La Chine est un allié sûr mais ses interventions en Afrique continuent de susciter des craintes. Dans une dynamique de disruption, cette puissance asiatique est appelée à repenser sa coopération avec l'Afrique. Elle est priée de donner plus de place à des partenariats gagnant-gagnant pour éviter de tomber dans les mêmes travers d'une relation de domination.
La dette des pays africains envers la Chine ne cesse de grimper. La présence d'ouvriers chinois dans des chantiers que des entreprises chinoises exécutent en Afrique se fait de plus en plus sentir.
Ce sont entre autres éléments qui contribuent à renforcer les idées arrêtées que beaucoup d'observateurs portent sur les relations sino-africaines.
C'est à l'image de certaines réactions notées lors du workshop consacré aux relations Chine-Afrique, tenu ce jeudi 8 novembre à Tanger dans le cadre de la 11ème édition des MEDays.
M. Adama Gaye, conseiller en investissement qui a mis les pieds dans le plat estime que « nous avons une coopération problématique. La Chine est un allié qui sait où il va et elle fait face à des pays africains qui sont toujours dans une posture de demandeur ».
M. Gaye tient à rappeler que la Chine est trempée dans une compétition face aux USA et elle vient en Afrique plus pour ses intérêts et rien d'autre.
Des réactions qui ont suscité une vive réaction de la partie africaine qui a pris part à cette rencontre.
C'est à l'image de M. Andrew Leung qui invite l'opinion africaine à éviter de charger les relations entre les deux parties par stéréotypes.
A son avis, les présence des ouvriers fait partie du volet service que les entreprises chinoises offrent et ne doit en aucun cas être perçu comme de l'investissement.
Devant cet état de fait, il pense que les deux parties doivent éviter une approche de dépendance.
Dans la même veine, un des orateurs chinois, M. Guang Yang, rejette ce qu'il qualifie de vue biaisée avec les positions qui avancent que la Chine n'est qu'intéressée que par les ressources naturelles.
A l'en croire, la Chine a créé 20 centres agricoles et des dispositifs hospitaliers, ces dernières années en Afrique.
Pour lui, la plupart de la dette africaine appartient au club de Paris et au club de Londres et que le service de la dette des pays africains envers la Chine est sain et il est à également moins de 20%.
Par contre, il reconnait la nécessité d'instaurer une approche globale dans cette coopération. Sous ce rapport, la plupart des intervenants plaident pour le développement d'une stratégie claire de la Chine en Afrique et vice versa.
Pour M. Jawad Kerdoudi, Président de l'Institut marocain des relations internationales (Imri), la Chine a une politique sur le long terme contrairement aux Etats-Unis qui depuis l'arrivée de Donald Trump s'enlise dans un unilatéralisme.
Ce qui, à son avis, place le géant asiatique en bonne posture pour devenir la première puissance mondiale en 2030.
Devant cette dynamique ambitieuse, M. Kerdoudi pense que les pays africains doivent évaluer la politique chinoise pour mieux se repositionner.
Sur ce même ordre d'idée, la Directrice régionale de la CEA, Mme Lilia Naas Hachem de préciser que « le développement de l'Afrique passera par une plus grande ouverture de ses pays, entre eux et avec le reste du monde ».
A cet effet, elle estime que le changement d'orientation du Maroc est un exemple à suivre. Ce qui, à son avis, confère à l'Afrique du Nord une place particulière par rapport au reste du continent. « L'Afrique du Nord doit jouer le rôle d'intermédiation entre le continent et le reste du monde ».
Sur cette même lancée, M. Moubarak Lô, économiste et conseiller du Premier ministre sénégalais encourage le gouvernement chinois développer la politique de délocalisation des industries de son pays vers l'Afrique ainsi que le transfert de technologie.
Toujours dans sa même ferveur M. Adama Gaye invite l'Afrique à arrêter le suivisme et avoir son propre agenda quel que soit le partenaire d'en face.
Un ensemble de questionnements qui amènent M. Mame Aly Konté, consultant international et spécialiste sur les questions de développement durable et de géographie, à se demander : « Est-ce qu'il y a un rêve africain face aux rêves chinois ? »
Une interrogation qui remet sur la table les questions de gouvernance et des conditions de réaliser le rêve africain.
Selon lui, nos gouvernants ont un problème parce que souvent quand ils sont en face de la Chine, ils ne savent pas quoi faire. Avant de confier que « La Chine est en train de polir son image en achetant des espaces médiatiques en Afrique mais quelle est l'image de l'Afrique en Chine ».