Burkina Faso: CADHP - Exhorter le pays à respecter les droits humains

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communiqué de presse

Nairobi — L'examen du pays devrait se concentrer sur la protection des civils, l'espace civique et la reddition de comptes

La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) devrait se concentrer sur les problèmes les plus urgents auxquels est confronté le Burkina Faso lors de l'examen du pays qui aura lieu le 23 octobre 2024, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Le gouvernement burkinabè devrait de toute urgence protéger les civils affectés par le conflit armé, préserver l'espace civique pour les activistes, les journalistes et l'opposition politique, et veiller à ce que les auteurs de graves abus rendent des comptes.

La procédure d'examen des rapports des États, un mécanisme de l'Union africaine établi pour évaluer la conformité des États membres à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, exige des pays qu'ils soumettent des rapports réguliers détaillant les mesures, y compris législatives, prises pour faire respecter les droits consacrés par la Charte. Certains enjeux actuels en matière de droits humains au Burkina Faso ne sont pas abordés dans le rapport de mai 2023 soumis par les autorités du pays et qui couvre la période 2015-2021. Ces enjeux incluent les abus généralisés commis par les forces de sécurité de l'État et les groupes armés islamistes dans le cadre du conflit, les restrictions des droits et libertés fondamentaux et l'impunité généralisée.

« L'examen du Burkina Faso par la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples offre une occasion unique de dialoguer avec les autorités burkinabè sur leurs pratiques en matière de droits humains », a déclaré Allan Ngari, directeur du plaidoyer pour l'Afrique à Human Rights Watch. « La CADHP devrait pousser les autorités burkinabè à donner la priorité à la protection des civils lors des opérations militaires, et à garantir le respect du droit international humanitaire. »

Le Burkina Faso lutte contre une insurrection menée par le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM), lié à Al-Qaïda, et l'État islamique dans le Grand Sahara (EIGS) depuis que ces groupes armés ont envahi le pays depuis le Mali en 2016. Le Burkina Faso a connu deux coups d'État militaires depuis 2022.

Le rapport du Burkina Faso décrit les mesures prises pour lutter contre « l'extrémisme violent » et le terrorisme, telles que la création d'un pôle chargé de l'enquête et de la poursuite des infractions de terrorisme, ainsi que la mobilisation de prévôts responsables de la discipline des militaires et de la protection des droits des détenus. Le rapport indique également que les forces de sécurité reçoivent une formation en matière de droits humains et de droit international humanitaire afin de prévenir les abus, et que les responsables d'« actes inhumains ou dégradants » sont tenus de rendre compte de leurs actes.

Human Rights Watch a documenté de graves abus commis par les forces de sécurité burkinabè lors d'opérations de contre-insurrection tout au long de la période couverte par le rapport et depuis lors, y compris des crimes contre l'humanité. Les soldats ont tué illégalement et fait disparaître de force des centaines de civils qu'ils accusaient de collaborer avec des groupes armés islamistes.

Les groupes armés islamistes ont commis de graves abus contre les civils, notamment des exécutions sommaires, des violences sexuelles, des enlèvements et des pillages, et continuent d'assiéger de nombreuses villes et villages dans le pays.

En avril 2023, la CADHP a publié un communiqué à la suite de l'assassinat de dizaines de civils présumément par les forces de sécurité dans le village de Karma, dans la province du Yatenga, exhortant les autorités à ouvrir des enquêtes et à « assurer la protection des civils ». En novembre 2023, le Groupe de travail sur la peine de mort, les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et les disparitions forcées en Afrique de la CADHP a signé une lettre d'appel urgent à la suite d'une attaque contre des civils dans le village de Zaongo, dans la province du Namentenga, demandant également l'ouverture d'une enquête.

En vertu du droit international, la responsabilité première d'assurer la justice pour les crimes les plus graves incombe au gouvernement burkinabè. Pourtant, il n'a fait que de faibles progrès en matière d'enquêtes, et encore moins en matière de poursuites judiciaires, contre les responsables des nombreux graves crimes commis dans le cadre du conflit armé depuis 2016. Le rapport du Burkina Faso ne fournit aucune information sur les enquêtes relatives aux abus présumés commis par les forces de sécurité gouvernementales au cours de la période couverte, ni sur d'éventuelles procédures judiciaires.

Le rapport mentionne également des mesures prises pour faire respecter les droits civils et politiques, notamment une loi de juin 2017 destinée à protéger les défenseurs des droits humains. Toutefois, les autorités burkinabè ont restreint les droits civils et politiques au cours de la période couverte par le rapport et depuis lors, a déclaré Human Rights Watch.

Depuis sa prise de pouvoir en 2022, la junte a systématiquement réprimé les activistes, les membres des partis d'opposition, les journalistes et ses détracteurs. Human Rights Watch a largement documenté le recours à la conscription illégale pour réduire au silence les dissidents, ainsi que les enlèvements et disparitions forcées de dizaines de détracteurs du gouvernement et de dissidents.

En décembre 2023, la CADHP s'est déclarée préoccupée par l'enlèvement de l'éminent défenseur des droits humains Daouda Diallo et par les « actes d'intimidation, de harcèlement judicaire et de représailles » à l'encontre de tous les défenseurs. En juillet, elle a dénoncé la disparition forcée présumée de trois journalistes burkinabè, appelant les autorités à fournir des informations sur le lieu où ils se trouvent et à les libérer. Les autorités n'ont fourni aucune information sur le lieu où se trouvent les journalistes, malgré les demandes de leurs familles et de leurs avocats.

La CADHP ne s'est pas rendue au Burkina Faso depuis plusieurs années. Elle devrait envisager de demander l'autorisation d'effectuer une visite officielle afin d'évaluer la situation des droits humains et de publier un rapport complet, a déclaré Human Rights Watch.

« La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples devrait discuter de manière approfondie des graves abus commis par les forces de sécurité burkinabè et par les groupes armés islamistes, ainsi que de la nécessité d'assurer la reddition des comptes », a conclu Allan Ngari. « La CADHP devrait également recommander des mesures concrètes pour garantir la protection des activistes, des journalistes et des opposants politiques au Burkina Faso, afin de leur permettre d'effectuer leur travail sans crainte. »

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