Ce 19 novembre marque la Journée mondiale des toilettes. À Madagascar, les enjeux sont colossaux. La dernière enquête démographique et de santé réalisée en 2021 montre que seul un tiers de la population a accès à des installations sanitaires de base. Le pays s'est engagé à éradiquer la défécation à l'air libre d'ici à 2030. Direction le Grand sud de l'île, où de nouvelles stratégies financées par l'Unicef ont été mises en place pour convaincre les populations d'adopter les toilettes.
Dans la commune de Saint-Augustin, dans le sud-ouest de Madagascar, un vent de nouveauté souffle sur les villages de pêcheurs environnants. Des dizaines de nouvelles cahutes ont poussé à deux pas des maisons, comme chez cette mère de famille. En tout, ils sont trois ménages, soit 17 personnes, à utiliser ces latrines. « Après les avoir utilisés, il faut jeter des cendres dans le trou pour éviter les odeurs. Et quand tout ça est fini, on referme avec le couvercle », explique-t-elle.
Pour Linah et les siens, c'est un vrai changement d'habitude. Auparavant, il fallait marcher quinze minutes pour aller se soulager à l'embouchure du fleuve. « Nous, gens d'ici, on a toujours déféqué à l'air libre. C'est culturel. Mais on nous a expliqué que ça provoquait des maladies d'agir comme ça. Alors, il y a deux mois, on a décidé de changer. On s'est cotisé. Qui a construit ça ? C'est nous ! », s'exclame Linah.
Impliquer la communauté
Sensibiliser à « faire faire » par les communautés, plutôt que tout donner clé en main, marque la nouveauté dans cette lutte contre la défécation à l'air libre.
« Notre approche, c'est qu'on ne veut pas construire les toilettes pour les gens. On n'en fait pas don non plus », précise Jean-Claude Vorimasy, directeur des activités de sensibilisation au sein de l'ONG Sahy dans la région Atsimo Andrefana. Ces activités sont financées dans cette zone par l'Unicef depuis 2022. « En fait, on s'est rendu compte que si les communautés ne payaient rien, elles ne s'impliquaient pas et très vite, revenaient à leurs anciennes pratiques. Notre technique à nous, c'est qu'on les convainc qu'ils ont la capacité de changer et de construire eux-mêmes. On leur explique comment creuser la fosse, construire la dalle avec les matériaux locaux. Et ce sont eux qui font tout. »
Dans les autres régions où opère l'ONG Sahy, le système a porté ses fruits. Mais c'est dans la durée que l'on saura si ces nouvelles approches fonctionnent aussi dans le Grand Sud. Linah, elle, l'assure : dès que sa fosse sera pleine, c'est sûr, elle compte bien reconstruire de nouvelles toilettes à côté des anciennes.
Dans le monde, il est estimé qu'une personne sur trois n'a pas accès à des toilettes et a, de fait, recourt à la défécation à l'air libre. Une pratique qui favorise la propagation des maladies diarrhéiques et de pathologies infectieuses. L'absence de toilettes décentes nuit également à la sécurité des femmes et des filles.