Afrique: Banjul à l'heure du bilan des dix ans de la Charte africaine de la jeunesse

Le Directeur Régional de UNFPA/WCARO, Mabingué Ngom (en bleu) à côté de la Vice-présidente de la Gambie et de son ministre de la jeunesse, à l'ouverture officielle du 10ème anniversaire de la Charte Africaine de la Jeunesse (Banjul +10), le mardi 24 Mai.
23 Mai 2016

L’Union africaine est revenue à Banjul pour évaluer la charte africaine de la jeunesse, après l’avoir initiée il y a dix ans, dans cette même capitale  gambienne. Le bilan est aujourd’hui assombri par une crise sans précédent qui frappe la jeunesse africaine. Une situation qui dicte la nécessité d’un changement de paradigme. Dans un contexte d’agenda post 2015, la jeunesse du continent veut se faire entendre et s’engage dans la réalisation du Dividende Démographique.   

Banjul est, depuis le 21 mai 2016, le point de ralliement de la jeunesse africaine. Dix ans après l’adoption de la Charte africaine de jeunesse, dans cette même capitale gambienne, retour à la case départ, pour faire le point sur la mise en œuvre de cet ambitieux texte. Rendez-vous ne peut pas être plus important car non seulement elle porte sur l’avenir de 60% de la population africaine mais aussi l’heure est pour les chefs d’Etat de faire le point par rapport aux engagements pris il y a dix ans à Banjul.

Le bilan qui sera tiré au cours de cette semaine s’annonce peu reluisant vu la situation de crise qui tenaille la jeunesse africaine. Le Représentant de l’UNFPA auprès de l’Union Africaine et de la Commission Economique pour l’Afrique (CEA) à Addis Abeba, M. Constant-Serge Bunda constate : « Nous avons l’impression que depuis 10 ans pas grand chose n’a été fait ». Une étude financée par UNFPA sur la mise en œuvre des résolutions de Banjul, il a été rendu compte que beaucoup de défis restent à être relevés concernant les questions de jeunesse.

Dans cette même dynamique, le directeur régional de UNFPA Afrique de l’Ouest et du Centre, M. Mabingué Ngom confie que les jeunes représentent les trois cinquième de la population de chômeurs en Afrique et plus de 50% de cette frange de la population vit sous le seuil de la pauvreté.

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M. Ngom s’est également ému du fait qu’un quart de jeunes est analphabète, leur accès aux services sociaux de base est dérisoire. « La situation présente est grave », s’est-il écrié.

Cette rencontre de Banjul se tient également dans un contexte où pratiquement l’Afrique voit arriver chaque année 10 millions de jeunes sur le marché du travail sans grandes perspectives.

Le désarroi de la jeunesse africaine se caractérise par le phénomène de l’immigration clandestine avec des chavirements au quotidien d’embarcations de fortune dans la mer méditerranée.

L’un des grands ravages qui menace l’existence des jeunes filles adolescentes notamment leur vulnérabilité. Dans beaucoup de pays africains, une fille sur trois est victime de grossesse précoce. « En Afrique du Sud, par exemple, chaque année près de 20 mille jeunes fille sont obligées d’abandonner l’école à cause des grossesses précoces et ce phénomène de mariage précoce », renseigne M. Bunda. Pour lui il s’agit ici d’une question de droit  de l’homme qui a un impact sur la vie de millions d’individus.

La question des jeunes au cœur de l’agenda des chefs d’Etats

La rencontre Banjul + 10 est jugée plus qu’importante par beaucoup d’observateurs qui le placent dans un contexte au moment où les chefs d’Etats africains viennent de décider de la mise en œuvre de l’agenda 2063 qui est celui de l’Union africaine pour le bien-être de ses peuples et également pour le développement du continent.

L’une des aspirations clés de cet agenda c’est une Afrique construite à travers l’autonomisation des jeunes.

Banjul se tient également au moment où la communauté internationale vient d’adopter les Objectifs de développement durables (ODD) qui concernent avant tout les priorités de l’Afrique qui est le ventre mou du développement.

Banjul +10 arrive à un moment où les chefs d’Etats africains ont décidé de consacrer leur sommet de juillet 2017 prévu à Kigali, à la question importante du Dividende Démographique, à travers les investissements pour les jeunes.

A travers les campagnes électorales des 16 présidentielles répertoriées cette année en Afrique, il est noté que les programmes politiques s’articulent autour de la problématique des jeunes.

Les jeunes appelés à faire preuve d’ambition

Face aux échecs relevés dans les stratégies jusque-là mis en œuvre, les chefs d’Etat ont décidé de responsabiliser les jeunes dans l’élaboration de la nouvelle feuille de route qui sortira de ces assises de Banjul. Une démarche voulue pour que les jeunes fassent entendre leurs voix et proposer des solutions à leur problème qu’ils connaissent mieux.

La feuille de route demandée par les Chefs d’Etat pour le sommet de Kigali de juillet 2016 offre ainsi cette opportunité. Pour la première fois les chefs d’Etat ont décidé du thème de leur sommet une année à l’avance mais aussi une feuille de route de manière participative pour qu’il y ait des solutions ou des idées au niveau des pays, des sous commissions régionales et au niveau continental.

Pour ne pas s’éloigner des objectifs fixés, ces investissements voulus doivent tenir compte de quatre piliers importants du dividende démographique dont la santé, les questions d’éducation, d’emploi et l’autonomisation des jeunes (gouvernance, responsabilité…)

Dans cette nouvelle dynamique, les jeunes sont appelés à faire preuve d’ambition et d’innovation. « Aujourd’hui, nous savons très bien qu’aucun pays africain ne peut absorber 10 millions de jeunes qui rentrent dans le marché du travail chaque année », fait remarquer M. Bunda.

Devant ce blocage, les jeunes doivent soumettre des solutions que les gouvernements sont tenus d’accompagner. L’UNFPA pense qu’il est important d’investir sur l’esprit d’entreprenariat pour que ces jeunes soient en mesure de créer des startups, des entreprises et que les gouvernements mettent en place des facilités d’accompagnement comme le crédit.

M. Bunda estime rassurant le fait que « l’avenir appartient à l’Afrique ». A son avis, D’ici 2050, sur les neuf pays qui accueilleront la population mondiale cinq sont situés en Afrique dont le Nigéria, la Tanzanie, l’Ouganda, l’Ethiopie et la RD Congo. Ce qui, souligne-t-il, ne veut pas dire que d’autres pays comme le Niger, le Mali n’auront pas le doublement de leur population. Il considère que c’est à la fois d’énormes opportunités en terme de marché, en terme d’investissements et de perspectives. Mais aussi en terme d’exporter ces compétences vers certains pays notamment occidentaux ou le taux de natalité est en train de baisser, se situant en dessous du seuil de renouvellement.

De cette rencontre de Banjul, il est attendu des messages clés qui seront inclus dans la feuille de route réclamée par les chefs de l’Etat qui veulent des propositions concrètes, des activités pour changer la vie des jeunes, améliorer les conditions des populations.

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