Human Rights Watch estime qu'un rapport présenté par Ouagadougou à la Commission africaine des droits de l'Homme omet délibérément les abus de l'armée.
Les Etats membres de l'Union africaine, qui ont adopté la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples, sont tenus de présenter des rapports réguliers sur les mesures prises pour assurer le respect des droits consacrés par la Charte.
Pour la session qui se tiendra ce mercredi 23 octobre, Human Rights Watch suggère que la commission se concentre davantage sur les graves atteintes aux droits de l'Homme au Burkina Faso.
Dans une interview à la Deutsche Welle, Carine Kaneza, directrice adjointe de la division Afrique de HRW, parle notamment des abus généralisés commis par les forces de sécurité de l'Etat et par les groupes armés islamistes, des abus qui ont délibérément été omis dans le rapport que ce pays a présenté à la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples.
"Méthodes terroristes"
Selon Carine Kaneza Nantulya, "le rapport du Burkina Faso couvre la période 2015-2021. Ce que nous disons est que certains abus que nous avons documentés à l'époque n'y sont pas repris. Nous appelons la commission à soulever également dans son examen tous ces abus, qui, d'ailleurs, continuent d'être commis par les forces de défense et de sécurité et les groupes armés islamistes."
Newton Ahmed Barry, journaliste burkinabè et spécialiste du Sahel, déplore que ces dernières années, les forces de défense et de sécurité aient utilisé les méthodes des terroristes pour intimider les populations.
Pour lui, "nous ne pouvons accepter que les forces de défense et de sécurité puissent se rendre coupables de violations des droits de l'Homme. En ce qui concerne les terroristes, nous savons que c'est leur domaine de définition. Les forces de défense ne peuvent pas prétendre combattre des terroristes, tout en ressemblant à des terroristes".
Des centaines de civils tués
Dans un rapport d'environ 200 pages, le Burkina Faso souligne pour sa part les efforts réalisés pour assurer le droit à la sécurité, garanti par la Charte des droits de l'Homme et des peuples.
Carine Kaneza Nantulya estime que "le rapport est un catalogue qui présente des mesures prises par le gouvernement entre 2015 et 2021. On peut noter, par exemple, la création d'une brigade spéciale d'investigation antiterroriste et des mesures pour enquêter et réprimer les actes de terrorisme."
Toujours selon Human Rights Watch, depuis février 2024, les groupes armés ont tué au moins 128 civils. Quant à l'armée burkinabè, elle a tué 223 civils, dont au moins 56 enfants.
Toutes ces données devraient être examinées lors de la session de la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples.