aussi pressante. L’ambitieux objectif de la Banque mondiale de former au moins 1 million de jeunes d’Afrique de l’Ouest et du Centre aux compétences numériques d’ici 2025, permettra à 60 % d’entre eux d’obtenir de meilleurs emplois. Cette initiative illustre le potentiel que représente l’autonomisation des filles et la priorité accordée à leur éducation.
- Former les futurs leaders africains
Des pays comme la Côte d’Ivoire, le Gabon et le Togo progressent vers une plus grande inclusion politique et économique, comme le souligne le dernier rapport Les Femmes, l’Entreprise et le Droit, qui suit les progrès des pays en matière de réformes sexospécifiques. Cependant, un écart important persiste entre les promesses juridiques et les réalités quotidiennes auxquelles les femmes et les filles sont confrontées. Il reste encore beaucoup à faire pour accélérer l’égalité sur l’ensemble du continent.
Le statu quo ne suffira pas. Il faudra s’employer dans tous les secteurs et institutions à promouvoir davantage de réformes en matière d’égalité des sexes, en adoptant des stratégies plus innovantes et fondées sur des données probantes ainsi que des opérations à grande échelle s’attaquant aux obstacles qui empêchent les femmes et les filles de réaliser pleinement leur potentiel.
Le prix à payer de la négligence de ce défi est trop élevé, surtout dans une région déjà en proie à la fragilité et aux conflits. La Banque mondiale s’est engagée à intensifier ses investissements en faveur des adolescentes par le biais d’une nouvelle plateforme destinée à soutenir leur résilience par l’éducation et l’autonomisation.
Ensemble, nous pouvons bâtir un avenir où chaque fille peut s’épanouir et assurer la transformation de l’Afrique de l’Ouest et du Centre – Rejoignez-nous !