En Algérie, le juge du tribunal correctionnel devant lequel Boualem Sansal a été présenté doit rendre son verdict ce jeudi 27 mars. L'écrivain franco-algérien, arrêté à la mi-novembre, encourt jusqu'à dix ans de prison pour des propos qu'il a tenus dans un média français d'extrême droite. Ce jugement fait polémique au sein de la classe politique française qui se mobilise pour demander sa libération.
Boualem Sansal a été arrêté peu de temps après sa descente de l'avion à l'aéroport d'Alger, le 16 novembre dernier. Très vite, il a été accusé par les autorités algériennes d'atteinte à l'intégrité du territoire et d'intelligence avec des parties étrangères pour des propos tenus sur la question épineuse de la frontière entre le Maroc et l'Algérie.
La semaine dernière, lors d'un procès qui a duré près de 30 minutes, Boualem Sansal a tenu à se défendre seul, malgré la présence d'un avocat qui lui avait été commis d'office. Son conseil français, Me François Zimeray, n'a jamais obtenu de visa pour se rendre à Alger.
Si la charge de l'intelligence avec l'ennemi a été abandonnée, le parquet a tout de même requis dix ans de prison ainsi que 1 million de dinars d'amende (environ 298 000 euros) contre l'écrivain de 80 ans atteint d'un cancer. Il est notamment accusé d'atteinte à l'intégrité du territoire national, d'atteinte aux institutions et à l'armée et d'atteinte à l'ordre public.
Le procès qui est fait à notre compatriote est le procès d'un homme libre qui refuse de détourner le regard sur le réel ou de le baisser face aux intimidations violentes et brutales. C'est aussi le procès de la démocratie et des droits de l'Homme.
Welly Diallo Cette affaire a provoqué l'émoi de la classe politique française. Le 27 janvier, une proposition de résolution européenne a été déposée par des députés du parti Renaissance pour demander sa libération. Une résolution qui a été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le mercredi 30 avril.
En France, les députés espèrent une issue favorable Tous les députés espèrent une issue favorable. Un espoir d'autant plus grand qu'Abdelmadjid Tebboune, le président algérien, a joué récemment la carte de l'apaisement. « Nous pouvons voir les mots d'apaisement comme des mots d'espoir pour Boualem Sansal. On croise les doigts parce que face à un gouvernement qui a décidé d'avoir quand même des attitudes autoritaristes, on peut s'attendre au tout bon comme au pire », explique la socialiste Béatrice Bellay au micro de Victorien Willaume.
Si l'écrivain est condamné et si le président algérien ne décide pas de le gracier, quelle attitude adopter ? Au Modem, malgré le risque de rupture, on défend la ligne dure de François Bayrou. « Il y aura une graduation des sanctions parce qu'on ne peut pas laisser les choses se faire comme cela. C'est tout. Ce n'est pas une menace. La démocratie a un prix », assure Philippe Vigier.
Pour la gauche, la voie diplomatique discrète devra être privilégiée. C'est la position des socialistes et des insoumis qui reconnaissent des vertus à la posture du président français et du ministre des Affaires étrangères. « Jean-Noël Barrot et Emmanuel Macron ont quand même des positions beaucoup plus sensées sur la question algérienne et sur la question du rapport avec le pouvoir algérien. Il faut aussi que les voix diplomatiques qui ont été une richesse de la France par le passé puissent exercer sur des dossiers comme cela où l'on sait que cela se règle en coulisses », poursuit Thomas Portes. Le député LFI salue d'ailleurs le potentiel déplacement de Jean-Noël Barrot à Alger au début du mois prochain.