Nairobi, Kenya — Le Sommet Allafrica des Leaders des Médias d’Afrique s’est ouvert le mercredi 08 mai à Nairobi, au Kenya, et se tiendra jusqu’au 10 mai sous le thème « Repenser les Médias d’Afrique en cette Période de Mutations Profondes ».
En effet, cet événement continental a réuni des acteurs importants des médias, notamment des journalistes influents, des rédacteurs en chef seniors, des organisations de la société civile, des universitaires, des chefs d'entreprise mais aussi des chefs d'État et des dirigeants des institutions les plus prestigieuses d'Afrique, telles que l'Union africaine, la Banque africaine de développement et la Commission économique des Nations unies pour l'Afrique.
A cet effet, Dr Akinwumi A. Adesina, Président du Groupe de la Banque africaine de développement a tenu un discours fédérateur dans un contexte ou le continent fait face à de nombreux défis.
Selon lui, ce rassemblement se tient à un moment de grand défi pour l’Afrique, et en particulier pour le Kenya, et plusieurs autres pays africains, dont la Tanzanie, le Rwanda et le Burundi, qui ont été dévastés récemment par des tempêtes torrentielles et des inondations.
« Tant de gens ont perdu la vie, tragiquement. À vous, Monsieur le Président Ruto, ainsi qu’au gouvernement et au peuple du Kenya, je tiens à présenter nos sincères condoléances et notre sympathie » a-t-il déclaré.
A l’en croire, le Groupe de la Banque Africaine de Développement se tient aux côtés du Kenya dans sa reconstruction. Dès lors, il a affirmé que : « Vous pouvez compter sur notre soutien sans faille. Vous guérirez. Vous vous rétablirez. Vous reconstruirez. Et vous prospérerez, malgré les défis de cette dévastation induite par le climat, que vous n’avez pas causée, mais dont vous et le reste de l’Afrique souffrez de manière disproportionnée ».
Conformément au thème de cette édition du Sommet d’Allafrica des Leaders des Médias d’Afrique, Dr Adesina s’est exprimé sur l’importance et le rôle capital des médias dans le continent. Pour lui, des médias indépendants, professionnels, responsables et prospères sont essentiels à la liberté d’expression, au développement de la démocratie et au renforcement des sociétés inclusives.
Assurément, cela a été un parcours difficile pour les établissements et les entreprises de médias à travers l’Afrique depuis la pandémie de Covid-19, a-t-il indiqué. Il s’y ajoute que la pandémie sans précédent a perturbé les modèles commerciaux, modifié les relations avec le public, réduit les revenus et mis à l’épreuve les valeurs professionnelles et la confiance du public.
Cependant, le patron de la BAD d’assurer que « nous vivons à une époque dynamique ou la technologie continue d’évoluer rapidement ». En effet, il a insisté sur le fait que l’essor de l’Internet, des plateformes de médias numériques et sociaux a détourné l’attention du public de sa dépendance à la radio, à la télévision et aux publications imprimées.
Par conséquent, « les deux tiers de la population mondiale se tournent désormais vers Internet, les réseaux sociaux et une pléthore de médias et d’applications numériques pour accéder à des actualités, des informations et des divertissements en temps réel », a-t-il déclaré.
Selon lui, le changement dynamique est largement alimenté par l’utilisation généralisée des téléphones mobiles. D’ici 2030, Dr Adesina estime que 6 milliards de personnes dans le monde auront accès aux smartphones. Parmi eux, 692 millions se trouveront en Afrique.
Le Président de la BAD de renseigner que ces changements transformateurs ont déréglementé la création et la distribution de contenu d’actualité, y compris le contenu créé par des robots, l’IA et les deep fakes, ce qui crée un tout nouveau monde où les frontières entre réalité et fiction peuvent devenir floues.
Dans la quête de parts de marché et la domination des contenus sur les réseaux sociaux, Dr Adesina a mentionné que les évolutions véritablement positives en Afrique passent inaperçues au milieu des bavardages, alors que des informations non filtrées sont divulguées à des publics informés et non informés.
« Dans ce nouvel écosystème, le public a tendance à ne pas évaluer de manière critique ni à réfléchir au contenu des « actualités » et est souvent incapable de discerner ou de tracer un récit clair pour l’Afrique au milieu du nuage d’informations et de désinformation », assure-t-il.
Par conséquent, les nouvelles positives et bonnes sur l’Afrique disparaissent souvent, et sont sous-estimées, voire mises de côté, a-t-il poursuivi.
Selon lui, les récits négatifs ont dominé les médias au Sénégal pendant l’élection présidentielle du 24 mars dernier. « Même s'il y a eu des difficultés, le Sénégal a connu des élections pacifiques et une transition du pouvoir du parti au pouvoir au parti d'opposition ».
« Lors d'une élection avec 19 candidats, les résultats ont été annoncés en quelques heures, et tous les candidats, y compris le président sortant, ont félicité le vainqueur, sans dissidence ni contestation judiciaire. Le président en exercice a invité le vainqueur présumé des élections au palais avant même l'annonce des résultats complets », s’est –il réjoui.
En effet, Dr Adesina a souligné qu’« il s’agissait pourtant d’un pays africain, malgré les difficultés, qui venait de donner lieu à des élections mondialement respectées et d’effectuer un transfert de pouvoir hautement louable – un modèle pour le reste de l’Afrique ».
En tant que Président du Groupe de la Banque Africaine de Développement ayant pour mandat de mobiliser des ressources pour le développement de l’Afrique, Dr Akinwumi A. Adesina se dit parfaitement conscient de l’importance de l’information, de la façon dont elle est produite, qui la produit, comment elle est utilisée, et comment elle est interprétée et son impact.
Etant la seule institution financière notée AAA sur le continent au cours des 9 dernières années pendant lesquelles il a été le Président de la BAD, « mon équipe, le Conseil d'Administration, les actionnaires et moi-même travaillons sans relâche pour garantir que notre notation reste intacte » renseigne-t-il. Ainsi, « nous pourrons fournir à nos 54 pays membres régionaux des financements concessionnels pour accélérer leur développement » a-t-il déclaré.
A la fin de son discours, Dr Adesina a lancé un appel fort aux leaders des médias.
« Je vous appelle en tant que leaders des médias, devenez les vuvuzelas de l'Afrique ! Racontez les histoires positives de l’Afrique ».