Jusqu'au bouleversement du 26 juillet 2023, ce pays jouait un rôle cardinal dans la lutte contre le djihadisme et l'endiguement de l'immigration irrégulière vers l'Europe.
Toutefois, les récentes turbulences politiques au Niger laissent entrevoir un changement de cap. Écho aux tensions de ses voisins francophones, le Mali et le Burkina Faso, le Niger sous administration militaire depuis le coup d'État, manifeste une défiance croissante envers ses partenaires occidentaux.
L'accusation du 9 août 2023, formulée par le nouveau gouvernement de Niamey, est particulièrement symptomatique de ce climat de méfiance : la France est accusée d'avoir violé l'espace aérien nigérien. Cette révélation s'ajoute à d'autres griefs exprimés par le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), l'entité désormais au pouvoir, notamment concernant la prétendue libération unilatérale par Paris de terroristes détenus sur le sol nigérien.
Le Niger, le Mali, le Burkina Faso : un trio de méfiance ?
Si cette accusation a été rapidement réfutée par la France, elle n'en rappelle pas moins des tensions antérieures entre Paris et d'autres nations du Sahel. Le Mali et le Burkina Faso, ayant tous deux vécu des changements politiques abrupts, ont également affiché une hostilité envers leur ancienne métropole. En conséquence, la présence militaire française, incarnée par les forces Barkhane et Sabre, s'est retirée de Bamako et Ouagadougou, suscitant de profondes interrogations sur l'avenir sécuritaire de la région.
Outre les tensions militaires, ces pays semblent prendre leurs distances vis-à-vis de nombreux partenaires occidentaux. Dès lors, une question se pose avec acuité : le Niger, potentiellement influencé par les postures du Mali et du Burkina Faso, s'engagera-t-il sur une trajectoire similaire ?
Des conséquences géopolitiques majeures
Un éloignement entre le Niger et l'Occident aurait des implications sérieuses pour la géopolitique régionale. La France, après avoir revu sa présence militaire au Mali et au Burkina Faso, s'est largement appuyée sur Niamey. La présence de 1 500 soldats français, la plus conséquente de la région, est cruciale pour contrer les menaces jihadistes, notamment dans la zone dite des "trois frontières". Cette présence est aussi indissociable de l'installation des bases militaires américaines à Niamey et à Agadez.
Au-delà des enjeux militaires, le Niger est une pièce maîtresse dans la gestion des flux migratoires. Carrefour migratoire entre l'Afrique subsaharienne et la Méditerranée, il est essentiel pour contenir l'immigration irrégulière vers l'Europe. L'Union européenne, consciente de cet enjeu, collabore étroitement avec Niamey, notamment à travers divers programmes de financement.
Les puissances occidentales, face à ces défis et à la perspective d'un Niger moins coopératif, sont en ébullition diplomatique. Elles aspirent à sauvegarder une partie de leurs intérêts stratégiques, reconnaissant que l'avenir de leurs relations avec les pays de la région sahélienne en dépend largement.